54.  MOURIR DANS LA DIGNITÉ

Quelle différence y a-t-il entre les mouroirs de nos pays occidentaux, l’abandon des personnes âgées par leurs familles parties en vacances (on l’a bien vu il y a quelques années lors d’un été caniculaire) et l’abandon par les Bushmen de leurs anciens incapables de suivre le clan, dans la culture nomadique traditionnelle, au Botswana ou en Namibie?  Il y a quelques décennies, lorsque cette vie nomadique avait encore cours, une personne âgée qui avait de plus en plus de mal  à suivre le groupe était finalement laissée au pied d’un arbre ou d’un buisson, munie en tout et pour tout d’un oeuf d’autruche évidé et rempli d’eau, dernière provision  accordée au vieux grand-père ou à la vieille grand-mère devenu un fardeau trop lourd à porter pour le groupe.  On lui faisait ses adieux, et le groupe reprenait ensuite sa marche pour trouver ailleurs les moyens de sa subsistance.  Une forme d’euthanasie passive, en quelque sorte... Alors, oui, quelle différence entre cet abandon dicté par un certain mode de vie, et l’abandon par les occidentaux de leurs vieux à eux?  La différence gît sans doute dans l’égoïsme matérialiste de nos sociétés gavées de privilèges au point de nier le sens profond de la vie.    Dans le Décalogue, les Dix Commandements que l’on trouve au livre de l’Exode, dans l’Ancien Testament de la Bible,  le cinquième commandement déclare: Honore ton père et ta mère afin de jouir d’une longue vie dans le pays que l’Eternel ton Dieu te donne.  Un commandement suivi d’une promesse donc. 

Jouir d’une longue et prospère vie ne passe pas par l’abandon de la génération qui nous a donné la vie, nous a éduqués et s’est occupée de nous aux jours de notre enfance.  Au contraire cela est lié par Dieu au respect qui consiste entre autres à accompagner la génération précédente jusqu’à la mort avec soin et affection, sur le plan familial aussi bien que social.  Oui, accompagner les anciens à mourir dans la dignité fait partie de l’application du cinquième commandement.  Jésus a vertement repris ceux qui, de son temps, tiraient prétexte des offrandes destinées au culte dans le Temple de Jérusalem, pour priver leurs parents de l’assistance qu’ils auraient pu leur apporter. Il leur a reproché d’annuler la Parole de Dieu, c’est-à-dire ce commandement particulier,  au profit de leur tradition soi disant religieuse, en les traitant même d’hypocrites.  Cela devrait suffire pour remettre en question l’égoïsme monstrueux de plus en plus enraciné dans nos sociétés dites libérales et avancées: car en fait elles ont institué de manière subtile une forme d’euthanasie pratique purement motivée par un esprit de jouissance et d’indifférence vis-à vis de ceux-là mêmes qui sont les plus proches de nous: les parents que Dieu, le Père éternel,  nous a donnés.