71. JUSTIFIER LA VIOLENCE? (2)

L’Évangile justifie-t-il la violence ?  On ne trouve nulle part  dans le Nouveau Testament une telle justification.  Jésus-Christ invite ses disciples à le suivre dans son exemple et son attitude :  même s’il est le Fils de Dieu, et a le pouvoir d’invoquer des légions d’anges qui viendraient à son secours, en particulier au moment de son arrestation, il n’a pas recours à la violence, et dissuade ses disciples de le défendre par la force des armes.  Au chapitre vingt-deux de l’Évangile selon Luc, nous lisons un passage significatif qui nous éclaire sur l’attitude de Jésus sur toute cette question.  Il s’élève une dispute entre ses disciples pour savoir lequel d’entre eux est le plus grand.  Jésus leur dit :  « Les rois des nations les dominent et ceux qui ont autorité sur elles se font appeler bienfaiteurs.  Il n’en est pas de même pour vous.  Mais que le plus grand parmi vous soit comme le plus jeune, et celui qui gouverne comme celui qui sert.  Car qui est le plus grand, celui qui est à table ou celui qui sert ?  N’est-ce pas celui qui est à table ?  Et moi, cependant, je suis au milieu de vous comme celui qui sert. »  L’enseignement de Jésus ici est que le  pouvoir  ne doit pas se manifester comme volonté de domination, d’exploitation ou comme affirmation de supériorité, mais avant tout comme un service.  Et le Fils de Dieu devenu homme en a donné l’exemple le plus parfait.

 

Trouve-t-on dans le Nouveau Testament un quelconque appel à la violence physique ou morale pour forcer les non-chrétiens à se convertir ?  Non, on ne trouve nulle part de telles injonctions.  Aucun appel à tuer les soi-disant « infidèles », aucun « jihad », aucun recours à la force pour forcer des conversions.  C’est en fait pacifiquement, et bien davantage par le sang des martyrs chrétiens, que l’empire romain a été graduellement conquis par le Christianisme.  Certes, une fois au pouvoir, avec les tentations que celui-ci amène immanquablement, des chrétiens ont souvent été infidèles à cet esprit. Qu’on pense par exemple à l’empereur Charlemagne en Europe au neuvième siècle de notre ère. Mais je voudrais encore une fois souligner qu’il est nécessaire de retourner aux sources, c’est-à-dire à l’Évangile, pour juger du degré de fidélité ou d’infidélité des Chrétiens à leur Seigneur.  Car si l’on se tourne régulièrement et avec humilité vers le Christ des Évangiles, et vers sa Parole, ces derniers serviront toujours de correctif vis-à-vis des pratiques mauvaises d’hommes enclins par nature à haïr leur prochain.  Rappelons-nous aussi des paroles de Jésus-Christ dans l’Évangile selon Matthieu, au chapitre  7 :  « Quiconque me dit « Seigneur, Seigneur » nentrera pas forcément dans le royaume des cieux, mais celui-là seul qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux. »  De son côté, l’apôtre Paul, le grand missionnaire, écrit au chapitre dix de la lettre aux Romains que la prédication de l’Évangile demeure l’instrument par lequel Dieu travaille à la conversion des païens :  « Comment donc invoqueront-ils celui en qui ils nont pas cru ?  Et comment croiront-ils en celui dont ils nont pas entendu parler ?  Et comment entendront-ils parler de lui, sans prédicateurs ?  Et comment y aura-t-il des prédicateurs, sils ne sont pas envoyés ?  selon quil est écrit :  quils sont beaux les pieds de ceux qui annoncent de bonnes nouvelles ».  Les lettres de Paul sont remplies de vocabulaire militaire, mais il s’agit toujours d’images, d’analogies, de métaphores :  les armes du chrétien sont des armes spirituelles.  Par exemple, à la fin de sa lettre aux Chrétiens d’Éphèse, Paul enjoint ses lecteurs  à se revêtir de toutes les armes de Dieu afin de pouvoir tenir ferme contre les manoeuvres du diable : entre autres la cuirasse de la justice, le bouclier de la foi, le casque du salut et l’épée de l’Esprit.  C’est par la puissance du message de l’Evangile, et non pas par d’autres moyens, que Jésus-Christ a ordonné à ses disciples d’aller vers toutes les nations et de  les amener à se soumettre à sa royauté universelle.