82. LA COURSE VERS L’ETERNITE
Les rythmes souvent effrénés de notre vie moderne sont devenus une norme
dans nos sociétés occidentales qui adulent la poursuite d’objectifs souvent
mesurés en termes de quantité et non de qualité: plus de quantité doit être
obtenue en toujours moins de temps: courir toujours plus vite et obtenir
davantage, tel semble être l’idéal de nombre de nos contemporains. Il faut
constamment remporter la course contre la montre, comme dans les films à
suspense. Peut-être que notre société
pense annuler ainsi les effets du temps qui passe, éviter le vieillissement, et
se donner l’impression d’avoir atteint l’éternité par ses propres
moyens, par ses techniques de pointe. Ce
qui n’est qu’une vaine illusion. Ecoutez
ce que disait à ce propos un sage de Jérusalem, appelé l’Ecclésiaste, il y
a trois mille ans déjà. Cet homme
à la recherche de la sagesse énumère ses grandioses réalisations pour en
arriver à la conclusion suivante: J’ai
considéré l’ensemble de mes réalisations, et toute la peine que je m’étais
donnée pour les accomplir. Et je me
suis rendu compte que tout est dérisoire: autant courir après le vent.
Il n’y a aucun avantage à tout ce qu’on fait sous le soleil.
Courir comme un dératé dans la vie, à quoi cela sert-il en effet?
Au temps de la civilisation gréco-romaine, les individus les plus admirés
étaient sans doute les athlètes du stade, ceux qui couraient le plus vite ou
lançaient le disque le plus loin. Les meilleurs ne recevaient pas une médaille,
d’ailleurs, mais une couronne de laurier, qui signifiait la même chose: ils
avaient remporté la victoire. L’apôtre Paul, dans les lettres qu’il
adresse aux jeunes églises qui commencent à se multiplier au sein de
l’empire romain, emploie volontiers la métaphore de la course.
Cependant pour lui, le but à atteindre n’est pas une gloire passagère
ou l’adulation des foules, mais tout simplement l’éternité véritable,
celle d’une vie en communion parfaite avec le Seigneur Dieu, le créateur de
toutes choses. Par exemple, au chapitre trois de sa lettre aux chrétiens de la
ville de Philipe, en Macédoine, il écrit: Pour
moi, je n’estime pas avoir saisi le prix.
Mais je fais une seule chose: oubliant ce qui est derrière moi, et
tendant toute mon énergie vers ce qui est devant moi, je poursuis ma course
vers le but pour remporter le prix attaché à l’appel que Dieu nous a adressé
du haut du ciel dans l’union avec Jésus-Christ.
Aux chrétiens de la ville de Corinthe, en Grèce, il écrit aussi à
propos de l’appel que Dieu lui a adressé d’annoncr l’Evangile:
Ne savez-vous pas que, sur un
stade, tous les concurrents courent pour gagner et, cependant, un seul remporte
le prix? Courez comme lui, de manière
à gagner. Tous les athlètes
s’imposent une discipline sévère dans tous les domaines pour recevoir une
couronne, qui pourtant sera bien vite fanée, alors que nous, nous aspirons à
une couronne qui ne se flétrira jamais. C’est
pourquoi si je cours, ce n’est pas à l’aveuglette, et si je m’exerce à
la boxe, ce n’est pas en donnant des coups en l’air. Je traite durement mon
corps, je le maîtrise sévèrement, de peur qu’après avoir proclamé la
Bonne Nouvelle aux autres, je ne me trouve moi-même disqualifié.
Courir, oui, certes, mais
vers quel but? A sa manière, Paul répond à l’Ecclésiaste qui posait les
bonnes questions, tout en cherchant anxieusement une réponse satisfaisante:
toutes nos activités ne prennent de sens apaisant et ne nous donnent de véritable
jouissance que lorsqu’elles sont placées sous le signe d’une course vers
l’éternité, sur les traces de celui qui l’a obtenue pour nous par sa
course vers la Croix et la résurrection, Jésus-Christ.