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CHRISTIANISME ET LAICITE (4)
Dans la Bible on trouve énoncé un principe qui était valable à l’époque
de sa rédaction comme il l’est encore aujourd’hui : à savoir que la
sphère de l’Etat et celle de l’Eglise sont distinctes, et ont un mode
distinct de gouvernement et de fonctionnement.
Elles ne doivent être ni confondues, ni être mises sur le même plan.
Pourquoi est-ce un principe biblique, me demanderez-vous ?
Et bien dans l’Ancien Testament, les rois d’Israël et de Juda n’étaient
pas autorisés à offrir des sacrifices dans le Temple, ou à accomplir des
rites cérémoniels liés à l’office des prêtres.
Inversement, il n’appartenait pas aux prêtres de diriger les affaires
politiques du pays. A plusieurs
reprises on trouve dans l’Ancien Testament une application de ce principe de
distinction des deux sphères. L’exemple
négatif le plus frappant étant celui du roi Ozias, au chapitre 26 du second
livre des Chroniques. Fier de ses
succès économiques aussi bien que de sa réussite en politique intérieure et
extérieure, il s’est mis en tête d’aller lui-même offrir les sacrifices
dans le Temple de Jérusalem, malgré les avertissements des prêtres qui
tentaient de l’en empêcher. La
conséquence de cet acte impie fut qu’il devint soudainement frappé de lèpre,
ce qui le rendait impur aux yeux de la communauté nationale. Il se trouva de ce
fait rendu incapable de régner plus longtemps.
Notez que cette pratique d’agir à la fois comme rois et prêtres était
courante au Proche et au Moyen orient à l’époque. Le représentant de
l’Etat, celui qui détenait le pouvoir politique, se considérait tout
naturellement comme un médiateur entre les hommes et les dieux. Sa double
fonction en faisait le garant de l’Etat Providence d’alors. C’est aussi
sur cette base qu’il se faisait adorer ou vénérer comme un demi-dieu, appelé
à sa mort à rejoindre le panthéon des divinités païennes.
A cet égard, comme à tant d’autres, la religion d’Israël différait
totalement de celle des nations environnantes.
C’est d’ailleurs cette différenciation entre les deux sphères
d’autorité, spirituelle et temporelle, qui
a engendré la persécution des
premiers chrétiens sous l’empire romain.
Ils se soumettaient bien à l’autorité de l’Etat, (plusieurs
passages des lettres de l’apôtre Pierre ou de l’apôtre Paul enjoignent les
destinataires de ces lettres à le faire), mais ils refusaient de vénérer
l’empereur comme un dieu. Ils
proclamaient au contraire : « Jésus seul est Seigneur ».
Ce qui passait pour un appel à la sédition, même si c’était entièrement
faux. La seigneurie du Christ est
appelée à se manifester sur toutes les sphères de la vie, mais cela ne veut
jamais dire que l’Eglise doive s’emparer des prérogatives dévolues à
l’Etat. Le rôle de l’Eglise
vis-à-vis de l’Etat, sa vocation, est d’énoncer clairement les principes
bibliques qui expriment ce qu’est
la justice publique, la juste notion d’autorité et de responsabilité de
l’Etat vis-à-vis des citoyens. On
peut à cet égard parler de vocation prophétique de l’Eglise, dans la mesure
où l’Eglise exprime fidèlement ce que Dieu révèle dans sa Parole.
L’Etat fera alors bien de se mettre à l’écoute d’une telle
Parole, sans vouloir l’étouffer ou en minimiser la portée.