CONVERSION ET REPENTANCE (2)

 

Lors de notre précédent programme nous avons commencé a parler de la nécessaire conversion par laquelle doit passer tout homme ou femme sous peine d’être confronté à une crise imminente, à savoir le jugement final de Dieu sur ses créatures rebelles.  Un passage de l’Évangile selon Luc, au chapitre 13, nous guide dans notre méditation sur ce thème si essentiel pour notre vie.  Relisons ensemble ce passage: “En ce temps-là, quelques personnes vinrent lui raconter ce qui était arrivé à des Galiléens dont Pilate avait mêlé le sang avec celui de leurs sacrifices.  Il leur répondit: Pensez-vous que ces Galiléens aient été de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens parce qu’ils ont souffert de la sorte?  Non, vous-dis-je.  Mais si vous ne vous repentez pas, vous périrez tous de même.  Ou bien, ces dix-huit sur qui est tombée la tour de Siloé et qu’elle a tués, pensez-vous qu’ils aient été plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem?  Non, vous-dis-je.  Mais si vous ne vous repentez pas, vous périrez tous pareillement.

Il dit aussi cette parabole:  Un homme avait un figuier planté dans sa vigne.  Il vint y chercher du fruit, et n’en trouva pas.  Alors il dit au vigneron: voilà trois ans que je viens chercher du fruit à ce figuier, et je n’en trouve pas.  Coupe-le: pourquoi occupe-t-il la terre inutilement?  Le vigneron lui répondit:  Maître, laisse-le encore cette année; d’ici là je creuserai tout autour et j’y mettrai du fumier.  Peut-être à l’avenir produira-t-il du fruit; sinon, tu le couperas.”. 

 Comme nous l’avons vu la dernière fois, Jésus, dans ce passage, agit comme prophète : il avertit ses auditeurs, et nous avec, que la crise  est imminente.  Le figuier stérile est sur le point d’être arraché.  Mais il existe encore une chance d’éviter la crise :  « Convertissez-vous ! Portez de bons fruits ».  La parabole du figuier stérile  est un récit assez dramatique car elle nous parle bien de la patience de Dieu, qui est prêt à attendre ; mais remarquez bien que le propriétaire de la vigne a d’abord donné à son jardinier l’ordre d’arracher le figuier.  Ce n’est qu’à cause de la demande du jardinier que le propriétaire remet l’exécution de son projet à l’année suivante.  Si la situation n’a pas changé, si, malgré tous les soins du jardinier, l’arbre ne porte pas de bons fruits l’année d’après, le figuier sera arraché.  Voilà comment Jésus conclut la parabole: la crise est encore en perspective.  Il est du reste significatif qu’en grec, langue dans laquelle le Nouveau Testament a été écrit, le mot krisis signifie « jugement ».

Mais qu’est-ce que la conversion ?  Que veut dire Jésus ?  Le catéchisme de Heidelberg nous enseigne qu’une vraie conversion comporte deux parties :  la mortification du « vieil homme en nous », et la résurrection de l’ « homme nouveau ».  On pourrait illustrer ceci en utilisant de nouveau l’image du figuier.  Cette fois-ci, le figuier n’est plus arraché.  Pourtant il y a encore plusieurs branches mortes qui doivent être coupées, car elles empêchent la bonne croissance de l’arbre ; ces branches ne peuvent plus porter de bons fruits.  Mais ce n’est pas tout :  grâce aux soins du jardinier, qui l’arrose régulièrement, arrache les mauvaises herbes autour de lui et aussi l’entoure de fumier, le figuier reçoit une nouvelle vie, une sève nouvelle. Il est transformé de l’intérieur et commence finalement à porter de bons fruits.  Reconnaissez-vous ici les questions et réponses 89 et 90 du Catéchisme de Heidelberg que nous avons lues la dernière fois?  Relisons-les ensemble : Question 89: Qu’est-ce que la mortification du vieil homme?

C’est une repentance sincère de ce que nous avons suscité la colère de Dieu et c’est être affligé du fond du coeur à cause de ses péchés, les haïr et les fuir de plus en plus.

Question 90: Qu’est-ce que la résurrection de l’homme nouveau?

C’est se réjouir de tout coeur en Dieu par Jésus-Christ et mettre sa joie et son amour à vivre selon la volonté de Dieu, dans l’accomplissement de toutes oeuvres bonnes.

Si nous continuons toujours à employer l’image du figuier et du jardinier, nous pouvons aussi comprendre que sans le jardinier qui travaille dur, la condition du figuier ne s’améliorera pas d’elle-même.  C’est là que beaucoup de gens font une grosse erreur au sujet du mot « conversion » ; celle-ci est envisagée comme un acte humain qui trouve son origine en l’homme.  C’est moi le premier qui fait un pas en direction de Dieu, et je deviens alors totalement tourné vers ma propre expérience, qui m’enchante.  Une vraie conversion est toute autre.  Même s’il s’agit d’une conversion subite, après qu’on ait passé de longues années en vivant comme un païen, la conversion ne peut avoir lieu si Dieu n’a pas d’abord planté en vous une nouvelle vie, cette sève qui commence à donner de la vitalité à l’arbre.  Cette nouvelle vie ne provient pas du tout de vous :  la mort et la résurrection de Jésus-Christ qui ont eu lieu une fois, deviennent objectivement vie nouvelle pour vous.  Il vit en vous, et vous vivez de sa vie.  Sans le don total de sa personne sur la croix, il n’aurait jamais été question d’une vie nouvelle pour vous ou pour moi !  C’est lui seul qui rend ceci possible par l’office de prêtre qui est le sien, grâce à son offrande volontaire sur la croix.  Ensuite, Dieu applique cette oeuvre en vous par son Esprit, et cela se produit d’une manière très mystérieuse, parfois tout à fait silencieuse, que Dieu seul connaît.  Ce processus, c’est la nouvelle naissance, dont Jésus parle à Nicodème, un théologien docteur de la Loi, au troisième chapitre de l’Évangile selon Jean.  Jésus lui dit :  « En vérité en vérité, je te le dis, si un homme ne naît d`eau et d`Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu.  Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l`Esprit est esprit.  Ne t`étonne pas de ce que je t’aie dit : il faut que vous naissiez de nouveau. »  La conversion n’est que la conscience que nous avons de cette vie nouvelle que seul le Saint Esprit nous accorde.  Bien sûr cette conscience nous remplit de joie, même s’il s’agit d’une conversion quotidienne par laquelle nous revenons de tout notre coeur vers Dieu ; car nous sommes rendus chaque fois conscients du travail puissant de Dieu en nous.  C’est pourquoi le Catéchisme parle de la résurrection de l` « homme nouveau » en termes de « réjouissance en Dieu par Jésus-Christ » , de « joie ».  Bien sûr aussi, la conversion ne demeure pas simplement un sentiment, mais elle nous conduit à accomplir des oeuvres bonnes.  C’est d’ailleurs exactement ce que dit le Catéchisme lorsqu’il parle de mettre sa joie et son amour à vivre, selon la volonté de Dieu, dans l’accomplissement de toutes oeuvres bonnes. » Les oeuvres bonnes vont de pair avec la joie et l’amour, elles ne nous sont pas imposées, elles sont en fait devenues l’expression de notre reconnaissance.

La conversion comprend aussi la repentance.  la repentance est, à dire vrai, le premier fruit de la conversion.  C’est aussi une forme de conscience :  Conscience de ce que nous avons provoqué la colère de Dieu par nos péchés.  Nous réalisons combien grande est la crise imminente à laquelle nous avons échappé, combien grande aurait dû être la rétribution de nos fautes.  Plus encore, nous devenons conscients de ce que nos péchés ont gravement attenté à la sainteté de Dieu.  Si nous n’étions pas tout d’abord nés de l’Esprit de Dieu, nous n’aurions jamais pu en devenir conscients.  Car ce qui est né de la chair est chair,  et ne comprend rien de ce qui a trait à la sainteté de Dieu.  Ceci nous montre clairement que même le tout premier fruit de la conversion, à savoir la repentance, ne procède jamais de l’homme naturel, mais est réveillé en nous par l’Esprit de Dieu.  Et si vous n’éprouvez jamais de repentance telle que je viens de la décrire, alors il vous faut vous demander sur quelle route vous cheminez :  celle de la vie éternelle, ou celle de la mort éternelle…  Mais la repentance non plus n’est pas qu’un sentiment.  Elle nous fait haïr nos propres péchés (pas seulement les péchés des autres), puis elle nous fait nous écarter de nos péchés, elle nous fait fuir loin d’eux.

Nous poursuivrons ensemble la prochaine fois cette méditation en trois volets intitulée « conversion et repentance », à la lumière du Catéchisme de Heidelberg.  Jusqu’à présent, nous avons vu comment Jésus-Christ agit en tant que prophète en nous avertissant de la crise imminente qui nous attend, le jugement final de Dieu, si nous ne portons pas de bons fruits, si nous ne nous repentons pas.  Puis nous avons vu que Jésus-Christ, toujours lui, est le seul fondement de notre conversion, par l’oeuvre de prêtre qu’il a accompli une fois pour toutes sur la croix à Golgotha. C’est son sacrifice unique qui forme la base sur laquelle Dieu nous accorde une vie nouvelle, en appliquant l’oeuvre de son Fils à nos vies par son Esprit Saint.  La prochaine fois nous verrons comment Jésus-Christ doit régner sur nos vies, lui qui n’est pas seulement prophète et prêtre, mais également roi.