LE SABBAT DU SEIGNEUR (3)

« Foi et Vie Réformées » vous propose aujourd’hui de suivre le troisième et dernier volet d’une méditation sur le sens du sabbat dans la Bible. Nous avons tout d’abord vu que le sabbat est avant tout l’expression du repos que nous trouvons dans la Grâce de Dieu. Ce repos est lui-même le fruit d’une libération, d’une rédemption offerte par Dieu. Nous avons parlé du commandement qui nous est donné de nous reposer. Nous avons ensuite abordé le caractère éternel de ce repos tel que Dieu nous l’accorde. Puis nous avons examiné le parallèle qui existe entre le repos divin et le nôtre. Étant créés à l’image de Dieu, nous lui ressemblons sous certains aspects et le repos qu’il nous prescrit offre une analogie avec son propre repos, après la Création du monde. Voyons aujourd’hui ensemble quelle place centrale Jésus-Christ revêt dans le sabbat. Pour conclure, nous verrons comment Dieu nous exhorte à persévérer dans le repos qu’il nous accorde gratuitement.

Dans l’Ancien Testament, le Sabbat ne pouvait jamais être dissocié des sacrifices. Les sacrifices étaient les signes d’une mort expiatoire accomplissant la réconciliation avec Dieu. La lettre aux Hébreux place justement l’accent sur la mort expiatoire finale du dernier grand-prêtre, Jésus-Christ, qui de cette manière accomplit la réconciliation finale avec Dieu. Rappelez-vous des dernières paroles de Jésus sur la croix, d’après l’Évangile selon Jean : « Tout est accompli », c’est-à-dire, l’œuvre pour laquelle le Père m’a envoyé, est totalement achevée. Avec cet achèvement, une toute nouvelle dimension est ajoutée au sens du sabbat. Désormais, nous ne contemplons plus l’œuvre de Dieu seulement au travers de sa Création, mais aussi à travers sa re-création en Christ. Jésus-Christ a pris la place centrale dans le sabbat, car il a accompli la grande œuvre de rédemption qui nous offre le shalom -la paix véritable-, et par là le repos. Lui seulement peut dire : « Le Sabbat a été fait pour l’homme, et non l’homme pour le sabbat. C’est pourquoi le Fils de l’Homme est aussi maître du sabbat. » (Marc 2 :27-28). En effet Jésus apporte une dimension toute nouvelle à notre expérience et notre célébration du sabbat, car il apporte un élément d’accomplissement qui n’était pas présent dans l’Ancien Testament. C’est pourquoi l’auteur de la lettre aux Hébreux dit clairement que Josué, qui a fait entrer le peuple d’Israël dans la terre promise, ne leur a pas donné le repos final, sans même parler de tous les Israélites qui sont morts dans le désert à cause de leur manque de foi. Christ, lui seulement, accomplit cette œuvre. Et seuls ceux qui sont greffés en lui peuvent entrer dans le repos éternel. C’est précisément ce que dit le verset 14 du chapitre 3 : « En effet nous sommes associés au Christ, si toutefois nous conservons fermement , et jusqu’au bout, l’assurance que nous avons eue dès le début. »

Lors de la première émission que « Foi et Vie Réformées » a consacrée au sabbat, nous avons vu que se reposer dans la Grâce de Dieu demande de notre part un effort : il s’agit en fait d’un ordre qui nous est donné. En fin de compte, tel est le message central du texte de la lettre aux Hébreux que nous avons lu les fois précédentes, à savoir que nous ne devons pas nous relâcher, afin de pouvoir entrer dans le repos de Dieu. Relisons ensemble, pour bien nous le remémorer, ce passage du quatrième chapitre de la lettre aux Hébreux, dans le Nouveau Testament. L’auteur prend comme exemple les Israélites incrédules qui sont tombés dans le désert pour n’avoir pas cru aux promesses que Dieu leur avait faites. Il la compare avec la génération de Chrétiens auxquels il s’adresse, et qui ont reçu la promesse d’entrer dans un repos éternel bien supérieur encore à celui que les Israélites attendaient lorsqu’ils seraient entrés en terre promise : « Ainsi donc, pendant que la promesse d’entrer dans le repos de Dieu est toujours en vigueur, craignons que l’un d’entre vous ne se trouve coupable d’être resté en arrière. Car nous aussi, nous avons entendu la Bonne Nouvelle, tout comme eux. Mais le message qu’ils ont entendu ne leur a servi à rien, car ils ne se sont pas associés par leur foi à ceux qui l’ont reçu. » Puis, un peu plus loin, l’auteur ajoute ; « Empressons-nous donc d’entrer dans ce repos afin que personne ne tombe dans la désobéissance, à l’exemple des Israélites. »

Il nous faut bien noter, amis auditeurs, que si nous sommes effectivement appelés à persévérer dans ce repos que Dieu dans sa Grâce nous accorde, l’observance du Sabbat n’est pas une bonne œuvre qui nous ferait mériter le salut aux yeux de Dieu. Or c’est justement ce que pensaient les Juifs qui faisaient de l’observance ritualiste du sabbat la voie d’accès à Dieu, en lieu et place de la foi que Dieu leur demandait d’avoir en ses promesses. Si de même nous considérions notre effort et notre persévérance comme cette voie d’accès, nous ne ferions que nier l’œuvre de rédemption accomplie en Christ, et dont nous venons de parler. Nous ne chercherions alors plus notre repos exclusivement dans la Grâce divine. Une telle fausse bonne œuvre n’a rien de commun avec le repos de sabbat offert par Dieu. Nous nous adonnerions à une sorte de repos et de paix formalistes qui nous opprimeraient totalement. Pour les pharisiens du temps de Jésus, observer le sabbat signifiait absolument ne rien faire, pas même déplacer une chaise ou préparer un repas simple. Le respect scrupuleux du sabbat tels qu’ils l’envisageaient, en faisait une bonne œuvre qui les justifiait aux yeux de Dieu. Par leurs propres efforts il pensaient donc pouvoir avoir accès à Dieu. De telles prescriptions impliquaient aussi selon eux que guérir un malade durant un jour de sabbat constituait en fait une violation du quatrième commandement qui enjoint de respecter le sabbat. C’est la situation qui nous est décrite au douzième chapitre de l’Évangile selon Matthieu, et que je vous lis à présent, chers amis : « A cette époque, un jour de sabbat, Jésus traversait des champs de blé. Comme ses disciples avaient faim, ils se mirent à cueillir des épis pour en manger les grains. Quand les pharisiens virent cela, ils dirent à Jésus : Regarde tes disciples : ils font ce qui est interdit le jour du sabbat ! Il leur répondit : « N’avez-vous donc pas lu ce qu’a fait David lorsque lui et ses compagnons avaient faim ? Il est entré dans le sanctuaire de Dieu et il a mangé avec eux les pains exposés devant Dieu. Or ni lui ni ses hommes n’avaient le droit d’en manger, ils étaient réservés uniquement aux prêtres. Ou bien, n’avez-vous pas lu dans la Loi que, le jour du sabbat, les prêtres qui travaillent dans le Temple violent la loi sur le sabbat, sans pour cela se rendre coupables d’aucune faute ? Or, je vous le dis : il y a ici plus que le Temple. Ah ! si vous aviez compris le sens de cette parole : Je désire que vous soyez bons plutôt que vous m’offriez des sacrifices, vous n’auriez pas condamné ces innocents. Car le Fils de l’homme est maître du Sabbat. » En partant de là, Jésus se rendit dans l’une de leurs synagogues. Il y avait là un homme paralysé d’une main. Les pharisiens demandèrent à Jésus : A-t-on le droit de guérir quelqu’un le jour du sabbat ? Ils voulaient ainsi pouvoir l’accuser. Mais il leur répondit : Supposez que l’un de vous n’ait qu’une seule brebis et qu’un jour de sabbat, elle tombe dans un trou profond. Ne la tirera-t-il pas pour l’en sortir ? Eh bien, un homme a beaucoup plus de valeur qu’une brebis ! Il est donc permis de faire du bien le jour du sabbat. Alors il dit à l’homme : Étends la main ! Il la tendit, et elle redevint saine, comme l’autre. Les pharisiens sortirent de la synagogue et se concertèrent sur les moyens de faire mourir Jésus. »

Voilà bien, amis auditeurs, à quoi ressemble le respect formaliste du sabbat qui n’intéresse aucunement le Dieu de Grâce. Un tel respect du quatrième commandement n’est d’aucune valeur à ses yeux. Dans le vrai sabbat, il n’est question ni de ritualisme, ni de formalisme. Il n’est pas non plus question, comme nous l’avons déjà dit, d’une forme mondaine de distraction, laquelle ne s’intéresse pas au repos accordé par Dieu. Le texte de la lettre aux Hébreux qui nous parle d’effort, parle aussi de persévérance. Le but de l’auteur est d’inciter ses lecteurs à comprendre le vrai sens du sabbat offert en Jésus-Christ. En lui seul se trouve un sabbat éternel qui nous est promis : « Empressons-nous donc d’entrer dans ce repos, afin que personne ne tombe dans la désobéissance à l’exemple des Israélites ». Pour le dire autrement : si vous ne persévérez pas afin d’entrer dans ce repos, tel qu’il vous est promis, alors vous n’y aurez pas part… il s’agit d’une exhortation, mais aussi d’un avertissement.

En conclusion, disons amis auditeurs que le sabbat est la porte d’entrée et aussi l’image de notre demeure éternelle, qui est faite de repos et de paix. C’est pourquoi nous devons nous tenir au commandement qui nous est donné : persévérer dans les promesses que Dieu nous fait, ne pas relâcher notre foi, nous repentir de nos œuvres mauvaises et nous en écarter. Peut-être aucun autre texte dans toute la Bible n’exprime mieux l’attente intense d’un repos complet que le passage suivant tiré du huitième chapitre de la lettre que Paul écrivit aux Chrétiens de Rome. Terminons si vous le voulez bien, ce troisième et dernier volet de notre méditation sur le sabbat du Seigneur en citant ce passage : « J’estime qu’il n’y a pas de commune mesure entre les souffrances du temps présent et la gloire à venir qui sera révélée pour nous. Aussi la création attend-elle avec un ardent désir la révélation des fils de Dieu. Car la création a été soumise à la vanité, non de son gré, mais à cause de celui qui l’a soumise, avec une espérance : cette même création sera libérée de la servitude de la corruption, pour avoir part à la liberté glorieuse des enfants de Dieu. Or, nous savons que, jusqu’à ce jour, la création tout entière soupire et souffre les douleurs de l’enfantement. Bien plus : nous aussi, qui avons les prémices de l’Esprit, nous aussi nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l’adoption, la rédemption de notre corps. Car c’est en espérance que nous avons été sauvés. Or l’espérance qu’on voit n’est plus espérance : ce qu’on voit, peut-on l’espérer encore ? Mais si nous espérons ce que nous ne voyons pas, nous l’attendons avec persévérance. »