LA TENTATION DE JÉSUS CHRIST (2)

« Ne nous soumets pas à la tentation, mais délivre-nous du Malin. » C’est la dernière requête du Notre Père, la prière que Jésus a enseignée à ses disciples. Nous avons vu la dernière fois que Jésus lui-même, qui avait été soumis à la tentation par le Malin au début de son ministère public, était sorti vainqueur de cette épreuve. Il serait de nouveau tenté par le même adversaire au moment de sa crucifixion, lorsque Satan, par la bouche des chefs du peuple et d’autres témoins de cette scène, lui lancerait en ricanant le défi suivant : « Lui qui a sauvé les autres, qu’il se sauve donc lui-même, s’il est le Messie, l’Élu de Dieu ! » Mais le but de Jésus-Christ, selon la volonté de son Père, était justement de mourir sur cette croix afin que tous ceux qui croiraient en lui soient sauvés de l’enfer. Or l’enfer consiste à être totalement abandonné de Dieu, et c’est précisément ce que Jésus-Christ a ressenti au moment de sa crucifixion : il a été abandonné à la fois par les hommes et par Dieu son Père. Certes, la tentation était grande d’utiliser son pouvoir divin afin de se libérer des chaînes de la mort en cet instant de ténèbres. Pourtant, Jésus y résistera et mourra volontairement, activement, en sacrifice d’expiation, afin de réconcilier Dieu avec des hommes et des femmes autrement perdus et voués à la mort éternelle.

Mais un troisième champ de bataille subsiste : c’est celui sur lequel les croyants sont exposés à la tentation, jusqu’au retour de Jésus-Christ en vainqueur final de Satan et en juge de l’univers. Les croyants sont-ils exposés à la tentation sans aucune aide, sans aucun recours ? Pas du tout. Tous ceux qui, par la foi en Jésus-Christ, sont greffés en lui, sont mis au bénéfice de sa victoire, et peuvent donc résister à la tentation. Tous ensemble, sans distinction de race, de sexe, de classe sociale ou de niveau d’éducation, ils forment le corps de Jésus-Christ, son Église. C’est pourquoi il est utile de revenir sur le récit de la tentation de Jésus tel que nous l’avons lu dans l’Évangile selon Luc, au chapitre quatre, car il nous apporte quelques enseignements de taille pour notre propre combat contre l’adversaire. Mais relisons d’abord ce récit : : « Jésus, rempli de l’Esprit Saint, revint du Jourdain et le Saint Esprit le conduisit dans le désert où il fut tenté par le diable pendant quarante jours. Il ne mangea rien durant ces jours-là, et, quand ils furent passés, il eut faim. Alors le diable lui dit : « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne donc à cette pierre de se changer en pain. » Jésus lui répondit : Il est dit dans l’Écriture : L’homme ne vivra pas de pain seulement. Le diable l’entraîna sur une hauteur, lui montra en un instant tous les royaumes de la terre et lui dit: « Je te donnerai la domination universelle ainsi que les richesses et la gloire de ces royaumes. Car tout cela a été remis entre mes mains et je le donne à qui je veux. Si donc tu te prosternes devant moi, tout cela sera à toi. » Jésus lui répondit : « Il est écrit : Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et c’est à lui seul que tu rendras un culte. » Le diable le conduisit ensuite à Jérusalem, le plaça tout en haut du Temple et lui dit : « Si tu es le Fils de Dieu saute d’ici, lance-toi dans le vide, car il est écrit : Il donnera ordre à ses anges de veiller sur toi et encore: ils te porteront sur leurs mains pour que ton pied ne heurte aucune pierre. » Jésus répondit : « Il est aussi écrit : Tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu. » Lorsque le diable eut achevé de le soumettre à toutes sortes de tentations, il s’éloigna de lui jusqu’à une autre occasion. »

Quel est donc aujourd’hui, amis auditeurs, l’utilité pour nous de savoir comment Jésus a été tenté dans le désert ? Cette utilité est triple. D’abord nous voyons mieux comment Jésus a accompli la Loi de l’Ancien Testament, lorsque nous comparons son attitude avec celle d’Israël durant les quarante années passées dans le désert. Rappelez-vous des paroles du livre du Deutéronome, chapitre huit, que nous avons lues la dernière fois : « Vous vous appliquerez à obéir à tous les commandements que je vous donne aujourd’hui afin que vous viviez, que vous deveniez nombreux et que vous puissiez entrer dans le pays que l’Éternel a promis par serment à vos ancêtres et en prendre possession. ». C’est ce que fait Jésus : il obéit aux commandements de Dieu et accomplit sa volonté, comme nous l’avons vu. En partculier, il respecte le premier commandement qui dit : « Tu n’auras pas d’autre dieu que moi. » Toujours au livre du Deutéronome, au chapitre 6, versets 14 et 15, nous lisons : « Vous ne vous rallierez pas à d’autres dieux, ces dieux des peuples qui vous entoureront, car l’Éternel votre Dieu, qui est au milieu de vous, est un dieu qui ne tolère aucun rival : il se mettrait en colère contre vous et vous ferait disparaître de la surface de la terre. » Sur ce point, Jésus répond à Satan de la manière suivante, lorsque celui-ci cherche à lui faire enfreindre le premier commandement : « Il est écrit : Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et c’est à lui seul que tu rendras un culte. »

En second lieu, nous comprenons mieux quelle est la stratégie de Satan, et quelles armes il utilise pour nous faire chanceler. Enfin en troisième lieu il nous faut tout autant connaître la stratégie de Jésus-Christ dans son combat contre Satan. Car si nous devons le suivre en tant que nouvelles créatures greffées en lui, et nous aussi être victorieux de l’Adversaire , alors il nous faudra employer les mêmes armes. Reprenons donc une à une les trois tentations que subit Jésus dans le désert, mais en commençant par la dernière et en remontant jusqu’à la première.

Avec la troisième tentation, il est tout de suite clair que Satan sait lui aussi citer la Parole de Dieu, essayant ainsi de mettre l’autorité de Dieu de son côté. « Le diable le conduisit ensuite à Jérusalem, le plaça tout en haut du Temple et lui dit : « Si tu es le Fils de Dieu saute d’ici, lance-toi dans le vide, car il est écrit : Il donnera ordre à ses anges de veiller sur toi et encore: ils te porteront sur leurs mains pour que ton pied ne heurte aucune pierre. » Satan cite donc la parole de Dieu pour tenter Jésus. C’est du reste ce qu’il a fait au tout début de l’histoire humaine, lorsqu’il a dit à Eve : « Dieu a-t-il vraiment dit : vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin ? » Nous savons tous quels ont été les effets désastreux de cette citation faussée. Mais Jésus utilise la Parole de Dieu à la fois comme bouclier et comme épée. La fin de ce combat est que Satan le laissera jusqu’à ce qu’une autre occasion de le tenter se présente. Satan, le père du mensonge, essaie d’utiliser la Parole de Dieu avec autorité. Cependant comme il n’est pas rempli du Saint Esprit mais d’un esprit de fraude et de mensonge, il ne peut gagner cette lutte. Ceci nous montre que nous ne devons jamais cesser d’employer la Parole de Dieu à la fois comme bouclier et comme épée, car si nous le faisons en toute humilité et obéissance, alors, remplis du Saint Esprit nous gagnerons toujours la bataille. Le grand réformateur français du seizième siècle, Jean Calvin, a écrit sur ce passage le commentaire suivant, qui reste des plus actuels : « Gardons-nous de ressembler à certains qui ont le cerveau à l’envers, écrit-il. Voyant que le diable corrompt l’Écriture, ces gens la rejettent comme si elle était incertaine et pouvait être tournée dans tous les sens. Si on suit cette logique, alors il faudrait aussi s’abstenir totalement de nourriture pour éviter tout danger d’empoisonnement. Satan profane la Parole de Dieu et s’efforce de la tourner pour notre ruine ; mais puisque Dieu l’a destinée à notre salut, le décret de Dieu accomplira ses effets en nous ; simplement nous ne devons pas détruire l’usage salutaire de cette Parole par notre paresse et notre lâcheté. Je n’ai pas besoin d’insister. Regardons seulement ce que Christ nous montre par son exemple ; c’est celui que nous devons suivre comme une règle très sùre. Abandonne-t-il sa position en voyant que Satan détourne méchamment le sens de l’Écriture ? Accepte-t-il qu’on lui fasse lâcher, ou qu’on lui arrache l’Écriture, qu’il avait lui-même prise pour sa défense ? Non ! Mais au contraire il s’appuie encore sur l’Écriture, pour repousser vaillamment la méchante calomnie de Satan.. »

Amis auditeurs, lorsque Satan n’utilise pas la Parole de Dieu pour la détourner de son sens, il profère purement et simplement des mensonges, comme nous le voyons avec la seconde tentation : « Le diable l’entraîna sur une hauteur, lui montra en un instant tous les royaumes de la terre et lui dit: Je te donnerai la domination universelle ainsi que les richesses et la gloire de ces royaumes. Car tout cela a été remis entre mes mains et je le donne à qui je veux. Si donc tu te prosternes devant moi, tout cela sera à toi. » Est-il exact que toutes les richesses et la gloire des royaumes ont été remises entre les mains de Satan ? N’est-ce pas plutôt l’apparence des choses seulement ? Prenons un exemple, tiré du récit de la comparution de Jésus-Christ devant le procurateur romain Ponce-Pilate, durant le procès qui devait aboutir à sa crucifixion. Jésus se tient silencieux devant Pilate, et le procurateur, étonné, lui lance : « Ne me réponds-tu pas ? Ne sais tu pas que j’ai le pouvoir de te relâcher, et que j’ai le pouvoir de te crucifier ? » Jésus lui répond alors : « tu n’aurais sur moi aucun pouvoir s’il ne t’avait été donné d’en-haut. » Voyez-vous, chers amis, Satan fait croire à Pilate que celui-ci peut disposer à son gré de la personne de Jésus. Par là, il veut aussi nous faire croire que c’est lui qui détient le pouvoir, à travers son instrument, Ponce Pilate. Si Pilate se laisse convaincre qu’il en est ainsi, et qu’il peut à son gré relâcher ou faire crucifier Jésus, et si nous croyons aussi que Satan est vraiment en contrôle de la situation, car tout semble perdu, alors en effet Satan a créé l’illusion qu’il a gagné: Il a convaincu des hommes qu’ils détiennent le pouvoir sans que le Dieu souverain ait à y voir quoi que ce soit. Il les contrôle et les manipule à son gré par derrière. C’est d’ailleurs précisément ce qu’il a fait avec Adam et Eve à l’aube de l’humanité : il a suscité en eux une illusion de pouvoir et de majesté lorsqu’il leur a dit, par rapport à l’arbre de la connaissance du bien et du mal: « Vous ne mourrez pas du tout ! Mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et que vous serez comme des dieux qui connaissent le bien et le mal. » Mais la véritable question est la suivante : Satan croit-il lui aussi en ses propres mensonges ? Ne sait-il pas plutôt que ses jours sont comptés ? Quant à eux, les croyants peuvent se reposer sur les mots de leur Seigneur victorieux, lorsque celui-ci dit à ses disciples, après sa résurrection : « Tout pouvoir m’a été donné dans le ciel et sur la terre. » Sur la croix Jésus a remporté la victoire sur Satan et il exerce désormais son autorité universelle à la droite de Dieu le Père, depuis les cieux.

Chers amis, nous concluerons la prochaine fois cette série de méditations sur la tentation de Jesus-Christ et sur son actualité pour les croyants aujourd’hui, en examinant ensemble la signification de la première tentation.