LA TENTATION DE JÉSUS CHRIST (3).

Amis qui êtes à l’écoute, nous terminons aujourd’hui une série de trois méditations sur la tentation de Jésus-Christ et sur les enseignements que nous pouvons en tirer, nous qui nous trouvons sur un champ de bataille, exposés aux mêmes périls et ayant à faire face au même adversaire. Nous avons vu la fois précédente, avec la troisième tentation, que Satan sait comment citer, avec des intentions fausses, la Parole de Dieu pour se parer de l’autorité divine. Mais n’étant pas rempli d’Esprit-Saint, comme l’est Jésus-Christ, il ne saurait remporter la bataille contre le Messie de Dieu. Celui-ci, utilisant la Parole de son Père à la fois comme bouclier et comme épée contre Satan, la cite avec une véritable autorité. Satan peut aussi vouloir créer l’impression qu’il est le maître du monde, et s’attribuer des pouvoirs qu’il ne possède pas, comme c’est le cas avec la seconde tentation. Seule son aptitude au mensonge peut créer l’illusion d’un tel pouvoir. Ceux qui se laissent décevoir par le père du mensonge se mettent finalement sous sa coupe.

Mais Satan peut aussi utiliser les circonstances pour nous tenter, comme il l’a fait avec Jésus lors de la première tentation : faim, abandon, situations extrêmement difficiles : « Dieu ne s’occupe pas de moi, Dieu m’a oublié ; Dieu reste sourd à mes prières ; Dieu est indifférent à ma souffrance ». La réponse de Jésus au tentateur, qui devrait aussi être la nôtre, est une réponse qui provient de la foi : reposez-vous sur les promesses de Dieu, faites-lui confiance, ne faites pas des plans qui ne le prennent pas en considération, comme si vous pouviez accomplir quoi que ce soit par vos propres forces. Souvenez-vous : au moyen de l’épreuve, Dieu opère en vous une croissance spirituelle, même s’il s’agit d’une croissance pénible. Dieu vous met à l’épreuve, comme il l’a fait avec le peuple d’Israël dans le désert au temps de Moïse. C’est ce que nous avons lu lors de notre première méditation au livre du Deutéronome, chapitre 8 : « N’oublie jamais tout le chemin que l’Éternel ton Dieu t’a fait parcourir pendant ces quarante ans dans le désert afin de te faire connaître la pauvreté pour t’éprouver. Il a agi ainsi pour découvrir tes véritables dispositions intérieures et savoir si tu allais, ou non, obéir à ses commandements.. Oui, il t’a fait connaître la pauvreté et la faim, et il t’a nourri avec cette manne que tu ne connaissais pas et que tes ancêtres n’avaient pas connue. De cette manière il voulait t’apprendre que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais aussi de toute parole prononcée par l’Éternel. Le vêtement que tu portais ne s’est pas usé sur toi et tes pieds ne se sont pas enflés pendant ces quarante ans. Ainsi, en y réfléchissant, tu reconnaîtras que l’Éternel ton Dieu fait ton éducation comme un père éduque son enfant. Obéis donc à ses commandements, marche sur les chemins qu’il te prescrit et ainsi respecte-le. Car l’Éternel ton Dieu va te faire entrer dans un bon pays, un pays plein de cours d’eau, de sources et de nappes souterraines qui s’épandent dans la plaine et la montagne. C’est un pays où poussent le froment et l’orge, la vigne, les figuiers et les grenadiers, un pays d’oliviers, d’huile et de miel où tu ne mangeras pas parcimonieusement, un pays ou tu ne manqueras de rien, dont les roches contiennent du fer, et où tu pourras extraire du cuivre des montagnes. Ainsi tu jouiras de ces biens, tu mangeras à satiété, et tu béniras l’Éternel ton Dieu pour le bon pays qu’il t’aura donné. » Amis auditeurs, il en est ainsi : l’homme ne vit pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. Comme la citation du Deutéronome l’indique, cette Parole est plus que la Bible comme livre. Il s’agit en fait de la Providence toute puissante de Dieu, par laquelle il soutient le monde entier, sa Création. Ce qui est merveilleux, c’est de savoir que notre existence, comme celle du monde entier, est soutenue par Jésus-Christ lui-même, dont il est écrit au tout début de la lettre aux Hébreux, dans le Nouveau Testament : « Il soutient toutes choses par sa parole puissante et, après avoir accompli la purification des péchés, il siège dans les cieux à la droite du Dieu suprême. » La Bible nous enseigne donc que Jésus, qui en tant qu’homme a été tenté, connaît toutes les tentations que nous subissons, car lui aussi est passé par-là. Ce même Jésus-Christ est la Parole Éternelle de Dieu qui soutient toutes choses. Ne prendra-t-il pas soin de nous ? Ne transmettra-t-il pas nos prières à son Père dans les cieux ? Restera-t-il indifférent à nos souffrances, lui qui a souffert l’abandon total par Dieu sur la Croix afin que les croyants ne soient jamais abandonnés de Dieu ? Lorsque nous sommes mis à l’épreuve, considérons le but de Dieu à notre égard, et suivons l’exemple de Jésus-Christ : retournons à la Parole de Dieu. Ne permettons-pas que Satan utilise ce test pour nous séparer de l’amour de Dieu. Le mandat qui nous est confié est de persévérer dans l’obéissance aux commandements divins, afin de rendre gloire à son Nom. C’est par ce chemin étroit que Dieu nous conduit vers un pays nouveau où nous ne manquerons jamais de rien.

Je vous propose de continuer et conclure cette méditation sur la tentation de Jésus-Christ en citant quelques extraits du commentaire que Jean Calvin écrivait il y a quelque quatre cent cinquante ans sur cet épisode du ministère terrestre du Messie. Comme le français de Calvin est celui d’une autre époque, je l’adapte légèrement pour vous rendre ses paroles plus compréhensibles : «D’abord , écrit Calvin, il nous faut voir d’une manière générale pourquoi Dieu a voulu que son Fils soit tenté. Les évangélistes nous rapportent qu’il a été conduit par le Saint Esprit dans le désert ; ce qui ressort de cela, c’est qu’il est entré dans ce combat par la décision et la providence sùre de Dieu. Il n’y a pas de doute qu’en la personne de son Fils, Dieu a voulu nous montrer clairement, comme dans un miroir, que Satan est l’ennemi principal et enragé du salut des hommes. Car pourquoi vient-il attaquer Christ plus rudement, et déployer toutes ses forces contre lui de la manière dont le rapportent ici les Évangélistes, si ce n’est parce qu’il voit que Christ, par le commandement du Père, se prépare à travailler à la rédemption des hommes ?Satan a donc combattu contre notre salut en la personne de Christ, tout comme il fait tous les jours la guerre à ceux qui prêchent cette même rédemption dont Christ est l’auteur. Mais il nous faut noter en même temps que le Fils de Dieu s’est volontairement présenté pour soutenir les tentations dont il est parlé ici, et qu’il a combattu en face, et a lutté contre le diable afin de nous acquérir le triomphe par sa victoire. Donc, chaque fois que Satan nous attaque, souvenons-nous qu’il est impossible de faire face et repousser ses efforts si nous ne mettons pas ce bouclier en avant. Le fils de Dieu a souffert d’être tenté, afin que nous le trouvions toujours devant nous quand Satan nous menace par la tentation. Voilà pourquoi il n’est pas dit qu’il a été tenté quand il vivait de manière privée à la maison sans exercer un ministère public ; mais quand il a entrepris d’accomplir ce ministère de Sauveur, alors il est entré sur le champ de bataille au nom de toute son Église. Et puisque Christ a été tenté en la personne de tous les fidèles, sachons que les tentations qui nous adviennent n’arrivent pas par hasard, ou selon le désir de Satan, sans la permission de Dieu. Au contraire l’Esprit de Dieu préside à nos combats, et le but c’est que notre foi soit exercée par ce moyen. Il faut par conséquent avoir l’assurance certaine que Dieu, qui est le surintendant, le souverain conducteur du combat, ne nous oubliera pas, mais qu’il nous assistera dans les détresses, dont il voit que nous ne pourrons pas nous démêler par nous-mêmes (…) Plus on est exercé aux combats spirituels, plus Dieu permet aussi qu’on soit plus violemment attaqué. Apprenons donc à ne jamais nous lasser, jusqu’à ce qu’ayant achevé le cours de notre guerre, nous soyons parvenus au but.

A propos de la première tentation (les pierres changées en pain), Calvin écrit : « Ainsi donc, le sens des mots de Satan est le suivant : puisque tu vois que tu es abandonné par Dieu, tu es bien obligé de pourvoir à tes besoins. Cherche donc quelque aliment pour te nourrir, puisque Dieu ne t’en envoie pas. Pour déguiser sa méchanceté, Satan met en avant la puissance divine de Christ par laquelle les pierres seront changées en pain. Mais son seul but c’est que Christ, en s’éloignant de la Parole de Dieu, suive tout ce qu’une voie infidèle suggèrera. C’est donc bien à propos que Jésus répond que l’homme ne vit pas de pain seulement. C’est comme s’il disait : « tu veux m’inciter à chercher un moyen quelconque pour subvenir à mes besoins autrement que Dieu ne le permet, mais cela serait n’avoir pas confiance en Dieu, et je n’ai aucune raison de le faire tant qu’il me promet d’être mon nourricier. Toi, Satan, tu veux me faire croire que sa grâce est attachée au pain ; mais lui au contraire déclare que sa bénédiction seule est suffisante pour nous nourrir, quand même tous les aliments du monde feraient défaut. Nous comprenons maintenant de quelle sorte de tentation il s’agit : c’est la même par laquelle Satan nous attaque tous les jours. Car le Fils de Dieu n’a pas voulu entrer dans un combat étranger ou propre à lui, mais il a voulu soutenir les mêmes assauts que nous sentons en nous, afin qu’étant munis des mêmes armes qu’il a employées pour se défendre, nous ne doutions pas que nous avons la victoire en main (…) Christ donc met l’Écriture au-devant comme un bouclier pour se défendre. Car c’est la vraie façon de batailler, si nous voulons emporter la victoire. Et ceux qui quittent volontairement cette armure, et ne s’exercent pas assidùment en l’école de Dieu, méritent bien que Satan les étrangle d’heure en heure, puisqu’ils se présentent ainsi devant lui dénués de leurs armes. En fait, il n’y a pas d’autre raison pour laquelle Satan tyrannise si cruellement le monde. Dieu punit par ce moyen la nonchalance des hommes, et le mépris de sa Parole qui règne parmi eux (…) Et Calvin conclut ce passage de son commentaire par les paroles suivantes : Bien que nous vivions de pain, il ne faut pas attribuer notre vie aux qualités du pain en soi, mais à la grâce secrète que Dieu met dans le pain pour nous nourrir. Il en découle un autre point, à savoir que Dieu, qui se sert maintenant du pain pour nous nourrir, nous fera bien vivre par un autre moyen quand il lui plaira. Donc cette parole du Deutéronome est là pour condamner la stupidité de ceux qui pensent que leur vie consiste à se rassasier et à avoir des réserves matérielles. Elle sert aussi à corriger le manque de confiance et l’inquiétude désordonnée qui nous poussent à chercher des moyens qui ne sont pas permis. C’est à quoi tend la réponse de Christ : il faut que nous ayons une telle confiance en Dieu en ce qui concerne notre nourriture et les autres besoins courants de la vie, qu’aucun de nous ne doit tenter de passer les limites que Dieu a déterminées. Et si Christ ne s’est pas permis de transformer des pierres en pain, sans le commandement de Dieu, il nous sera encore moins permis de pourchasser la nourriture au moyen de la fraude, de vols, de la violence ou du meurtre. »