QU'EST-CE QUE L'IDOLATRIE? (2).

"Qu'est-ce que l'idolâtrie?" Tel est, chers amis, le titre de cette seconde émission consacrée à la question de l'idolâtrie depuis son origine jusqu'à nos jours, à la lumière de la Bible, Parole inspirée par Dieu. La dernière fois, nous avons justement pris comme fondement de notre méditation l'idée suivante: Pour pouvoir démasquer les idoles autour de nous et en nous-mêmes, il nous faut chercher le seul vai Dieu dans Sa Parole révélée. Nous avons aussi débuté notre réflexion avec la question et réponse quatre-vingt-quinze du Catéchisme de Heidelberg, qui définit l'idolâtrie de la façon suivante: "L'idolâtrie, c’est inventer ou avoir, à la place ou à côté du seul vrai Dieu qui s’est révélé dans sa Parole, quelque autre chose en quoi l’on met sa confiance." Nous nous sommes demandés quelle était l'origine de l'idolâtrie, et sommes remontés jusqu'au chapitre trois du livre de la Genèse, au tout début de la Bible. Là nous avons vu comment le premier homme et la première femme, en se laissant séduire par le serpent, s'étaient imaginés qu'ils pouvaient devenir comme Dieu, ou comme des dieux, ce qui laissait supposer l'existence parallèle de plusieurs dieux. Adam et Eve étaient devenus des idoles à leurs propres yeux. Depuis, les hommes ne cesseraient d'imaginer des dieux forgés à leur image de créatures déchues, en rupture d'obéissance avec le seul vrai Dieu. Mais, nous sommes-nous demandés à la fin de notre émission, s'il n'existe qu'un seul vrai Dieu, quelle est la réalité des idoles? Existent-elles vraiment? Oui et non, pourrions-nous dire. Et c'est là que le texte de l'apôtre Paul, au huitième chapitre de sa première lettre aux Chrétiens de Corinthe, nous éclaire. Nous avons lu ce passage la dernière fois, et j'en reprends une partie ici: "Nous savons qu’il n’existe pas d’idoles dans l’univers, et qu’il n’y a qu’un seul Dieu. Car quoiqu’il y ait ce qu’on appelle des dieux, soit dans le ciel soit sur la terre – et de fait il y a beaucoup de dieux et beaucoup de seigneurs - néanmoins en ce qui nous concerne, il n’y a qu’un seul Dieu : le Père, de qui toute chose vient, et pour qui nous vivons, et il n’y a qu’un seul Seigneur : Jésus-Christ, par qui tout existe et par qui nous sommes." Paul nous dit sans ambage qu'il n'y a qu'un seul Dieu et qu'il n'y a pas d'idoles, au sens ou ces divinités que les païens révèrent, n'ont pas d'existence propre. Mais d'un autre côté, il y a aussi de soi-disant dieux et seigneurs, et à dire la vérité, le monde en est plein. Puisque l'on parle d'idoles, il doit bien y avoir quelque chose qui répond à ce nom! Du temps de Paul, le bassin méditerranéen était rempli de temples consacrés à des divinités quelconques; nous avons vu que même les empereurs romains se faisaient vénérer comme des demi-dieux. Dans le passage de la lettre aux Corinthiens que nous avons lu la dernière fois, et que je viens de reprendre en partie, nous voyons que les Corinthiens avaient justement demandé à Paul son avis sur la question des viandes sacrifiées aux idoles: était-il permis d'en manger ou non? Il doit donc bien y avoir une réalité derrière ces idoles! En fait, cette réalité n'est rien d'autre que la conséquence de la Chute, de cet aveuglement dans lequel l'humanité toute entière est tombée avec Adam. Les idoles n'ont en elles-mêmes aucune réalité, mais le mensonge, la tromperie qui les a produites, est bien, quant à elle, une réalité. Les conséquences d'une telle tromperie sur la vie de beaucoup sont bel et bien, elles aussi, une réalité: quiconque invente, fabrique et se confie en une idole devient rapidement l'esclave de sa propre imagination pervertie. Car les idoles, chers amis, ne sont pas des seigneurs ou des divinités qui nous libèrent: la puissance séductrice de notre imagination devient immédiatement un oppresseur qui détruit petit à petit notre vie et celle de ceux qui vivent autour de nous: pensez par exemple à la pornographie, qui peut devenir une idole et faire de nous des esclaves. Il n'y a pas si longtemps, on apprenait qu'en France des pédophiles ayant régulièrement visionné du matériel pornographique avaient violé des enfants de moins d'un an. Et nous savons qu'il existe déjà en Amérique des centres de réhabilitation pour les personnes adonnées à la pornographie. Celle-ci n' a-t-elle donc pas toutes les caractéristiques d'un seigneur qui domine sur les pensées de ceux qui l'ont promue au rang de divinité, en se laissant asservir par elle?

Mais passons justement aux idoles modernes, celles qui n'ont pas la forme des divinités grecques ou romaines de l'Antiquité. A chaque génération de nouvelles idoles prennent forme dans le coeur humain. Faisons le tour de quelques unes d'entre elles. Certaines vous seront sans doute connues, amis auditeurs, mais peut-être d'autres vous auront échappé. Qui pourrait de toute manière dresser une liste complète de toutes les idoles qu'on adore de par le monde? Considérons tout d'abord quelques idoles qui peuvent nous sembler acceptables parce que nous leur accordons une place sur terre, et non dans le ciel.

La nourriture, oui, la nourriture que beaucoup envisagent simplement comme leur pain quotidien, et même pour laquelle ils prient régulièrement, peut devenir une idole. "Les aliments sont faits pour le ventre, et le ventre pour les aliments", disaient les Corinthiens. "Certes, leur répond Paul, mais un jour, Dieu détruira l'un comme l'autre." Pendant que beaucoup, dans le monde, meurent faute de pouvoir s'alimenter suffisamment, un grand nombre meurt de maladies liées à la consommation abusive de viandes et d'autres aliments. Les excès de table peuvent être qualifiés d'idolâtrie car ils expriment une foi en la nourriture comme source de vie et de plaisir en soi. Dieu n'est plus l'objet des remerciements pour les bienfaits matériels reçus, la table a pris sa place. A mesure que le glouton dévore, il se laisse lui-même dévorer par l'idole qui s'est emparée de son esprit et de ses sens. Au livre des Proverbes, dans l'Ancien Testament, on lit l'avertissement suivant: "Ne soit pas parmi ceux qui s'enivrent de vin, parmi ceux qui font des excès de viande; car l'ivrogne et celui qui fait des excès s'appauvrissent, et l'assoupissement fait porter des haillons."

Or, si les effets des excès de nourriture se font voir sur un visage et un corps, un autre type de soin du corps peut lui aussi laisser percer une forme d'idolâtrie: l'obsession de la beauté extérieure, de la perfection physique, la culture du muscle, finalement le culte du corps au service d'une image de soi-même, autant de manifestations qui témoignent d'une volonté de paraître immortel. Le rêve d'une jeunesse éternelle est inculqué aux esprits par le biais de nombreux magazines. J'en connais un qui s'appelle "Essentiel". Et de quoi pensez-vous qu' Essentiel" s'occupe, amis auditeurs? Essentiellement de maquillage, de poudres et de cosmétiques. Oui, pour beaucoup, les cosmétiques sont devenus l'essentiel… Il est juste de dire cependant que du temps de Paul, le culte du corps était bien connu, c'était presque une religion en soi. Les meilleurs athlètes, surtout ceux qui couraient le plus vite, étaient considérés comme des demi-dieux.

Parlons justement de la vitesse. N'est-elle pas devenue, de nos jours, une puissante idole? Tout doit aller toujours plus vite, le tempo des activités quotidiennes doit sans cesse accélérer. Des voitures sont fabriquées qui peuvent atteindre une telle vitesse que les fabricants les équipent d'un système automatique afin d'empêcher que les conducteurs n'atteignent cette vitesse maximale! Voilà bien la folie de l'idolâtrie. Une civilisation se considère développée si tout se déroule à la plus grande vitesse, et si l'on peut caser le plus grand nombre d'activités en un temps limité. Car, chers amis, la vitesse ne procure-t-elle pas des frissons agréables? Ne confère-t-elle pas un sens excitant de confiance en soi-même, de maîtrise du temps et de l'espace? Jusqu'à ce que cette civilisation dite développée se rende compte, à son grand dépit, qu'elle n'a fait que développer une vision en cul-de-sac. Aucune vitesse ne pourrait ouvrir ce cul-de-sac vers des horizons libérateurs. Rappelez-vous la mort de la princesse Diana, fracassée contre le pilier d'un tunnel souterrain de Paris à la vitesse déraisonnable de cent-quatre-vingt-seize kilomètres à l'heure. Rappelez-vous de la tristesse et du deuil porté par des millions d'hommes et de femmes de par le monde. Sur quoi tant de gens pleuraient-il exactement? Peut-être davantage sur leurs rêves fracassés de jeunesse éternelle; sur leur propre condition d'hommes et de femmes condamnés eux aussi à mourir, et ne bénéficiant que d'un sursis. Peut-être pleuraient-ils sur la fragilité de leurs idoles: beauté, jeunesse, vitesse. Peut-être faisaient-ils le deuil de l'idole qu'ils avaient faite de la princesse, qu'ils auraient bien voulu voir immortelle, si cela avait été possible…

Mais, amis auditeurs, notre tour des idoles modernes nous amène vers la tentation dangereuse de la puissance, de notre propre force ou puissance. Celle-ci ne veut rendre aucun compte au seul vrai Dieu. Elle méprise les commandements de Dieu. Tout est permis pour ce pouvoir et ces intérêts personnels ou collectifs, même l'anéantissement sanglant d'autres vies humaines. Cependant, ces formes d'idolâtrie du pouvoir peuvent être nourries et soutenues par d'autres idoles, plus subtiles, qui prétendent être repectables parce que, selon leurs adorateurs, elles reposent sur des principes: j'ai nommé les idéologies modernes qui donnent naissance à des systèmes politiques oppresseurs, et qui figurent parmi les idoles les plus dangereuses. Ces idéologies prétendent gouverner la société toute entière et la vie de chaque individu. Chacun ne peut vivre sa vie que dans les limites que l'idéologie lui prescrit: avec qui il peut avoir des contacts sociaux, où il peut aller, quel genre de métier il peut exercer. Avec une pleine confiance dans la validité de leur idéologie, ceux qui exercent le pouvoir à travers ce système de règles rigidement appliquées, décident pour les autres quelle est leur origine, quelle est le but de leur vie, quel doit être leur rôle dans la société. Personne n'a le droit de critiquer ou de mettre en doute ce système. Dans les idéologies, la connaissance du bien et du mal est déterminée par les hommes eux-mêmes, et non par la Parole de Dieu. L'utilisation officielle de la violence et sa justification sont possibles justement parce que les hommes ont placé toute leur confiance dans leur idéologie, qui est pour eux la vérité ultime. Tout est donc bon pour la défendre.

Mais arrêtons-nous ici aujourd'hui. Nous terminerons la prochaine fois cette série de trois méditations sur l'idolâtrie en accordant notre attention aux idoles qui peuvent être placées "à côté" de Dieu, comme le souligne le Catéchisme de Heidelberg. Puis nous terminerons en nous demandant qui est le seul vrai Dieu.