ISRAEL ET LES NATIONS

Amis auditeurs, l’actualité ramène presque chaque jour la question des relations entre l’État d’Israël et les pays arabes, entre le peuple juif et le peuple palestinien. Le conflit sanglant qui dévaste le Proche Orient et divise l’opinion publique internationale m’amène aujourd’hui à vous présenter un message intitulé: Israël et les nations. Le but de ce message n’est pas de proposer ne serait-ce qu’une amorce de solution à une question politico-historique des plus épineuses, mais plutôt de vous parler d’Israël à la lumière de l’Évangile. Si nous considérons ce qu’enseigne la Bible dans son ensemble sur le peuple d’Israël, quel point de vue devons-nous adopter aujourd’hui vis-à-vis de cette nation? Est-elle toujours une nation privilégiée par Dieu, une nation qui joue encore aujourd’hui un rôle très particulier dans l’histoire du salut des hommes? Le peuple juif est-il intégré de telle manière dans le plan de Dieu que quelle que soit son attitude par rapport à Jésus-Christ, il sera de toutes manières sauvé dans son ensemble? Certains chrétiens l’affirment avec beaucoup de certitude, attendant même la reconstruction du temple de Jérusalem comme un signe tangible de la fin des temps.

 

Je voudrais cependant vous montrer, à l’aide de la Bible, que tel n’est pas le cas. Le peuple d’Israël a bien été le peuple choisi par Dieu pour être le dépositaire de sa Parole, pour vivre dans l’Alliance avec lui, pour être une lumière qui servirait de guide aux autres nations du monde; c’est aussi de ce peuple qu’est venu le Messie attendu qui devait apporter la réconciliation du monde avec Dieu. Le peuple d’Israël a été le premier à entendre l’Évangile; ceux qui y ont cru les premiers étaient des Juifs contemporains de Jésus-Christ: les disciples Pierre, Jacques, Jean et les autres. Paul, l’auteur de la plus grande partie des lettres que contient le Nouveau Testament, était lui aussi un Juif, descendant de Juifs. Cependant, le message de Jésus-Christ s’adresse au monde tout entier, et non aux Juifs seulement. C’est la raison pour laquelle il a commandé à ses disciples d’aller l’annoncer à toutes les nations. A la fin de l’Évangile selon Matthieu, les dernières paroles de Jésus à ses disciples sont les suivantes: "J’ai reçu tout pouvoir dans le ciel et sur la terre: allez donc dans le monde entier, faites des disciples parmi tous les peuples, baptisez-les au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, et apprenez-leur à obéir à tout ce que je vous ai prescrit. Et voici: je suis moi-même avec vous chaque jour, jusqu’à la fin du monde." A partir de là, le peuple juif n’est plus le dépositaire particulier de la Révélation divine, mais quiconque croit en Jésus-Christ, le devient. Le célèbre passage de l’Évangile selon Jean que je vais vous lire témoigne de l’universalité de l’Évangile: "Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne périsse pas, mais qu’il ait la vie éternelle. Dieu en effet n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour juger le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui. Celui qui croit en lui n’est pas jugé; mais celui qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils de Dieu." Comme vous l’avez entendu, amis qui êtes à l’écoute, cet Évangile s’adresse à tous, quelle que soit leur nationalité, leur couleur de peau, leur statut social. Cet Évangile s’adresse aujourd’hui de la même manière au peuple juif, comme ce fut le cas il y a deux mille ans. Si un certain nombre de Juifs y ont cru, beaucoup n’y ont pas cru, et l’ont même carrément rejeté. Pour l’apôtre Paul, cela constituait une source de grande tristesse, et il en parle de manière très développée dans sa lettre aux Chrétiens de Rome, aux chapitres 9 à 11, dont je vais vous lire plusieurs extraits, en les commentant. Paul écrit notamment ceci a propos de ses contemporains: "C’est nous qui sommes les objets de sa grâce, nous qu’il a appelés non seulement d’entre les Juifs, mais aussi d’entre les non-Juifs". Et un peu plus loin, au début du chapitre 10: "Frères, je souhaite de tout coeur que les Israélites soient sauvés, et c’est ce que je demande instamment à Dieu dans mes prières. Car je leur rends ce témoignage: ils ont un zèle ardent pour Dieu, mais il leur manque le discernement. En méconnaissant la manière dont Dieu déclare les hommes justes et en cherchant à être déclarés justes par leurs propres moyens, ils ne se sont pas soumis à Dieu en acceptant le moyen par lequel il nous déclare justes". En encore plus loin, Paul écrit: "Ainsi il n’y a pas de différence entre Juifs et non-Juifs. Car tous ont le même Seigneur qui donne généreusement à tous ceux qui font appel à lui. En effet, il est écrit: Tous ceux qui feront appel au Seigneur seront sauvés." Les Chrétiens de Rome auxquels Paul s’adressaient pouvaient se demander si Dieu avait définitivement rejeté son peuple, lequel dans sa majorité avait rejeté Jésus-Christ comme le Messie promis. Ces Chrétiens, qui pour la plupart s’étaient convertis de leur religion païenne, pouvaient même s’enorgueillir de ce qu’ils avaient reçu la connaissance de Dieu révélée en Jésus-Christ, au dépens du peuple d’Israël. Paul leur rappelle alors que Dieu n’a pas rejeté son peuple, mais qu’un reste sera sauvé, lui aussi, avec tous les païens convertis à la foi en Jésus-Christ. Au début du chapitre 11, il écrit ceci: "Je demande donc: Dieu aurait-il rejeté son peuple? Assurément pas! En effet, ne suis-je pas moi-même Israélite, descendant d’Abraham, de la tribu de Benjamin? Non, Dieu n’a pas rejeté son peuple, qu’il s’est choisi d’avance. Rappelez-vous ce que dit l’Ecriture dans le passage rapportant l’histoire d’Elie dans lequel celui-ci se plaint à Dieu au sujet d’Israël: Seigneur, ils ont tué tes prophètes, ils ont demoli tes autels. Et moi je suis resté tout seul, et voilà qu’ils en veulent à ma vie. Eh bien! Quelle a été la réponse de Dieu? J’ai gardé en réserve pour moi sept mille hommes qui ne se sont pas prosternés devant le dieu Baal. Il en est de même dans le temps présent, poursuit Paul. Il subsiste un reste que Dieu a librement choisi dans sa grâce." Plus loin toujours au chapitre onzième de cette lettre de Paul aux Chrétiens de Rome, nous lisons ceci: "Ainsi en est-il d’Israël. Quelques branches ont été coupées. Et toi qui, par ton origine païenne, étais comme un rameau d’olivier sauvage, tu as été greffé à leur place, et voici que tu as part avec elles à la sève qui monte de la racine de l’olivier cultivé. Ne te mets pas, pour autant, à mépriser les branches coupées. Et si tu es tenté par un tel orgueil, souviens-toi que ce n’est pas toi qui porte la racine, c’est elle qui te porte! Peut-être vas-tu dire: si des branches ont été coupées, c’est pour que je puisse être greffé. Bien! Mais elles ont été coupées à cause de leur incrédulité; et toi, c’est à cause de ta foi que tu tiens. Ne sois donc pas orgueilleux! Sois plutôt sur tes gardes! Car si Dieu n’a pas épargné les branches naturelles, il ne t’épargnera pas non plus. Considère donc, à la fois, la bonté et la sévérité de Dieu: sévérité à l’égard de ceux qui sont tombés, bonté à ton égard aussi longtemps que tu t’attaches à cette bonté. Sinon, toi aussi tu seras retranché. En ce qui concerne les Israélites, s’ils ne demeurent pas dans leur incrédulité, ils seront regreffés. Car Dieu a le pouvoir de les greffer de nouveau. En effet, toi tu as été coupé de l’olivier sauvage auquel tu appartenais par ta nature, pour être greffé, contrairement à ta nature, sur l’olivier cultivé: à combien plus forte raison les branches qui proviennent de cet olivier seront-elles greffées sur lui!

 

Paul laisse bien entendre que Dieu opèrera un renversement de situation vis-vis du peuple d’Israël, et qu’il en sauvera un nombre qui constituera la plénitude d’Israël, tout comme il sauve des païens en grand nombre: ceux-ci constituent la plénitude de ses élus provenant des nations païennes. Mais dans un cas comme dans l’autre, seuls ceux qui croient ou croiront en Jésus-Christ seront sauvés. Dans les deux cas, bien des Juifs et bien des païens ne croient pas, et s’excluent donc eux-memes du salut apporté par Jésus-Christ. La plénitude, cela ne veut pas dire la totalite numérique des Juifs ou des païens, mais la totalité de ceux à qui Dieu fait la grâce de croire en son salut. Ainsi, Dieu ne rejette pas le peuple d’Israïl, car il a établi une Alliance avec Abraham, le père de ce peuple. Il en sauvera un reste, qu’il amènera a sa plénitude. Pour les Chrétiens, qu’il soient d’origine juive ou païenne, cela constitue une motivation et un appel à aller annoncer la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ aux Juifs qui ne l’ont pas encore acceptée, quelle que soit d’ailleurs la difficulté de ce faire, ou l’opposition qu’ils rencontreront sur leur chemin.

 

Si nous revenons a l’actualité contemporaine, amis auditeurs, il est impossible, au vu de ce que la Bible enseigne, de croire en la mission salvatrice spéciale d’Israël aujourd’hui, comme si l’histoire contemporaine de ce peuple constituait une étape supplémentaire dans le plan de salut de Dieu. Le rétablissement de l’Etat d’Israël en 1948, et son histoire depuis, sont bien sûr des événements historiques extrêmement importants pour l’histoire de ce peuple, qui a droit à une terre comme tous les autres, mais on ne peut leur accorder une valeur ou une signification religieuse particulières. Ceux qui le font (et ils sont nombreux dans le monde) faussent les données politiques du problème, et ne contribuent qu’à le compliquer, voire à l’aggraver. Le pays d’Israël lui-même n’est pas la "Terre Sainte" comme on l’entend souvent dire, car n’est saint, ou sanctifié, que ce qui vit dans une relation d’Alliance avec Dieu, relation marquée par la foi et l’obéissance. Quant à l’idée qu’il faut favoriser la reconstruction du Temple de Jérusalem, laquelle serait un signe tangible de l’approche de la fin du temps, il n’existe pas de notion plus éloignée de ce qu’a enseigné Jésus. En effet, Jésus-Christ a déclaré on ne peut plus clairement que son propre corps était le Temple de Dieu, et que si on le détruisait, il le rebâtirait en trois jours. Il annonçait par là sa mise a mort et sa résurrection trois jours plus tard. Il a aussi prophétisé la destruction finale du Temple de Jérusalem. Le Nouveau Testament enseigne que l’Eglise, c’est-à-dire la communauté des croyants dans le monde entier, constitue le corps spirituel de Jésus-Christ, dont il est la tête. C’est désormais ce corps des croyants, greffé en Jésus-Christ, qui est le Temple saint de Dieu: chaque membre en constitue une pierre vivante, s’édifiant sur la pierre de base, le fondement, c’est-à-dire Jésus-Christ lui-même.

 

Le voeu que forme "Foi et Vie Réformées", amis auditeurs, c’est que chacun de vous, Juif ou non Juif, blanc ou noir, riche ou pauvre, devienne une pierre vivante de cet édifice incorruptible que Dieu a destiné à la vie éternelle en communion avec lui.