VENGEANCE OU PARDON (2)

Amis auditeurs nous avons vu lors de notre précédent message comment Jésus-Christ transfigure l’enseignement de la Loi de l’Ancien Testament dans son oeuvre et sa personne en lui donnant sa pleine signification. Je souhaite aujourd’hui tirer quelques conclusions de cet enseignement, aussi bien au niveau individuel qu’au niveau de la société. Mais reprenons d’abord les paroles mêmes de Christ dans le Sermon sur la Montagne, paroles que nous lisons dans l’évangile selon Matthieu, au chapitre 5. Lisons ensemble les versets 17 à 20: “Ne vous imaginez pas que je sois venu pour abolir ce qui est écrit dans la Loi ou les prophètes, je ne suis pas venu pour abolir, mais pour accomplir. Oui vraiment, je vous l’assure: tant que le ciel et la terre resteront en place, ni la plus petite lettre de la Loi, ni même un point sur un i n’en sera supprimé jusqu’à ce que tout se réalise. Par conséquent, si quelqu’un n’obéit pas à un seul de ces commandements –même s’il s’agit du moindre d’entre eux- et s’il apprend aux autres à faire de même, il sera lui-même considéré comme “le moindre” dans le Royaume des cieux. Au contraire celui qui obéira à ces commandements et qui les enseignera aux autres, sera considéré comme grand dans le Royaume des cieux. Je vous le dis” si vous n’obéissez pas à la Loi mieux que les interprètes de la Loi et les pharisiens, vous n’entrerez pas dans le Royaume des cieux.”. Nous lisons encore, du verset 38 au verset 42: “Vous avez appris qu’il a été dit: “oeil pour oeil, dent pour dent”. Eh bien moi je vous dis: N’opposez pas de résistance à celui qui vous veut du mal; au contraire, si quelqu’un te gifle sur la joue droite, tends lui aussi l’autre. Si quelqu’un veut te faire un procès pour prendre ta tunique, laisse lui encore ton vêtement. Et si quelqu’un te réquisitionne pour porter un fardeau sur un kilomètre, porte-le sur deux kilomètres avec lui. Donne à celui qui te demande, ne tourne pas le dos à celui qui veut t’emprunter.”

Cette magnanimité, cet esprit de miséricorde que Jésus invite ceux qui l’écoutent à pratiquer, sont évidemment une meilleure obéissance à la Loi que celle dont faisaient preuve les interprètes de la Loi et les Pharisiens de son temps. Nous l’avons aussi vu la dernière fois, Jésus-Christ ne parle pas sans donner l’exemple de ce qu’il prêche. Sa passion et Sa mort sur la Croix sont l’accomplissement de la Loi jusqu’à son moindre détail, selon le plan de Dieu pour la rédemption de l’humanité.

Mais les paroles de Jésus, aussi belles et magnanimes qu’elles paraissent, sont-elles praticables dans la vie quotidienne? Et si le Fils incarné de Dieu les a pratiquées, peuvent-elles l’être par tous? Reprenons ensemble les exemples qu’il nous donne. Au verset 40, il dit: “si quelqu’un veut te traîner en justice, et prendre ta tunique, laisse-lui encore ton manteau.” Au temps de Jésus la tunique était le long vêtement porté à même le corps. Au-dessus, on portait le manteau, pour se protéger du froid. Le manteau avait pu être laissé en gage par son propriétaire pour une raison ou une autre, ce qui était légal. Quoiqu’il en soit, laisser et sa tunique et son manteau à son adversaire aurait signifié rester pratiquement nu! Jésus parle ici de manière exagérée, comme c’était souvent l’usage de son temps lorsqu’on voulait démontrer un point quelconque. De cette manière, le principe d’une attitude magnanime que Jésus demande à ses disciples, est fortement souligné. Un autre exemple de cette manière de parler, pour souligner un point donné, apparaît ailleurs dans le Sermon sur la Montagne (chapitre 5, à partir du verset 27): “Vous avez entendu qu’il a été dit: “Tu ne commetras pas d’adultère”. Eh bien moi je vous dis: si quelqu’un jette sur une femme un regard chargé de désir, il a déjà commis, dans son coeur, l’adultère avec elle. Par conséquent si ton oeil droit te fait tomber dans le péché, arrache-le et jette-le au loin, car il vaut mieux pour toi perdre un de tes organes que de voir ton corps entier précipité en enfer.” Le point que Jésus souligne est que si la tentation survient par la vue, il faut avoir le courage et la force de détourner son regard. Jésus n’appelle pas ses auditeurs à se crever physiquement un oeil, car si tel était le cas, avant la fin de la journée chacun d’entre nous serait non seulement borgne, mais carrément aveugle! Quand au verset 41, il est le plus souvent traduit par: “Si quelqu’un te force à faire un mille, fais en deux avec lui”. Cet exemple aussi doit être expliqué: au temps de Jésus, la Palestine était occupée par les Romains, et les soldats de l’empire romain pouvaient obliger n’importe quel passant à leur servir de guide, ou porter à leur place des charges diverses sur une distance qu’ils imposaient. En invitant ses auditeurs à faire un second mille avec celui ou ceux qui leur imposaient une telle charge, Jésus montre qu’on peut faire davantage que de simplement se soumettre à une loi ou à une obligation en vigueur: on peut gagner un adversaire en faisant preuve d’une attitude généreuse, magnanime, à laquelle celui-ci ne s’attendait pas du tout. Ce principe est encore plus explicitement énoncé au verset 43: “Vous avez entendu qu’il a été dit: tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi”. Nous avons vu la dernière fois que la Loi enjoignait d’aimer son prochain (Lévitique 19:18). Mais la Loi ne dit pas qu’il faille haïr son ennemi. Ceci était une addition amenée par les docteurs de la Loi de l’époque. Jésus corrige donc une interprétation abusive de la Loi qui était devenue si courante qu’elle passait pour le texte même de la Loi. Mais rappelons encore une fois que ce qu’il enseigne, il le pratiquera jusqu’au bout, littéralement. Au moment de sa crucifixion, Il intercèdera pour ses ennemis, en priant: “Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font”. Il leur laissera aussi bien sa tunique que son manteau, qu’ils se partageront au pied de la Croix. Il ne répondra ni aux coups ni aux injures. Il donnera plus encore que son enseignement ou que les miracles de guérison, tant recherchés par les foules au moment de son ministère; c’est sa vie même qu’Il donnera à Golgotha, en acceptant d’être tenu pour le coupable, alors qu’Il est totalement innocent de ce dont on l’accuse. Jésus aura donc pratiqué son propre enseignement jusqu’à donner volontairement sa vie en rançon pour notre vie. Au moment d’expirer, il aura ces paroles: “Tout est accompli”, paroles qui se réfèrent à l’accomplissement de la Loi dans sa totalité, selon ses propres paroles dans le Sermon sur la Montagne: “Ne vous imaginez-pas que je sois venu pour abolir ce qui est écrit dans la Loi ou les Prophètes; je ne suis pas venu pour abolir, mais pour accomplir.” Jésus a donc tracé la voie pour chacun de nous qui croyons en Son Nom, en nous donnant un exemple à suivre. Tout ceux qui, par la foi, sont greffés en Lui, le suivront sur cette voie. Sans magnanimité, sans pardon des offenses, sans attitude qui cherche à gagner l’ennemi autant qu’il est possible, il n’y a pas de vrai Christianisme. Mais ce qui doit être vrai pour chacun de nous individuellement, peut-il l’être dans la société? Un homme ou une femme d’affaire peut-il risquer de voir son entreprise couler financièrement parce que cet entrepreneur a, au cours d’un procès injuste qui lui est fait par une entreprise concurrente, préféré ne pas se défendre avec les moyens appropriés, pour témoigner de sa foi chrétienne? Rappelons encore une fois les paroles de Jésus: “Ne croyez pas que je sois venu pour abolir la Loi et les prophètes. Je ne suis pas venu pour abolir, mais pour accomplir”. Des lois qui reflètent les principes du droit tels que Dieu les donne dans Sa Parole sont nécessaires dans chaque société, dans chaque pays, et une justice équitable doit régner, supervisée par des magistrats droits et honnêtes, et non corrompus. Etre disciple de Jésus-Christ signifie aussi contribuer à de telles institutions, et non les mépriser ou refuser sa responsabilité à cet égard. En aucun cas les paroles de Jésus-Christ ne sauraient servir de prétexte à l’abandon des exigences du droit et de la justice, au profit d’une morale basée uniquement sur le bon-vouloir des uns et des autres. Car ce serait déformer son enseignement de manière aussi grave que le faisaient vis-à-vis de la Loi les Pharisiens et les docteurs de la Loi dont il parle. Ce serait en fait dire qu’Il est venu pour abolir toute forme de loi, et ce faisant contribuer à la multiplication d’injustices de toutes sortes. Le chrétien, tout comme le non-chrétien, devrait pouvoir s’appuyer sur des lois justes et faire appel aux gouvernants et aux législateurs pour défendre le droit. Mais attention à un esprit excessivement juridique qui guiderait toutes les attitudes et la conduite de la vie entière, comme si ce juridisme étroit développé par des hommes pécheurs pouvait servir de justification devant Dieu. Cet esprit juridique étroit règne de manière tyrannique dans bon nombre de sociétés modernes, occidentales notamment. Il cherche délibérément à évacuer la présence de Dieu, et se révèle incapable de maintenir cet équilibre entre magnanimité et équité que seul le Seigneur Jésus-Christ peut nous inculquer, par son enseignement aussi bien que par l’oeuvre accomplie pour nous ici-bas. Cet esprit qui a décidé de se passer de Dieu, et nie radicalement Sa présence, s’embourbe dans ses propres notions sur ce qu’est la justice. A l’équité que la justice devrait promouvoir et les pouvoirs publics garantir, il substitue souvent soit des formes de vengeance qu’il déclare légales, soit sa propre idée de la magnanimité, en exonérant les coupables d’une peine méritée. Les Chrétiens qui veulent travailler à la réforme en profondeur de la société dans laquelle Dieu les a placés, devraient se garder des écueils mentionnés, dans leur contribution à la vie politique et sociale de leur pays. Les chrétiens transformés par l’Esprit du Christ devraient faire entendre leur voix contre une justice partisane qui cherche soit la vengeance sous une apparence légale, soit à dédouaner les coupables d’actes criminels. De fait, ces deux abus peuvent arriver en même temps, lorsque deux poids et deux mesures sont utilisés par le même système judiciaire. Or la Loi de Dieu interdit expressément l’exercice d’une justice de ce genre. Par exemple, elle prescrit de ne pas avoir de considération de personne lors des jugements prononcés: le fait qu’une des parties soit pauvre ou riche ne doit pas intervenir comme un facteur qui influence l’arbitrage ou le jugement rendu. Quant aux Chrétiens qui ont été appelés à exercer une charge de magistrat, ils peuvent se trouver victimes de pressions organisées par des groupes aux intérêts sociaux ou ethniques particuliers. Etre disciple de Jésus-Christ dans de tels cas signifie d’abord ne pas céder à de telles pressions. Un magistrat chrétien confronté à une telle situation devrait aussi pouvoir compter sur l’intercession et le soutien éclairé d’autres Chrétiens, afin d’être soutenu dans sa résolution.

En conclusion, insistons sur le fait que dans la Bible, la Loi et l’Évangile ne s’opposent pas, mais plutôt que Jésus-Christ donne à la première son interprétation définitive en l’accomplissant parfaitement. Puisse chacun, guidé par l’Esprit du Christ, déterminer ce qui, au sein des circonstances qui sont les siennes, témoigne de la venue du Royaume de Dieu. Puisse chacun savoir faire preuve de magnanimité, et gagner même son ennemi à Jésus Christ, le seul qui puisse opérer une réconciliation durable entre humains déchirés par toutes sortes de conflits. Car Christ a opéré la réconciliation entre Dieu et les hommes et femmes qui se mettent au bénéfice de son sacrifice. Puisse chacun aussi témoigner de cette réconciliation en oeuvrant dans la foi et l’obéissance pour une justice équitable au sein de nos sociétés.