LES DIX COMMANDEMENTS (7)
Tout d’abord, nous
remarquons que le catéchisme commence par nous parler d’autre chose que de
meurtre: il mentionne les insultes, la haine, les offenses.
Cela entre-t-il vraiment dans le cadre du sixième commandement?
Dans le Sermon sur la Montagne (que nous trouvons au chapitre 5 et
suivants de l’Évangile selon Matthieu), Jésus enseigne aux foules: “Vous
avez entendu qu’il a été dit aux anciens: “Tu ne commettras pas de
meurtre”; celui qui commet un meurtre sera passible du jugement.
Mais moi je vous dis: Quiconque se met en colère contre son frère sera
passible du jugement”. Il
est clair que pour Jésus-Christ, colère et insultes contre son prochain sont,
devant Dieu, aussi graves qu’un
meurtre physique. Cela ne fait
qu’accentuer la gravité de la condition des hommes, lesquels sont
inexcusables face à la loi de Dieu. Lequel
d’entre nous peut en effet se targuer de ne s’être jamais mis en colère
contre son frère?
Le deuxième aspect à
noter, qui découle du précédent, concerne
notre attitude à chacun. Il
n’y a pas que les paroles ou les actes, qui puissent nuire à notre prochain,
mais notre comportement aussi, jusqu’à nos propres pensées.
Les toutes premières pages de la Bible confirment cela avec l’exemple
de Caïn, le premier meurtrier de l’histoire des hommes.
Au chapitre 4 du livre de la Genèse, nous lisons ceci: “L’Éternel
porta un regard favorable sur Abel et sur son offrande; mais il ne porta pas un
regard favorable sur Caïn ni sur son offrande.
Caïn fut très irrité, et son visage fut abattu.
L’Éternel dit à Caïn: Pourquoi es-tu irrité, et pourquoi ton visage
est-il abattu? Si tu agis bien tu
relèveras la tête, mais si tu n’agis pas bien, le péché est tapi à ta
porte; son désir se porte vers toi, mais toi, maîtrise-le!
Mais Caïn dit à son frère Abel: Allons aux champs.
Et
lorsqu’ils furent dans les champs, Caïn se jeta sur son frère Abel, et le
tua.” C’est d’abord en pensée que Caïn a tué son frère,
à cause d’une colère intérieure qu’il n’a pas maîtrisée, malgré
l’avertissement de Dieu, qui l’enjoignait pourtant à se contrôler.
C’est en pensée que la préméditation du meurtre a germé.
La pensée n’était pas innocente, même si Caïn n’était pas encore
passé à l’acte. Le Catéchisme
nous rappelle que la manière dont nous contrôlons nos pensées, surtout dans
les moments de crise dans nos rapports avec d’autres hommes ou femmes, est
soumise à la Loi de Dieu. Dieu
connaît tout ce qui se passe dans notre for intérieur et nous en demande des
comptes.
Le troisième aspect que le catéchisme soulève, a
trait à la vengeance. Chercher à
se venger personnellement (ou en tant que groupe) est par nature criminel, nous
dit Jésus. L’apôtre Paul
enjoint aussi les Chrétiens de Rome à ne pas chercher à se venger
eux-mêmes des torts qu’on pourrait leur faire, car il y a des pouvoirs
publics en place pour cela. Il leur
écrit: “Ne vous vengez pas vous-mêmes, bien-aimés, mais laissez agir la
colère, car il est écrit: ‘A moi la vengeance, c’est moi qui rétribuerai”
dit le Seigneur.” Et le catéchisme
souligne: “C’est aussi pourquoi le magistrat porte l’épée pour
s’opposer au meurtre.” La Bible n’enseigne pas que le crime doit
rester impuni, mais que c’est à un pouvoir civil institué par Dieu qu’il
revient de juger le crime. Si chacun
se fait justice soi-même, on aboutit très vite au chaos social et politique.
Chacun se persuade d’être dans son droit, et laisse ses émotions
l’emporter, jusqu’à commettre des crimes plus graves encore que ceux dont
il réclame réparation. Certes,
lorsque les pouvoirs publics ne fontionnent plus, ou sont nonchalants, ou encore
n’ont pas suffisamment de moyens pour assurer l’ordre et la justice, la
tentation de se faire justice soi-même devient très forte.
Il faut pourtant résister à cette tentation, et suivre l’exemple de Jésus-Christ
lui-même, condamné injustement par des hommes iniques, mais dont Pierre écrit,
dans sa première lettre: “Le
Christ a souffert pour vous, vous laissant un exemple, pour que vous suiviez ses
traces. Il n’a commis aucun péché,
ses lèvres n’ont jamais prononcé de mensonge.
Injurié, il ne ripostait pas par l’injure.
Quand on le faisait souffrir, il ne formulait aucune menace, mais
remettait sa cause entre les mains du juste Juge.”
Les croyants chrétiens, tout en refusant la vengeance personnelle, ont
un devoir de contribuer à l’établissement ou au renforcement
d’institutions qui assurent la justice publique.
Cet objectif (et bien d’autres raisons encore) justifie leur engagement
dans la politique de leur pays. L’État
et le gouvernement qui le dirige sont voulus par Dieu, et cela fait partie du
mandat confié à l’homme que de travailler à leur établissement, leur préservation
et leur réforme toutes les fois que c’est nécessaire, en vue de la justice
publique. Celle-ci doit refléter
les normes de la justice divine. Notez
aussi qu’en parlant du “magistrat qui porte l’épée” c’est-à-dire
toute arme ou moyen qui lui confère un pouvoir exécutif, et non une simple
autorité de nom, le catéchisme entérine le principe de la peine de mort,
suivant en cela l’apôtre Paul qui écrit aux Chrétiens de Rome, au chapitre
13: “Celui qui s’oppose à l’autorité résiste à l’ordre de Dieu,
et ceux qui résistent attireront une
condamnation sur eux-mêmes. Les
gouvernants ne sont pas à craindre quand on fait le bien, mais quand on fait le
mal. Veux-tu ne pas craindre
l’autorité? Fais le bien, et tu
auras son approbation, car elle est au service de Dieu pour ton bien.
Mais si tu fais le mal, sois dans la crainte: car ce n’est pas en vain
qu’elle porte l’épée, étant au service de Dieu pour montrer sa vengeance
et sa colère à celui qui pratique le mal.”
Ce passage définit aussi le devoir des autorités publiques vis-à-vis
des ressortissants d’un État, puisqu’il leur enjoint, indirectement mais
tout à fait clairement, de chercher à récompenser le bien.
Que de fois ne voyons-nous pas des gouvernants corrompus et criminels récompenser
ceux qui les servent en faisant le mal, et persécuter ceux qui font le bien.
Si le principe de la peine de mort est clairement énoncé dans la Bible,
aussi bien dans l’Ancien Testament que dans le Nouveau Testament, en revanche
son application est souvent elle-même criminelle quand elle est dévolue à des
régimes politiques sanguinaires ou malhonnêtes.
Ils ne recherchent pas la justice, mais leurs intérêts particuliers ou
de groupe. Quoiqu’il en soit,
notons que le sixième commandement doit être compris comme : “tu ne
commettras pas de meurtre”, et non comme: “Tu ne tueras pas”, en vertu de
cette possibilité d’exécuter de manière légale des criminels endurcis dûment
jugés et reconnus coupables.
Le catéchisme nous
présente un autre aspect lié
au sixième commandement, celui du suicide: “Je ne dois pas non plus me
nuire à moi-même ou m’exposer témérairement au danger”, nous dit-il.
Le suicide est un meurtre, le meurtre d’une
personne créée par Dieu. Nous
savons qu’il existe chez certaines victimes de dépressions nerveuses très
profondes, ou d’autres troubles psychiques avancés, des pulsions de mort
terribles, qui affectent la volonté et peuvent amener quelqu’un à se
supprimer lui-même. De cela, il
nous faut aussi tenir compte lorsque l’on juge un tel acte.
Cela dit, le suicide demeure un acte contraire à la volonté de Dieu, le
Créateur de toute vie. Beaucoup de
suicides sont des actes de désespoir qui témoignent de l’absence de foi dans
le Dieu rédempteur. Là où Dieu
est inconnu, là où le Salut en Jésus-Christ et les fruits qu’il nous
apporte sont ignorés, il ne peut y avoir aucune espérance, surtout dans les
circonstances de la vie les plus amères. Mais
là où la foi est vivante, l’espérance aussi est vivante.
Notre vie a un sens aux yeux de Dieu, même lorsque nous souffrons.
Cette souffrance n’est pas l’horizon ultime de notre existence, il
existe quelque chose de plus élevé, qui peut donner un sens à notre
souffrance et même nous apprendre à la dépasser.
Comme celle qu’a endurée Jésus-Christ, notre souffrance n’est que
temporelle, aussi aigue qu’elle puisse être.
En nous enjoignant à ne pas nous exposer témérairement
au danger, le Catéchisme nous rappelle que nous avons une responsabilité vis-à-vis
de notre Créateur dans la conduite de notre vie et par rapport aux risques que
nous prenons. Le don de la vie qui
est fait à chacun de nous implique une gestion de nos actes, car nous aurons
aussi des comptes à rendre de la manière dont nous nous serons
comportés vis-à-vis de notre vie physique.
On ne joue pas avec la vie humaine comme avec un ballon.
Pratiquer la roulette russe ou certains sports violents et destructeurs,
se droguer ou conduire sur la route en mettant sa propre vie comme celle des
autres en danger, est une attitude criminelle.
Toute activité choisie dont nous
savons qu’elle provoque à plus ou moins long terme la destruction de notre
corps, est une activité criminelle aux yeux de Dieu, même si elle n’est pas
punissable par les lois humaines.
Le catéchisme de Heidelberg, amis auditeurs, nous
enseigne d’autres choses en rapport avec le sixième commandement.
Je vous donne rendez-vous à notre prochaine émission pour étudier
ensemble cet enseignement conforme à celui de la Bible.