AU COMMENCEMENT (2)

Amis auditeurs, je poursuis aujourd’hui avec vous une méditation sur le début du livre de la Genèse, méditation intitulée “Au commencement”, car c’est avec le récit de la Création du monde que commence la Genèse, et avec elle toute la Bible.  “Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre” voilà les mots qui, tels un portique grandiose, ouvrent ce livre unique qu’est la Bible.

Nous avons lu ensemble la fois passée le premier chapitre de la Genèse.  On entend souvent dire: “Certes, il s’agit d’un bien beau récit, mais qui n’a que très peu à voir avec la réalité du commencement de l’univers et ce que nous en savons par nos investigations scientifiques”.  Que répondre à cela?  La fois passée, nous avons souligné qu’il ne convient pas de lire la Genèse comme s’il s’agissait d’un manuel scientifique destiné à répondre à toutes nos questions de cet ordre.  La Genèse déclare d’emblée que l’univers à un Créateur, qui est Dieu et qui lui n’a jamais été créé.  Il est éternel et tout-puissant, car par sa simple Parole, par son Verbe divin, il peut créer ce qui n’existait pas auparavant.  Une telle affirmation ne peut pas être le fruit d’une découverte scientifique; la recherche scientifique ne pourrait jamais prouver cette affirmation par une quelconque méthode, qu’elle soit expérimentale ou autre.  Elle ne peut ni la prouver, ni d’ailleurs prouver le contraire.  Le terrain de la science est autre, et doit être respecté dans ses propres limites.  Cela ne veut pas dire que la science ne soit pas soumise à Dieu, car comme toute autre activité humaine elle s’exerce dans des cadres qui lui préexistent, justement les cadres de la Création.  Ainsi, comme toute autre activité humaine, la recherche scientifique ne peut s’exercer que dans l’espace et dans le temps créés par Dieu.  Dans son expression elle doit respecter une forme de logique qui fait partie elle aussi de l’ordre créé.  Elle examine les causes et les conséquences des phénomènes naturels qui font partie de la Création.  Ce qui en revanche est en jeu, et ce qu’il faut clarifier, c’est de savoir si la recherche scientifique a le monopole de ce qu’on peut appeler une vraie connaissance, si  seule cette recherche peut prétendre avoir accès à une vérité incontestable, à l’exclusion de tout autre mode d’expression ou de communication.  C’est hélas ce que beaucoup s’évertuent de faire croire au public.  Or si tel était le cas,  aucune autre forme d’activité humaine n’aurait le droit de nous apprendre quoi que ce soit: les plus grands chefs-d’oeuvre de la littérature mondiale n’auraient rien à nous apprendre, les plus belles oeuvres d’art non plus, les grands penseur non plus; une mère ou un père ne pourrait transmettre aucun savoir fiable à ses enfants, il n’y aurait de place pour aucune forme  de sagesse pouvant être transmise et enseignée.  Ce que la Genèse nous enseigne, voyez-vous, c’est justement ce que nul être humain ne pourrait découvrir par ses propres moyens: comment Dieu a été à l’oeuvre au commencement, comment il a créé et formé toutes choses, avec un plan et un but bien particulier.  Lorsque ceci est cru et accepté, le chercheur scientifique, alors guidé par une foi éclairée, peut s’adonner à sa recherche en sachant que celle-ci ne le conduira pas vers l’absurde, mais plutôt vers une compréhension toujours plus avancée de la cohésion de l’univers, au sein même de sa plus grande complexité.  Car l’univers créé par Dieu porte la marque de son Créateur.  Quelle belle tâche que de découvrir toujours de nouvelles marques, de nouveaux signes de la marque divine imprimée dans la nature.  Oui, quelle tâche exaltante pour celui qui s’y adonne dans l’émerveillement et la conscience de ses limites: car le monde créé par le Dieu éternel et tout-puissant se laisse bien découvrir progressivement, mais il se dérobe aussi  à tout enfermement, comme si sa merveilleuse complexité reflétait toujours plus loin l’infinie sagesse de Dieu qu’aucun humain ne pourrait jamais enserrer dans son esprit limité…  Certes, nous progressons sur la voie de la connaissance de l’ordre qui anime le monde physique, mais nous découvrons toujours davantage que cet ordre nous échappe, nous courons après lui dans une poursuite à la fois éperdue et fascinée…

Cela signifie-t-il que Dieu lui-même se dérobe à nous, et qu’il ne veut pas être connu de nous?  Certes non, car autrement Dieu n’aurait pas chosi de se révéler comme le Créateur de toutes choses dans le livre de la Genèse, comme sur tant de pages de la Bible. 

Lorsqu’il a créé les humains, Dieu a imprimé de manière très spéciale son image en eux, afin qu’ils vivent dans une relation spéciale avec lui, une relation de communion.  En leur enjoignant de se soumettre le reste de la Création, il leur a aussi commandé de découvrir cette Création, les plantes, les animaux, les étoiles…  L’activité scientifique fait partie du mandat de l’homme sur terre, non pas pour l’éloigner du Créateur, comme c’est hélas si souvent le cas, mais au contraire pour l’en rapprocher.  On a souvent fait remarquer à juste titre le fait suivant: la Bible présente les éléments de la nature comme dénués de pouvoir spirituel en eux-mêmes; ils ne sont pas à craindre car ce ne sont pas des esprits ou des divinités qu’il faut constamment apaiser par des rites ou des sacrifices (ce que faisaient justement les anciennes religions du Proche et du Moyen Orient, et ce que font encore aujourd’hui bien des peuples païens).  De ce fait, la possibilité d’explorer la nature sans se heurter à toutes sortes de superstitions ou de tabous a été favorisée par la religion issue de la Bible.  Dans cette lignée, la Réforme protestante du seizième siècle a insisté sur le mandat culturel confié par Dieu à l’homme, afin qu’il découvre l’univers dans lequel son Créateur l’a placé pour le gérer.  L’activité scientifique s’en est trouvée favorisée, sans qu’un divorce entre l’homme et Dieu ne soit avancé, divorce qui est intervenu plus tard dans la pensée philosophique européenne.

Dans un style poétique vibrant, le psaume 104 chante les merveilles de la Création dans cette relation de communion avec Dieu.  Cet hymne de louange au Créateur mérite d’être entendu, c’est pourquoi je vous propose de terminer cette émission par la lecture de ce psaume:

Que tout mon être loue l’Eternel!  O Eternel, mon Dieu, que tu es grand!  Tu es revêtu de splendeur et de magnificence, tu as pour manteau la lumière, et tu déploies les cieux comme une tente, tu construis au-dessus des eaux du ciel tes hauts palais inaccessibles.  Des nuées, tu te fais un char, tu te déplaces sur les ailes du vent, tu fais des vents tes messagers, les éclairs sont tes serviteurs.  Tu as établi notre terre sur de solides fondements pour qu’elle reste inébranlable à tout jamais. Tu l’as couverte d’océans comme d’un vêtement, les eaux recouvraient les montagnes.  Lorsque tu les as menacées, les eaux se sont enfuies au loin et se sont élancées au bruit de ton tonnerre, franchissant des montagnes, dévalant vers des plaines jusqu’à l’endroit que tu leur avait assigné.  Tu as fixé une limite que les eaux ne franchiront plus, et elles ne reviendront plus pour submerger la terre.  C’est toi qui fais jaillir des sources dans les ravins, et les torrents s’écoulent entre les montagnes.  Là viennent s’abreuver les bêtes qui peuplent les champs et les bois, là viennent boire les onagres.  Les oiseaux nichent sur leurs rives, chantant à l’abri du feuillage.  Du haut de ses palais, Dieu verse la pluie sur les monts, la terre est remplie des bienfaits du fruit de ton ouvrage.  C’est toi qui fait pousser le foin pour le bétail, et qui fais propspérer les plantes pour les hommes afin qu’ils tirent de la terre le paion pour se nourrir.  Le vin réjouit le coeur de l’homme et fait resplendir son visage, le rendant brillant plus que l’huile.  Le pain restaure sa vigueur.  Les arbres, qui sont ton ouvrage, ô Eternel, sont pleins de sève.  Tels sont les cèdres du Liban que ta main a plantés.  C’est là que nichent les oiseaux et la cigogne a sa demeure là, sur les branches des cyprès.  Les bouquetins ont leur retraites aux sommets des monts élevés, et les rochers sont le refuge où les petits damans se cachent.  C’est toi qui as formé la lune pour marquer les dates des fêtes.  Le soleil sait quand il se couche.  Tu fais descendre les ténèbres, et c’est la nuit.  Alors les hôtes des forêts se mettent tous en mouvement: les lionceaux rugissent après leur proie, ils demandent à Dieu leur nourriture mais dès que paraît le soleil, ils se retirent pour se coucher dans leurs tanières.  Et l’homme sort pour son ouvrage, qu’il poursuivra jusqu’à la nuit.

Combien tes oeuvres sont nombreuses, ô Eternel, tu as tout fait avec sagesse, la terre est pleine de tout ce que tu as créé: voici la mer immense qui s’étend à perte de vue, peuplée d’animaux innombrables, des plus petits jusqu’aux plus grands, les bateaux la parcourent, ainsi que le monstre marin que tu as fait pour qu’il y joue.  Ils comptent sur toi, tous ces êtres, pour recevoir leur nourriture, chacun au moment opportun.  Tu la leur donnes: ils la prennent, ta main s’ouvre, et ils sont comblés.  Tu te détournes, ils sont épouvantés.  Tu leur ôte le souffle, les voilà qui expirent, redevenant poussière.  Si tu envoies ton souffle, ils sont créés, tu renouvelles l’aspect de la terre.  Gloire à jamais à l’Eternel!  Qu’il se réjouisse de ses oeuvres!  Son regard fait trembler la terre, il touche les montagnes et déjà, elles fument.  Je veux chanter pour l’Eternel ma vie durant, célébrer mon Dieu en musique tant que j’existerai.  Que mon poème lui soit agréable!  Moi, j’ai ma joie en l’Eternel.  Que les pécheurs soient ôtés de la terre!  Que les méchants n’existent plus!  Que tout mon être loue l’Eternel!  Oui, louez l’Eternel!