LES AUTORITES HUMAINES (2)

L’obéissance due aux autorités humaines fait l’objet de l’émission de Foi et Vie Réformées que vous écoutez, amis auditeurs.  La dernière fois nous avons parlé ensemble du rôle des autorités publiques, tel qu’il est défini par l’apôtre Paul au chapitre treize de sa lettre aux Chrétiens de Rome.  Cette autorité est au service de Dieu pour le bien des hommes, raison pour laquelle il faut  la respecter et lui être soumis.  Mais relisons d’abord ce passage avant de continuer notre réflexion: 

Que tout homme se soumette aux autorités supérieures, car il n’y a pas d’autorité qui ne vienne de Dieu, et celles qui existent ont été mises en place par Dieu.  C’est pourquoi celui qui s’oppose à l’autorité lutte contre une disposition établie par Dieu, et ceux qui sont engagés dans une telle lutte recevront le châtiment qu’ils se seront attiré.  Car ce sont les malfaiteurs, et non ceux qui pratiquent le bien, qui ont à redouter les magistrats.  Tu ne veux pas avoir peur de l’autorité?  Fais le bien, et l’autorité t’approuvera.  Car l’autorité est au service de Dieu pour ton bien.  Mais si tu fais le mal, redoute-là.  Car ce n’est pas pour rien qu’elle peut punir de mort.  Elle est, en effet, au service de Dieu pour manifester sa colère et punir celui qui fait le mal.  C’est pourquoi il est nécessaire de se soumettre à l’autorité, non seulement par peur de la punition, mais surtout par motif de conscience.  C’est pour les mêmes raisons que vous devez payer vos impôts.  Car ceux qui les perçoivent sont aussi au service de Dieu, dans l’exercice de leurs fonctions.  Rendez donc à chacun ce qui lui est dû: les impôts et les taxes à qui vous les devez, le respect et l’honneur à qui ils reviennent.”

 

Nous avons vu la dernière fois que Paul définit les devoirs réciproques des autorités instituées par Dieu et de ceux sur lesquelles elles s’exercent en tant qu’autorités.  Les autorités publiques sont au service de Dieu pour le bien des hommes, ce qui signifie qu’elles ont des comptes à rendre vis-à-vis de celui qui les a instituées à cette charge.  Bien sûr, dire qu’elles sont au service de Dieu ne signifie pas que les sujets, quant à eux, ne sont pas au service de Dieu.  Chacun est au service de Dieu dans la mesure de la vocation qu’il ou elle a reçue.  Mais ce qui est particulier aux autorités, c’est que ce service a des implications pour une communauté nationale toute entière, implications bonnes ou mauvaises, voire désastreuses, justement dans la mesure où les autorités acceptent ou refusent de se considérer au service de Dieu. Et dans la mesure où elles modèlent leurs politiques sur les normes générales concernant le bien qui sont révélées par Dieu dans sa Parole éternelle, parole valide pour tous les hommes, tous les temps et toutes les circonstances. 

 

Mais quelle est la nature de l’obéissance attendue des sujets?  Cela signifie-t-il qu’il faut accepter d’être réduit à l’état le plus servile, sans entreprendre quoi que ce soit pour changer une situation politique totalement  insatisfaisante?  Soulignons à nouveau, amis auditeurs,  que la relation entre gouvernants et gouvernés définie par Paul dans sa lettre aux Chrétiens de Rome implique des deux côtés la reconnaissance de la suprématie de Dieu et de sa Parole dans la vie de tous.  La relation entre gouvernants et gouvernés, souvent difficile, est appelée à croître harmonieusement dans la mesure de cette reconnaissance et soumission des deux côtés.  Cela dit, Paul ne dit nullement qu’il faut attendre que les autorités publiques aient totalement accepté leur mandat et leur responsabilité vis-à-vis de Dieu avant que les sujets se soumettent à ces autorités.  Cela est clair du fait même que Paul écrit sa lettre à des Chrétiens qui vivent sous le régime d’un état païen, l’empire romain, qui ira même jusqu’à déclarer que son chef,  l’empereur, est un dieu. Cet empire n’était certes pas destiné à  subsister éternellement (en fait il s’écroulerait quatre siècles plus tard); il était néanmoins l’expression passagère d’une institution voulue par Dieu pour que l’ordre et la justice soient manifestés au sein d’une communauté humaine.  Un jour viendrait d’ailleurs où, après avoir persécuté ses sujets chrétiens de la manière la plus violente, cet empire deviendrait lui-même chrétien en la personne de son empereur, vaincu par une force supérieure à toutes ses légions: à savoir l’Evangile de Jésus-Christ. Souvenons-nous que c’est sous le régime de l’empire romain païen et avec le consentement d’un de ses représentants officiels, Ponce Pilate, que Jésus-Christ a injustement été mis à mort après un procès inique, étant faussement accusé de sédition par ceux qui voulaient le faire crucifier.  Or jamais Jésus-Christ n’a prêché la rébellion à une autorité publique, mais il a affirmé sa royauté éternelle par-dessus toute autorité humaine:  au procurateur Pilate qui lui demandait s’il ne se rendait pas compte que ce Pilate pouvait le relâcher ou le mettre à mort, Jésus a répondu: Tu n’aurais sur moi aucun pouvoir s’il ne t’avait été donné d’en haut.  Et encore: Mon royaume n’est pas de ce monde.  Si mon royaume appartenait à ce monde, mes serviteurs se seraient battus pour que je ne tombe pas aux mains des chefs des Juifs. Non, réellement, mon royaume n’est pas d’ici. Quant à Paul, il serait décapité par l’autorité romaine, celle-là même à laquelle il enjoignait ses lecteurs à se soumettre.  Ces exemples nous montrent clairement que la voie de la révolution violente, même lorsque l’injustice est commise par les autorités publiques, n’est pas celle voulue par Dieu.  Là cependant où s’arrête l’obéissance due aux autorités, c’est lorsque celles-ci exigent d’être servies et adorées comme Dieu.  Une résistance passive est attendue des chrétiens, qui ne sauraient renier ouvertement le seul Dieu qu’ils confessent, le Dieu trinitaire Père, Fils et Saint Esprit, si ce n’est au prix de leur salut éternel.  Mais cela n’implique nullement un droit à la révolution et au renversement des autorités en place. 

 

Tout ce qui a été dit jusqu’à présent ne suppose pas une attitude de passivité et de non engagement dans la vie politique, bien au contraire.  Tout comme chaque personne est appelée à la conversion et à la réforme selon la Parole de Dieu qui demeure l’autorité suprême, l’Etat est appelé à se réformer selon les normes révélées par Dieu.  Les chrétiens sont appelés à contribuer à une telle réforme par leur engagement dans la vie publique à tous les niveaux.  Un tel engagement n’est pas là pour assurer des avantages personnels, mais pour promouvoir le bien public.  C’est, en vérité, une tâche exaltante, même si semée d’embûches à tous les niveaux.  La première responsabilité des chrétiens, c’est d’approfondir leur compréhension de la nature de l’Etat et de l’autorité publique.  Il faut comprendre à la fois à quoi elle ressemble dans les faits, et vers quoi elle est appelée à se réformer.  Il faut comprendre les mécanismes et les étapes nécessaires pour une telle réforme.  Une réflexion très sérieuse menée non seulement personnellement, mais aussi par la communauté chrétienne, doit être entreprise, tenant compte à la fois des situations particulières et des normes et principes généraux révélés.  Il ne sert à rien de s’engager tout feu tout flamme dans une action organisée quelconque, sans qu’auparavant une telle réflexion ait été menée au moins jusqu’à un certain point.  De telles actions entreprises sans préparation spirituelle adéquate, sans effort intellectuel pour cerner la nature des problèmes et questions auxquels on fait face, sont vouées à l’échec et n’aboutiront qu’à discréditer la cause même qu’on veut promouvoir.

 

Terminons cette émission  par la lecture d’un passage du premier livre des Rois dans l’Ancien Testament: le jeune roi Salomon, à peine parvenu sur le trône de son père David, s’adresse à Dieu en ces termes: “Tu as témoigné une grande bienveillance à ton serviteur David mon père, parce qu’il vivait fidèlement selon ta volonté, de façon juste et avec un coeur droit.  Tu lui as conservé cette grande bienveillance et tu lui as accordé un fils qui siège aujourd’hui sur son trône.  Maintenant, Éternel mon Dieu, c’est toi qui m’as fait régner, moi ton serviteur, à la place de mon père David, alors que je ne suis encore qu’un tout jeune homme et que je ne sais pas gouverner.  Voilà ton serviteur au milieu de ton peuple que tu as toi-même choisi, un peuple nombreux qui ne peut être dénombré ni compté, tant il est nombreux.  Veuille donc donner à ton serviteur l’intelligence nécessaire pour administrer la justice pour ton peuple, afin qu’il sache discerner entre le bien et le mal!  Sans cela, qui pourrait administrer la justice pour ton peuple qui est si nombreux?  Cette demande de Salomon plut au Seigneur.  Alors Dieu lui dit: Puisque c’est là ce que tu demandes, et que tu ne demandes pour toi ni longue vie, ni richesse, ni la mort de tes ennemis, mais l’intelligence nécessaire pour exercer la justice avec droiture, eh bien, je vais réaliser ton souhait.  Je te donnerai de la sagesse et de l’intelligence comme à personne dans le passé, ni dans l’avenir.  De plus, je t’accorde ce que tu n’as pas demandé: la richesse et la gloire, de sorte que pendant toute ta vie aucun roi ne t’égalera.”