LE PROCES DE JÉSUS-CHRIST (2)

Nous continuons aujourd’hui notre méditation sur le chapitre 23 de l’Évangile selon Luc, qui nous relate le procès de Jésus devant le roi Hérode et devant le gouverneur romain Pilate. Nous avons vu la dernière fois comment Jésus était resté silencieux devant Hérode, lequel cherchait à le voir accomplir un miracle par curiosité. Dépité de ne pas obtenir gain de cause, Hérode et ses gens s’étaient moqué de la royauté de Jésus en le revêtant d’un habit rouge, justement symbole de la royauté. Cette confession involontaire provenant d’un roi qui ne reconnaissait pas la source divine de son propre pouvoir, lui servirait de condamnation.

Mais voilà Jésus renvoyé devant Pilate. N’est-il pas ironique de voir qu’à travers ce renvoi, la personne de Jésus devient la cause d’une amitié entre Hérode et Pilate? Le Messie de Dieu, venu pour apporter la réconciliation entre Dieu et les hommes, devient la cause d’une amitié entre deux hommes qui étaient auparavant des ennemis… Pilate et Hérode, les deux gouvernants impliqués dans une lutte politique l’un contre l’autre en Palestine, deviennent amis, d’ennemis qu’ils étaient… Quel genre d’amis, me demanderez-vous. Amis pour livrer un innocent à la vindicte d’une foule hystérique qui veut répandre son sang. En cette heure de ténèbres, le Malin n’est-il pas plutôt la cause d’une telle amitié? Et enfin, n’est-il pas ironique de voir que Pilate tente à plusieurs reprises de sauver la vie de Jésus! Jésus reste silencieux et ne se défend pas, et Ponce Pilate, le procurateur romain, tente en vain de convaincre la foule que l’accusé n’a rien fait qui mérite la peine de mort. Pilate aurait-il de la sympathie pour Jésus? Serait-il peut-être un disciple secret de Jésus (comme l’était Nicodème, le membre du sanhédrin juif), et c’est la raison pour laquelle il essaie de le sauver? Ou bien Pilate est-il un homme de paix qui déteste toute effusion de sang inutile? Non, absolument pas. L’homme qui n’a pas hésité à faire tuer des Galiléens pendant qu’ils offraient des sacrifices, n’éprouve pas de scrupule à verser le sang. Non, tout simplement, Pilate fait son travail, il juge la cause selon les procédures habituelles, et ne trouve aucun motif pour faire condamner Jésus. Qui plus est, Pilate sait très bien que les principaux sacrificateurs ont fait livrer Jésus par motif de jalousie (c’est ce que nous lisons dans l’Évangile selon Marc). Mais Pilate ne prend pas au sérieux la royauté de Jésus, tout comme son nouvel ami Hérode. Quoi? Cet homme qui se tient devant moi est le roi des Juifs, le grave danger pour l’empire de Rome et la paix romaine? Mais où sont donc ses troupes? Qu’il soit donc le roi des Juifs, si cela lui plaît… Oui, où sont les troupes de Jésus en cette heure? Le dernier de ses soldats, son disciple Pierre, vient de le renier. Donc, cet homme n’est aucunement dangereux. Ce qui est en jeu, pour le procurateur Pilate, c’est la fameuse impartialité du système judiciaire romain, dont il est le garant. Et voilà que commence une lutte dramatique entre cet homme et la foule autour de cette impartialité. “Mais ils insistèrent à grands cris, en demandant qu’il soit crucifié. Et leurs cris l’emportèrent. Pilate rendit un arrêt conforme à leur demande. Il relâcha celui qui avait été jeté en prison pour une émeute et pour un meurtre, et qu’ils reclamaient; mais il livra Jésus à leur volonté.” Amis auditeurs, voilà à quoi ressemble le procès intenté par le monde contre le Messie de Dieu: fondamentalement injuste. Les mêmes autorités qui ont instruit ce procès forceront la croix de Jésus sur Simon de Cyrène. Relisons ensemble le verset 26 du chapitre 23 de l’Évangile selon Luc: “Comme ils emmenaient Jésus, ils prirent un certain Simon de Cyrène, qui revenait des champs, pour qu’il la porte derrière Jésus.” Oui, ces mêmes personnes le forcèrent à avoir part à la souffrance de Jésus, même si ce ne fut que pour un moment: il marcha ainsi sur les traces de Jésus.

Que signifie donc porter sa croix? Comment un vrai disciple le fait-il? Amis auditeurs, on pourrait penser que la mention de Simon de Cyrène n’est qu’un détail dans l’ensemble du récit de la crucifixion de Jésus, Mais ce serait oublier trop facilement les mots de Jésus au chapitre 14, verset 27 de l’Évangile de Luc: “Quiconque ne porte pas sa croix et ne me suit pas, ne peut être mon disciple.” Dans l’Évangile selon Jean au chapitre 15, verset 20, Jésus dit aussi à ses disciples: “S’ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront aussi.” Il est vrai que Simon de Cyrène n’eut pas le choix. De plus, il n’était pas un disciple de Jésus. A ce moment précis, il devient malgré lui une illustration vivante de ce que Jésus voulait dire, lorsqu’il expliqua ce que signifie être un de ses disciples. La croix de Christ devient sa croix. Il n’est pas impossible que le sens de cette souffrance partagée avec Jésus à ce moment précis de sa vie, lui soit devenu clair bien plus tard. On peut supposer, d’après les données du Nouveau Testament, que ses enfants et sa femme sont devenus des disciples plus tard. Mais ce qui est important pour chacun de nous aujourd’hui, est de comprendre le sens profond de cette notion, porter sa croix, dont Simon de Cyrène est devenu une vivante illustration. Peut-être pouvons-nous le faire en regardant de manière plus large ce que “porter sa croix” ne signifie pas.

Porter ma croix ne signifie pas souffrir par les conséquences que mes propres péchés ont sur ma vie. Dans la première lettre de Pierre (chapitre 2, versets 19 à 23) nous lisons: “Car c’est une grâce que de supporter des peines, par motif de conscience envers Dieu quand on souffre injustement. Quelle gloire en effet, y a-t-il à supporter de mauvais traitements pour avoir péché? Mais si, tout en faisant le bien, vous supportez la souffrance, c’est une grâce devant Dieu. C’est à cela en effet que vous avez été appelés, parce que Christ lui aussi a souffert pour vous et vous a laissé un exemple, afin que vous suiviez ses traces.” Oui, Pierre, le dernier soldat de Jésus, qui le renia pendant son procès, a appris dans l’intervalle ce que c’est que d’être un vrai disciple de Jésus en public. Et l’apôtre Paul aussi, au sujet duquel le Seigneur dit à Ananias (Actes 9:15-16): “Va car cet homme est pour moi un instrument de choix, afin de porter mon nom devant les nations et les rois, et devant les fils d’Israël; et je lui montrerai combien il faudra qu’il souffre pour mon nom.” Ce même Paul qui reçut un mandat de Jésus-Christ (et notons que Paul ne choisit pas ce mandat, mais l’accepta) écrivit aux Chrétiens de Colosse (1:24-25): “Je me réjouis maintenant dans mes souffrances pour vous et je supplée dans ma chair à ce qui manque aux afflictions du Christ pour son corps. C’est d’elle que je suis devenu serviteur. J’ai été chargé par Dieu de vous annoncer pleinement la parole de Dieu.” Oui, porter notre croix, amis auditeurs, ne signifie pas ressentir les dures conséquences de nos propres péchés dans notre vie; ne nous abusons pas là-dessus. Au contraire cette croix a quelque chose à voir avec le témoignage que nous rendons à l’Évangile. C’est ce que nous verrons ensemble lors de notre prochaine émission, en concluant ainsi notre méditation sur le récit du procès de Jésus et ce que signifie porter notre croix.