L’EGLISE SOUS LA CROIX (8)
Amis auditeurs, après avoir vu, dans une série d’émissions
précédentes, quel était l’état de l’Eglise sous la Croix en France aux
dix-septième et dix-huitième siècles, avec l’histoire des protestants persécutés
par l’autorité royale, je vous propose de faire un retour en arrière, et même
un bond historique considérable, pour nous retrouver au premier siècle de
notre ère, sous le règne de Néron, le sixième empereur romain.
A cette époque, l’apôtre Paul sillonne les routes et les voies
maritimes de l’empire romain. D’autres
disciples du Christ annoncent l’Evangile dans différentes provinces de
l’empire. Néron, lui, après des débuts prometteurs comme empereur, allait
bientôt donner la mesure de sa folie meurtrière et sanguinaire, n’épargnant
même pas ses amis les plus proches et sa propre famille.
D’après l’historien romain du début du second siècle Tacite, la
population de Rome l’avait rendu responsable du gigantesque incendie de Rome
qui, en l’an 64, fit rage pendant
une dizaine de jours. Le cirque de
Mais franchissons une centaine d’années.
Le plus ancien récit de la mort d’un martyr chrétien est un écrit
datant du second siècle, Le Martyre de Polycarpe.
Polycarpe, évêque de Smyrne en Asie Mineure, aujourd’hui
Quant à l’admirable Polycarpe, ces nouvelles ne le troublèrent pas d’abord. Il voulait rester en ville. Mais son entourage le pressait de s’éloigner en secret. Il partit donc et gagna une petite retraite, non loin de la ville. Il séjourna là avec quelques amis. Nuit et jour, il ne faisait que prier pour tous les hommes et pour les Eglises du monde: c’était sa coutume. Au cours d’une prière, il reçut une vision. Trois jours avant d’être arrêté, il vit son oreiller entièrement consumé par les flammes. Alors il se tourna vers ses compagnons et leur dit: “Je serai brûlé vif.” Cependant on le cherchait sans répit. Il dut changer d’asile. A peine avait-il quitté la première maison, les gardes y arrivèrent. Ne le trouvant pas, ils mirent la main sur deux jeunes esclaves, et en firent avouer un sous la torture. Il ne pouvait donc plus leur échapper, puisque ses familiers venaient de le livrer. Le chef de la police qui portait le même nom qu’Hérode, était pressé de le conduire au stade; ainsi Polycarpe allait-il accomplir sa destinée en s’unissant au Christ, tandis que ceux qui l’avaient livré endureraient le châtiment de Judas. Emmenant le jeune esclave – c’était un Vendredi vers l’heure du souper - gardes et cavaliers sortirent, armés comme à l’accoutumée, et reprirent leur chasse comme s’ils poursuivaient un brigand. Tard dans la soirée, ils firent irruption. Polycarpe était couché dans une petite chambre à l’étage. De là, il aurait pu encore gagner une autre retraite, mais il s’y opposa, disant simplement: “Que la volonté de Dieu soit faite.” Au bruit que faisaient les policiers, il s’entretint avec eux. Son âge et sa sérénité les jetèrent dans l’étonnement. Ils se demandaient pourquoi il fallait tant s’enrager à capturer ce grand vieillard. Lui, malgré l’heure, leur fit servir aussitôt à boire et à manger, autant qu’ils le désiraient. Il leur demanda seulement de lui laisser une heure pour prier à sa guise. Ils acceptèrent. Alors, debout, il entra en prière, si intensément rempli de la grâce de Dieu que deux heures durant il ne put cesser de parler. Ceux qui l’entendaient étaient bouleversés et beaucoup se repentaient d’être venus arrêter un vieillard aussi saint. Quand enfin il eut fini sa prière, où il avait évoqué tous ceux qu’il avait rencontrés en sa vie, petits et grands, illustres et obscurs, et toute l’Eglise universelle répandue dans le monde entier, l’heure de partir avait sonné. Ils le juchèrent sur un âne et le conduisirent à la ville. C’était le jour du grand sabbat. Le chef de la police Hérode et son père Nicétès vinrent à sa rencontre et le firent monter dans leur carrosse. Assis à côté de lui, ils essayaient de l’ébranler, en lui disant: “Quel mal y a-t-il à déclarer Seigneur César, à sacrifier et a faire les quelques gestes qui te sauveraient la vie?” Lui, d’abord, ne leur répondit pas, et comme ils le pressaient, il déclara: “Je ne ferai rien de ce que vous me demandez.” Alors, irrités par leur échec, ils se mirent à l’insulter et le poussèrent si brutalement hors de la voiture qu’en descendant il s’entailla la jambe. Mais, sans se retourner, et comme s’il ne sentait pas la douleur, il marcha d’un pas résolu vers le stade. De là fusaient de telles clameurs que nul ne pouvait se faire entendre.
Mais, amis auditeurs, je poursuivrai avec vous lors
de notre prochaine émission la lecture de ce récit du second siècle de notre
ère, “Le martyre de Polycarpe” et vous invite donc à rester à l’écoute
de Foi et Vie Réformées.