L’EVANGILE SELON JEAN (6)

 

Amis auditeurs, je reprends avec vous la fin du premier chapitre de l’évangile selon Jean, au moment de la rencontre entre Jésus et Nathanaël, que j’ai commencé à commenter pour vous lors de notre précédente émission: “Le lendemain, Jésus voulut se rendre en Galilée, et il trouva Philippe.  Jésus lui dit: Suis moi.  Philippe était de Bethsaïda, la ville d’André et de Pierre.  Philippe trouva Nathanaël et lui dit: Nous avons trouvé celui dont il est parlé dans la loi de Moïse et dans les prophètes, Jésus de Nazareth, fils de Joseph.  Nathanaël lui dit: peut-il venir de Nazareth quelque chose de bon?  Philippe lui dit: Viens et vois.  Jésus vit venir à lui Nathanaël et dit de lui: Voici vraiment un Israélite dans lequel il n’y a pas de fraude.  D’où me connais-tu? Lui demanda Nathanaël.  Avant même que Philippe t’appelle, lui répondit Jésus, lorsque tu étais sous le figuier, je t’ai vu.  Maître, s’écria Nathanaël, tu es le Fils de Dieu, tu es le Roi d’Israël!  Tu crois, lui dit Jésus, parce que je t’ai dit que je t’ai vu sous le figuier?  Tu verras de bien plus grandes choses encore.  Et il ajouta: En vérité en vérité je vous le dis, vous verrez le ciel ouvert et les anges de Dieu monter et descendre sur le Fils de l’homme.”

Nathanaël, nous l’avons vu la dernière fois, était fort sceptique sur ce Jésus de Nazareth présenté comme le Messie par son ami Philippe.  Mais il a tout de même fait l’effort de venir voir par lui-même.  La remarque positive de Jésus sur son caractère l’étonne; sa réponse (“d’où me connais-tu?”) confirme toutefois cette remarque, car même s’il est loué par Jésus, il n’accepte pas cette louange sans plus: comment quelqu’un qui ne le connaît pas peut-il s’exprimer, de manière positive ou négative, sur son caractère?  Mais Jésus se révèle maintenant à lui comme celui qui connaît les pensées les plus intimes de ceux qu’il approche.  Il est difficile de cerner exactement la portée des paroles de Jésus concernant le temps passé par Nathanaël sous le figuier.  Il est possible que, comme les Juifs pieux ou les rabbis le faisaient, Nathanaël ait accompli ses dévotions sous cet arbre, de manière privée et recueillie, connue de lui seulement.  Que Jésus l’ait néanmoins vu dans cette attitude lui prouvait qu’il avait n’avait pas affaire à un simple prophète,  mais au Fils de Dieu lui-même.  Cependant il l’appelle aussi le “Roi d’Israël”  pour confirmer la nature de sa messianité.  Le Messie devait venir pour régner.  Mais Nathanaël n’a pas encore pris conscience du fait que la royauté du Messie s’exercera sur l’univers tout entier, et non sur Israël seulement. Bientôt, il naîtrait au patriarche Abraham, l’ancêtre des Juifs selon la chair, toute une postérité venue des nations du monde entier, constituée de tous les croyants sur la vie desquels le Messie règne.  C’est en ce sens que Jésus peut dire à Nathanaël: “Tu crois, lui dit Jésus, parce que je t’ai dit que je t’ai vu sous le figuier?  Tu verras de bien plus grandes choses encore.”  Et ces choses ne seront pas révélées à Nathanaël seulement, mais publiquement, devant tous.  Les mots qu’ajoute Jésus à l’intention de ceux qui étaient présents lors de cette rencontre, ont valeur de confirmation: Le ciel ouvert avec les anges montant et descendant sur le Fils de l’Homme est une référence à un épisode du livre de la Genèse, chapitre 28.  Le patriarche Jacob, fils d’Isaac et petit fils d’Abraham, est en fuite devant son frère Esaü et s’arrête pour passer la nuit quelque part, prenant une pierre pour s’en faire un oreiller.  Il s’endort et fait un rêve dans lequel il voit une sorte d’escalier reposant sur terre mais dont le haut atteint le ciel: des anges de Dieu montent et descendent cet escalier.  En haut se tient l’Eternel lui-même, qui lui parle, lui promettant de lui donner, à lui et à sa descendance, la terre sur laquelle il repose.  En reprenant cette vision de Jacob, Jésus montre que l’accès des cieux a été ouvert par sa personne, en particulier lorsqu’il est lui-même monté aux cieux lors de son Ascension, après sa résurrection.  En Christ Dieu communique ouvertement avec les hommes.  On peut dire que, comme pour tout autre sujet abordé dans la Bible, nous avons ici l’accomplissment de cette vision qu’a eue en son temps Jacob.  Notez aussi, amis auditeurs, que là ou Nathanaël a confessé le Fils de Dieu au verset 49, Jésus parle de lui-même en temps que Fils de l’homme: les deux sont joints en une même personne.  Cette expression, “Fils de l’homme” apparaît treize fois dans l’évangile selon Jean.  Elle souligne l’origine et la destinée céleste de Jésus, et donc sa préexistence.  Elle est empruntée au livre du prophète Daniel, dans l’Ancien Testament, au chapitre sept. Je vous lis ici la vision concernant ce fils de l’homme: “Sur les nuées du ciel, je vis venir quelqu’un de semblable à un fils d’homme.  Il s’avança jusqu’au vieillard âgé de nombreux jours et on le fit approcher devant lui.  On lui donna la souveraineté, et la gloire et la royauté, et tous les peuples, toutes les nations, les hommes de toutes les langues lui apportèrent leurs hommages.  Sa souveraineté est éternelle, elle ne passera jamais, et quant à son royaume, il ne sera jamais détruit.” 

Amis auditeurs, nous sommes arrivés à la fin du premier chapitre de l’évangile de Jean.  Lisons à présent la première partie du second chapitre, qui rapporte le premier miracle accompli par Jésus: “Deux jours plus tard, on célébrait des noces à Cana en Galilée.  La mère de Jésus y assistait.  Jésus avait aussi été invité au mariage, avec ses disciples. Or voilà que le vin se mit à manquer.  La mère de Jésus lui fit remarquer: ‘Ils n’ont plus de vin.  Ecoute, lui répondit Jésus, est-ce toi ou moi que cette affaire concerne?  Mon heure n’est pas encore venue.’  Sa mère dit aux serviteurs: ‘Faites tout ce qu’il vous dira.’  Il y avait là six jarres de pierre que les Juifs utilisaient pour leurs ablutions rituelles.  Chacune d’elles pouvait contenir entre quatre-vingt et cent vingt litres.  Jésus dit aux serviteurs: ‘Remplissez d’eau ces jarres.’  Ils les remplirent jusqu’au bord.  “Maintenant, leur dit-il, prenez-en un peu et allez l’apporter à l’ordonnateur du repas.’ Ce qu’ils firent.  L’ordonnateur du repas goûta l’eau qui avait été changée en vin.  Il ne savait pas d’où venait ce vin, alors que les serviteurs le savaient, puisqu’ils avaient puisé l’eau.  Aussitôt il fit appeler le marié et lui dit: ‘En général, on sert d’abord le bon vin, et quand les gens sont ivres, on leur donne de l’ordinaire.  Mais toi, tu as réservé le bon jusqu’à maintenant!  C’est là le premier des signes miraculeux que fit Jésus.  Cela se passa à Cana en Galilée.  Il révéla ainsi sa gloire, et ses disciples crurent en lui.  Après cela, Jésus descendit à Capernaüm avec sa mère ses frères et ses disciples; mais il n’y restèrent que quelques jours.”

Notons tout d’abord à propos de ce texte, que Jésus-Christ, confessé comme Fils éternel de Dieu incarné à un moment donné de l’histoire humaine, donc venu vivre sur terre dans un corps et une apparence humaine en tous points semblables à la nôtre,   représente le point de contact parfait entre l’homme et Dieu, entre l’éternité divine et la temporalité humaine.  Comme nous l’avons vu, en une seule personne il est à la fois Fils de Dieu et Fils de l’homme Or, nous rapporte  le second chapitre de l’évangile selon Jean, ce Jésus-Christ ne dédaigne pas d’assister à des noces.  Il débute même son ministère, certains diraient “sa carrière”, en se rendant avec ses disciples dans une bourgade du nord de la Palestine, répondant au nom de Cana, village voisin de celui où il a lui-même grandi.  Il y a été invité et s’y rend volontiers.  Sa mère, celle par laquelle il descend d’un lignage humain, celui du roi d’Israël David, y est aussi présente.  Jésus n’y fait pas une simple apparition rapide pour témoigner de son intérêt poli à l’égard du couple de mariés.  Il y reste plusieurs jours, puisque, selon la coutume orientale, un mariage était une fête pouvant être célébrée pendant près d’une semaine.  La famille des mariés devait du reste pourvoir à l’organisation de la fête jusqu’au bout.  Cette gageûre s’accompagnait naturellement d’expédients faciles quand il s’agissait de suppléer au vin déjà consommé.  Comme le fait remarquer de manière étonnée l’ordonnateur du repas au jeune marié, lui-même sans aucun doute extrêmement surpris de ce qui vient de se passer: “En général, on sert d’abord le bon vin, et quand les gens sont ivres, on leur donne de l’ordinaire.  Mais toi, tu as réservé le bon jusqu’à maintenant!”  La signification de la transformation de l’eau en vin par le Fils de Dieu va cependant beaucoup plus loin que la simple fourniture d’une boisson de qualité pour tirer d’embarras les familles des mariés vers la fin de la fête.  Les six jarres de pierre pouvant contenir entre quatre-vingt et cent-vingt litres d’eau, étaient utilisées par les Juifs pour leurs ablutions rituelles, nous dit l’évangéliste.  Ces ablutions rituelles requises par la Loi de Moïse avaient pour but la purification nécessaire des croyants de l’Ancien Testament devant Yahweh, le Dieu pur et saint.  Elles devaient être répétées régulièrement, et en particulier lorsque tout membre de la communauté d’Israël était entré en contact avec un objet ou un animal considéré comme impur.  Jésus-Christ, par le pouvoir divin qui est le sien, met fin à la nécessité de se purifier rituellement devant Dieu avec de l’eau, et donne prophétiquement avec le vin le signe de son sang versé sur la Croix, qui lui accomplira parfaitement et une fois pour toutes la purification requise.  Au début de son ministère terrestre, Jésus-Christ accorde, au cours d’un banquet nuptial,  un signe prophétique du but final de son oeuvre sur terre, oeuvre accomplie sur la Croix où il sera crucifié.  Une ère nouvelle dans les relations entre Dieu et les hommes est inaugurée; comme nous l’avons vu tout à l’heure, l’accès à Dieu est désormais possible grâce au Fils de l’homme et c’est là, amis auditeurs, que s’inscrit la finalité de notre vie.