PERSEVERER DANS L’ESPERANCE (1)

 

Que vaut la vie sans espérance, amis auditeurs? Et quelles raisons avons-nous d’espérer?  Non pas espérer recevoir une petite augmentation de salaire en fin de mois, ou espérer qu’il fera beau ce week-end, mais espérer que les vicissitudes de la vie, la perspective de notre mort qui s’approche à pas lents mais sûrs, l’épuisement des ressources de la planète et que sais-je encore ne constituent pas l’horizon ultime de notre existence.  Soyons réalistes.  A vues purement humaines, cette existence présente à la fois de très nombreux aspects enthousiasmants, fascinants, merveilleux, mais ils sont tous marqués par la dégradation, par l’échéance inéluctable de la disparition, ils sont rongés par un mal qui semble incurable.  Sans parler de la laideur, de l’injustice ou de la souffrance qui heurtent notre sensibilité à chaque pas de la vie, que nous en soyons les spectateurs, les victimes voire la cause directe ou indirecte.  Oui, que vaut la vie sans espérance?  Pas grand chose, avouons-le.  Mais d’un autre côté, une espérance mal placée ou illusoire ne nous consolera pas non plus.  Travailler à améliorer nos conditions matérielles d’existence, à allonger la durée de notre vie de quelques années grâce à la prise de tel ou tel médicament, cela nous tient-il lieu d’espérance?  Car ne nous leurrons pas, allonger la durée de notre vie nous donne davantage de temps pour méditer sur notre mort prochaine, sur les maux et misères de la vie.  Et même si l’amélioration de nos conditions matérielles d’existence apporte un  soulagement à notre existence quotidienne, il y a quelque chose de profondément ancré en nous qui réclame davantage, ce qu’aucune condition matérielle ne peut nous offrir: une perspective libératrice sur notre vie qui débouche sur l’éternité, la paix, le repos et la joie.  Est-ce un leurre que de rechercher cette perspective?  Est-ce une chimère, une utopie tout-à-fait hors de notre portée?  Pour certains, ce ne peut être au mieux que le sujet ou le thème d’oeuvres d’art, qui embellissent notre vie en idéalisant, ou stylisant nos attentes et nos perceptions de la réalité; ces oeuvres d’art, que ce soit des poèmes, des romans, des peintures, des sculptures ou encore des compositions musicales,  apportent un élément de beauté formelle, elles témoignent d’une créativité qui fait apparaître la réalité sous un jour inattendu, nouveau, parfois étrange et insoupçonné.  Et certes les oeuvres d’art les plus réussies reflètent quelque chose de très profond qui résonne puissamment en notre for intérieur; elles nous parlent à leur manière de ce à quoi nous aspirons le plus ardemment. 

 

Cependant pour qu’il y ait une espérance qui soit autre chose qu’une chimère, il faut un objet, un but à cette espérance. Il faut quelque chose ou quelqu’un qu’on puisse s’approprier, vers quoi l’on tende; quelque chose ou quelqu’un à la fois extérieur à nous-même et capable de nous habiter et de nous transformer en profondeur.  Car si nous faisons de nous-mêmes, de nos ambitions et de nos plaisirs l’objet de notre espérance, alors  nous retomberons toujours dans notre propre misère, celle qui nous caractérise naturellement.  Tâcher de nous élever en prenant notre propre personne comme point de mire nous fera toujours retomber au plus bas par l’effet d’une loi de gravité incontournable.

 

Une espérance  solide et indéracinable ne peut être ancrée en personne d’autre qu’en Dieu, celui qui a créé chacun de nous, celui qui nous accorde la vie, l’être et le mouvement jour après jour. Voici ce qu’en dit le psaume soixante-et-onze, dans la Bible: “O Seigneur Eternel, en toi j’espère, car, depuis ma jeunesse, toi, tu es mon appui!  Oui, tu fus mon soutien dès ma naissance.  Depuis que je suis né, tu me protèges.  J’ai sans cesse motif de te louer.”  Mais l’espérance doit pouvoir être exprimée dans les moments de la plus grande affliction, lorsque justement rien ne semble ici-bas nous réconforter.  Un autre psalmiste, l’auteur du psaume quarante-deux, dont l’âme est abattue et qui se souvient des jours heureux qui ne sont plus, écrit, quant à lui: “Avec quelle émotion je me souviens du temps où, avec le cortège, je m’avançais en marchant à sa tête vers le temple de Dieu, au milieu de la joie et des cris de reconnaissance de tout un peuple en fête. Pourquoi donc, ô mon âme, es-tu si abattue et gémis-tu sur moi?  Mets ton espoir en Dieu!  Je le louerai encore car il est mon Sauveur.” Et il conclut par ces mots: “Mes membres sont meurtris, mes ennemis m’insultent, sans cesse, ils me demandent: “Ton Dieu, où est-il donc?  Pourquoi donc, ô mon âme, es-tu si abattue, et gémis-tu sur moi?  Mets ton espoir en Dieu!  Je le louerai encore, mon Sauveur et mon Dieu.

 

Il peut paraître surprenant d’exprimer son espérance au moment où rien ne semble la justifier.  Cela n’est possible que parce que l’objet de cette espérance transcende les conditions de notre vie; cet objet se trouve au-delà de nous-même sans être pour autant inaccessible.  Qui plus est, la Bible enseigne à plusieurs reprises que l’objet de l’espérance des croyants, Dieu, en est en même temps l’auteur!  C’est lui qui la fait naître et la soutient dans le coeur de ceux qui lui font confiance.  C’est lui qui définit l’objet de cette espérance en présentant à la vue des croyants son Fils bien-aimé, Jésus-Christ.   Contempler Jésus-Christ par la foi, l’embrasser de tout son coeur, l’attendre comme l’épouse attend l’époux qui lui a été promis, c’est cela le coeur de l’espérance chrétienne.  L’apôtre Paul encourage ses lecteurs à persévérer dans cette espérance lorsqu’il écrit aux chrétiens de la ville de Thessalonique (2:16-17): “Notre Seigneur Jésus-Christ lui-même, et Dieu, notre Père, nous ont témoigné tant d’amour, et, par grâce, nous ont donné une source éternelle de réconfort et une bonne espérance.  Qu’ils vous remplissent de courage et vous accordent la force de pratiquer toujours le bien, en actes et en paroles.”  La nature de l’espérance chrétienne est telle qu’elle ne se contente pas d’attendre le secours divin en toutes circonstances; assuré de ce secours, de la présence divine quotidienne auprès de soi, le croyant motivé par cette foi et cette espérance entre en action, il pratique le bien.  L’espérance contemple les actes de Dieu dans le passé, sa fidélité, sa grandeur et sa toute puissance; elle se repose sur lui pour le présent comme pour le futur et cela fait porter des fruits au croyant, cela motive ses actes, cela l’encourage au milieu des épreuves de toutes sortes.  Il ne se laisse pas entraîner sur des voies glissantes qui reflètent la chute du genre humain car il garde le regard fixé sur une réalité plus haute, incorruptible.  L’espérance ne peut donc être séparée ni de la foi ni de l’amour.  Car elle n’existe que fondée sur les promesses prononcées par Dieu au cours de l’histoire des hommes, et ces promesses ne peuvent être saisies que par la foi. Ce lien entre la foi et l’espérance est exprimé on ne peut mieux par l’auteur de la lettre aux Hébreux, dans le Nouveau Testament (11:1-2): “La foi, écrit-il, est une façon de posséder ce qu’on espère, c’est un moyen d’être sûr des réalités qu’on ne voit pas.  C’est parce qu’ils ont eu cette foi que les hommes des temps passés ont été approuvés par Dieu.”  Oui, sans la foi, l’espérance n’aura aucune solidité, car elle perdra de vue son objet, celui qu’elle attend comme l’épouse attend son époux; elle doutera qu’il vient vraiment vers elle, elle perdra cette vision du futur promis et tournera à nouveau ses regards vers des objets qui n’en valent pas la peine.

 

Savez-vous amis auditeurs comment se termine le livre de l’Apocalypse, le tout dernier livre de la Bible?  Il conclut avec ces paroles qui résument l’objet de l’espérance chrétienne, lequel n’est rien moins que le retour du Christ: “Le témoin qui affirme ces choses déclare: ‘Oui, je viens bientôt”!  Oh oui, qu’il en soit ainsi: Viens Seigneur Jésus!  Que le Seigneur Jésus accorde sa grâce à tous.