Au sixième chapitre de
l’évangile selon Jean, nous lisons comment Jésus a nourri une foule de plus
de 5000 personnes avec seulement cinq pains et deux poissons.
Un miracle non pas seulement destiné à alléger la faim d’une foule
qui était venue des alentours pour l’écouter enseigner, et qui ne pouvait
aller se procurer des vivres dans les villages voisins à cette heure avancée
de la journée; mais surtout un signe de la divinité de Jésus-Christ destiné
à faire comprendre à cette foule la nature de son ministère.
Signe incompris puisqu’on essaie immédiatement de le couronner roi de
force: avec un tel chef, les occupants romains ne pourront résister longtemps,
et Israël sera établi dans une position de prééminence sur le reste du
monde. Jésus ne veut pas de cette
royauté-là et il se retire seul dans la montagne, sans ses disciples.
L’évangéliste poursuit son récit: A la tombée de la nuit, ses
disciples redescendirent au bord du lac. Ils
montèrent dans un bateau et se dirigèrent vers Capernaüm, sur l’autre rive.
Il faisait déjà nuit et Jésus ne les avait pas encore rejoints.
Un vent violent se mit à souffler, et le lac était très agité.
Les disciples avaient déjà parcouru cinq ou six kilomètres, quand ils
virent Jésus marcher sur l’eau et s’approcher de leur bateau.
L’épouvante les saisit. Mais
Jésus leur dit: C’est moi, n’ayez pas peur!
Ils voulurent alors le faire monter dans le bateau, mais, au même
moment, ils touchèrent terre à l’endroit où ils voulaient aller.
Après la multiplication des pains, Jésus s’est donc retiré,
seul, dans la montagne voisine et il a envoyé ses disciples de l’autre côté
de la rive, vers la ville de Capernaüm, au nord ouest du lac.
Il fait nuit et le vent se lève. La
distance n’est pas si grande entre leur point de départ et leur destination,
mais en raison du vent contraire, au milieu de la nuit ils n’ont que peu
progressé. Ils sont encore au
milieu du lac et rament avec autant d’énergie qu’ils le peuvent.
Leur vie est maintenant en danger, du moins voilà sûrement ce qu’ils
pensent. Mais, depuis la montagne où
il s’est retiré, Jésus prie. Pour
eux, pour cette foule dont les yeux ne sont pas encore ouverts et qui veut faire
de lui un roi pour des motifs contraires à ceux de sa royauté. Et soudain, une
forme s’avance vers la barque en quasi perdition.
Est-ce possible? Il s’agit
sûrement d’un fantôme, d’un ectoplasme.
La panique se saisit des disciples qui poussent des cris de frayeur,
selon le récit des autres évangélistes.
Jésus s’identifie alors à eux: Mais Jésus leur dit: C’est moi,
n’ayez pas peur! Sa présence
au sein de la tempête suffit à les rassurer.
En est-il de même pour nous, amis auditeurs?
Savons-nous tourner nos regards vers le Maître, le Fils de Dieu, au sein
des tempêtes qui agitent notre vie, au milieu de l’obscurité qui souvent
menace de nous engloutir et de nous faire perdre toute perspective d’espoir?
Au moment même où les disciples veulent faire monter Jésus dans leur
frêle embarcation, celle-ci touche terre là même où ils s’étaient proposés
de débarquer. Le Christ les a fait
parvenir à destination, sans naufrage, sans perte de biens ou de personnes.
Tourner nos regards vers lui c’est, comme il l’a lui-même dit un peu
auparavant, passer de la mort à la vie, voir le ciel clair et serein, retrouver
la paix et la sérénité. Comment
aborder les dangers permanents de l’existence autrement qu’avec cette
assurance, amis auditeurs? C’est là
le miracle de la foi: ce n’est pas être dispensé automatiquement des crises
et des situations angoissantes, loin de là; c’est plutôt vivre avec la
certitude que le Seigneur est au milieu de la tempête avec nous, il la traverse
en même temps que nous et nous en fait sortir vainqueurs.
Il nous amène à bon port, dans la vie comme dans la mort.
Continuons notre lecture
du chapitre six, à partir du verset vingt-deux: Le lendemain, ceux qui étaient
restés sur l’autre rive se rendirent compte qu’il n’y avait eu là
qu’un seul bateau et que Jésus n’avait pas accompagné ses disciples;
ceux-ci étaient repartis seuls. Entre-temps,
d’autres bateaux étaient arrivés de Tibériade, près de l’endroit où
toute cette foule avait été nourrie après que le Seigneur eut remercié Dieu.
Quand les gens virent que Jésus n’était pas là, et ses disciples non
plus, ils montèrent dans ces bateaux pour aller à Capernaüm.
Ils le trouvèrent de l’autre côté du lac et lui demandèrent: Maître,
quand es-tu venu ici? Jésus leur répondit:
Vraiment, je vous l’assure, si vous me cherchez, ce n’est pas parce que vous
avez compris le sens de mes signes miraculeux.
Non! C’est parce que vous
avez mangé du pain et que vous avez été rassasiés.
Travaillez, non pour la nourriture périssable, mais pour celle qui dure
pour la vie éternelle. Cette
nourriture, c’est le Fils de l’Homme qui vous la donnera, car Dieu le Père
lui en a accordé le pouvoir en le marquant de son sceau.
La foule a de quoi être étonnée: il n’y avait qu’un bateau, Jésus
n’est pas monté avec ses disciples, et cependant il n’est plus là.
Pendant ce temps une foule plus dense encore que celle de la veille
arrive sur une quantité de barques, et, ne le trouvant pas, s’en retourne
vers Capernaüm, où elle finit par le rencontrer.
A quoi rime ce jeu de cache-cache, pense-t-elle?
Pourquoi ce Jésus n’accepte-t-il donc pas d’être couronné roi par
nous-mêmes? Nous l’emmènerons à
Jérusalem dans une glorieuse procession, et qui pourra résister à son
pouvoir? Qui pourra s’opposer à
lui? Jésus dévoile leurs
intentions profondes: ils n’ont encore rien compris à ses oeuvres.
Ils sont animés de motifs matérialistes et égoïstes.
Ils n’ont pas le souci de se repentir de leurs oeuvres mauvaises et
d’implorer la Grâce de Dieu. Ils
ne saisissent pas la nature céleste du Royaume que le Christ amène avec lui.
Ils cherchent en Jésus-Christ autre chose que le Christ même.
A partir de ce moment, le centre du discours de Jésus devient le pain de
vie offert dans sa propre personne. Il
parle de manière figurée, utilisant l’image du pain car c’est celle-ci
qu’ils sont le plus à même de comprendre après ce qui s’est passé la
veille: Jésus veut les amener à passer des choses purement matérielles à la
nourriture céleste qui dure éternellement.
Et que devons-nous faire pour accomplir les oeuvres que Dieu attend de
nous? lui demandèrent-ils encore. L’oeuvre
de Dieu, leur répondit Jésus, c’est que vous croyiez en celui qu’il a
envoyé. Sur quoi, ils lui dirent:
Quel signe miraculeux nous feras-tu voir pour que nous puissions croire en toi?
Que vas-tu faire? Pendant
qu’ils traversaient le désert, nos ancêtres ont mangé la manne, comme le
dit ce texte de l’Ecriture: Il leur donna à manger un pain qui venait du
ciel. Mais Jésus leur répondit:
Vraiment je vous l’assure: ce n’est pas Moïse qui vous a donné le pain
venu du ciel, c’est mon Père qui vous donne le pain du ciel, le vrai pain.
Car le pain qui vient de Dieu, c’est celui qui descend du ciel et qui
donne la vie au monde. Seigneur,
dirent-ils alors, donne-nous toujours de ce pain-là.
Et Jésus répondit: C’est moi qui suis le pain qui donne la vie.
Celui qui vient à moi n’aura plus jamais faim, celui qui croit en moi
n’aura plus jamais soif. Mais je
vous l’ai déjà dit: vous avez vu, et vous ne croyez pas.
Ici, amis auditeurs, nous sommes frappés par le degré d’incrédulité
des auditeurs de Jésus. Très
vraisemblablement, il se trouve de nouveau confronté avec les chefs religieux
des Juifs, comme au chapitre cinq, après la guérison du paralytique de Béthesda.
Ils sont prêts à accomplir des oeuvres, celles que Dieu demande.
Ils demandent à Jésus de leur indiquer quelles sont ces oeuvres
qu’ils doivent accomplir. Sa réponse
est toute simple: L’oeuvre de Dieu, c’est que vous croyiez en celui
qu’il a envoyé. Mais c’est
justement là-dessus qu’ils butent, et que la plupart des hommes butent,
aujourd’hui comme hier. Le signe
miraculeux donné par Jésus la veille ne leur suffit pas.
Ils le comparent maintenant – et de manière défavorable – à la
manne donnée pendant quarante ans aux Hébreux dans le désert.
Ce miracle, ils l’attribuent à Moïse.
Jésus peut-il en faire autant? Or,
lui veut tourner leurs regards vers le véritable auteur des bienfaits dont le
peuple a bénéficié durant son long séjour dans le désert: c’est son Père,
et non Moïse, qui les a nourris. Et
ce Père céleste leur accorde maintenant, en la personne de son Fils, une
nourriture spirituelle irrremplaçable: Car
le pain qui vient de Dieu, c’est celui qui descend du ciel et qui donne la vie
au monde. Tout comme la femme
samaritaine initialement, les Juifs veulent bien recevoir le pain qui vient de
Dieu et qui satisfera leur faim physique. Mais
ils se méprennent sur le sens de cette nourriture, car ce pain ne peut être reçu
que par la foi, puisqu’il s’agit de Jésus lui-même en la personne duquel
il leur faut croire. On ne peut
dissocier le pain donné du ciel par Dieu, de la personne de son Fils unique.
Et c’est là que le bât blesse pour les auditeurs de Jésus.
Lors de notre prochaine émission, amis auditeurs, nous continuerons à lire
et méditer ensemble le chapitre six de l’évangile selon Jean, et à
approfondir la signification de l’image du pain de vie descendu du ciel