L’ÉVANGILE
SELON JEAN (23)
Amis auditeurs, voici les paroles assez choquantes pour le sens naturel que
Jésus a déclarées à ses auditeurs lorsqu’il a enseigné dans la synagogue
de Capernaüm, et qu’on trouve au sixième chapitre de l’évangile selon
Jean. Paroles choquantes pour les coeurs incrédules, mais en fait
vivifiantes pour ceux qui croient: “Oui, vraiment, je vous l’assure: si
vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme et si vous ne buvez pas son
sang, vous n’aurez point la vie en vous. Celui qui se nourrit de ma
chair et qui boit mon sang a la vie éternelle, et moi je le ressusciterai au
dernier jour. Car ma chair est vraiment une nourriture et mon sang est
vraiment un breuvage. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en
moi, et moi je demeure en lui. Le Père qui m’a envoyé a la vie en
lui-même, et c’est lui qui me fait vivre; ainsi, celui qui se nourrit de moi
vivra lui aussi par moi. C’est ici le pain descendu du ciel. Il
n’est pas comme celui que vos ancêtres ont mangé; eux, ils sont morts; mais
celui qui mange de ce pain-ci vivra pour toujours.”
Je vous ai commenté ces paroles lors de notre précédente émission sur ce
chapitre de l’évangile selon Jean. Elles ne commencent à avoir un sens que
lorsque l’on comprend qu’elles ont été prononcées par le Fils de Dieu,
qui se donne à saisir par la foi, accordant la vie éternelle dans sa
personne à ceux qui le saisissent de la sorte. Mais quelles ont été
les réactions des auditeurs de Jésus? La suite du texte nous informe à
ce sujet: Après l’avoir entendu, plusieurs de ses disciples dirent: ‘Ce
langage est bien difficile à accepter! Qui peut continuer à l’écouter?’
Jésus savait fort bien quels murmures ses paroles avaient soulevés parmi eux.
C’est pourquoi il leur dit: ‘Cela vous choque-t-il?’ Et si vous
voyez le Fils de l’homme remonter là où il était auparavant? C’est
l’Esprit qui donne la vie; l’homme n’aboutit à rien par lui-même.
Les paroles que je vous ai dites sont Esprit et vie. Hélas, il y en a
parmi vous qui ne croient pas.’ En effet, dès le début Jésus savait
quels étaient ceux qui ne croyaient pas, et qui était celui qui allait le
trahir. Aussi ajouta-t-il: ‘C’est bien pour cela que je vous ai dit:
Personne ne peut venir à moi si cela ne lui est accordé par le Père.’
A partir de ce moment-là, beaucoup de ses disciples l’abandonnèrent et cessèrent
de l’accompagner. Alors Jésus, se tournant vers les Douze, leur
demanda: ‘Et vous, ne voulez-vous pas aussi partir?’ Mais Simon Pierre
lui répondit: ‘Seigneur, vers qui irions-nous? Tu as les paroles de la
vie éternelle. Nous, nous avons mis toute notre confiance en toi et nous
savons que tu es le Saint, envoyé de Dieu.’ ‘ N’est-ce pas moi qui
vous ai choisis tous les douze?’ reprit Jésus. ‘Et pourtant l’un de
vous est un diable.’ Par ces mots, il désignait Judas, fils de Simon
Iscariot, l’un des Douze, qui allait le trahir.
Comme nous l’avons vu il y a un instant, ce n’est que dans la mesure où
l’on accepte que les paroles sur le pain de vie dont il faut se nourrir
viennent de la bouche même du Fils de Dieu, qu’elle prennent tout leur sens.
Autrement, certes, elles ont de quoi choquer. Raison pour laquelle Jésus
peut dire: Et si vous voyez le Fils de l’homme remonter là où il était
auparavant? Il indique par là sa provenance, sa véritable nature
divine, même s’il se nomme le fils de l’homme, reprenant ainsi
l’expression prophétique que l’on trouve au livre du prophète Daniel
concernant le Messie à venir. Mais le plus grand nombre de ses auditeurs
ne voyaient devant eux qu’un homme tout comme eux, et malgré tous les signes
de sa divinité qu’il leur avait donnés, ils butaient contre son apparence
humaine. Raison pour laquelle Jésus poursuit en disant: C’est
l’Esprit qui donne la vie; l’homme n’aboutit à rien par lui-même. Sans
l’illumination de l’Esprit Saint, l’homme ne peut ni connaître Dieu, ni
voir en Jésus-Christ son Fils bien-aimé. Qui plus est, manger la chair
du Christ n’a aucun sens si ce n’est dans la mesure où c’est de manière
spirituelle qu’on se l’approprie, en comprenant que Jésus-Christ n’est
pas simplement un descendant d’Abraham, de la lignée des juifs, mais qu’il
a été véritablement conçu du Saint Esprit. C’est à ce titre là
qu’il peut donner sa chair à manger comme source de vie à tous ceux qui la
reçoivent par une foi spirituelle, et non par une forme de superstition liée
à un rite particulier.
Mais croire, continue Jésus, c’est avant tout être attiré vers lui par
la puissance divine: Aussi ajouta-t-il: ‘C’est bien pour cela que je vous
ai dit: Personne ne peut venir à moi si cela ne lui est accordé par le Père.’
La vraie foi n’est jamais un mouvement autonome, provenant de la volonté
humaine. Car les esprits des hommes sont par eux-mêmes trop éloignés de
Dieu et de sa vérité. Il faut un mouvement secret de l’Esprit dans le
coeur humain pour l’amener à se ranger aux ordres du Christ en toute docilité.
La réaction naturelle humaine consiste à se rebeller, à se rebiffer et à
protester. C’est ce qu’on voit du reste chez la vaste majorité des
humains, comme ce fut le cas après la prédication de Jésus à la synagogue de
Capernaüm: un refus pur et simple de recevoir les paroles du Christ, aussi
vivifiantes et porteuses d’espérance soient-elles. En fait on est frappé
de constater dans le récit de l’évangéliste qu’un bon nombre de ceux qui
jusqu’ici avaient suivi Jésus, se détachent maintenant de lui. Comment
est-ce possible, alors que ce qu’il vient de dire n’est nullement en
contradiction avec tout ce qu’il a accompli jusqu’ici? Au contraire il
expose avec la plus grande intensité le but de sa mission et la valeur de sa
personne… Mais voilà, beaucoup de ceux qui l’ont suivi, l’ont fait
pour des motifs qui n’avaient finalement pas grand chose à voir avec sa
mission divine. Aujourd’hui, lorsqu’on prêche l’évangile, il est
facile aussi d’éviter de parler de tout ce qui peut rebuter les uns et les
autres. Non pas qu’il faille chercher à tout prix à scandaliser ses
auditeurs, loin de là; mais si la doctrine biblique provoque des réactions négatives
chez les uns et les autres, ce n’est jamais une raison pour essayer de l’édulcorer,
car ce faisant on déshonore l’auteur divin de la parole qu’on est appelé
à annoncer coûte que coûte.
Il est certain qu’après la défection d’un grand nombre de disciples,
les douze que Jésus avait appelés auprès de lui avaient pu être ébranlés.
Trop souvent on mesure la validité d’une doctrine au nombre de ses adhérents…
. Alors Jésus, se tournant vers les Douze, leur demanda: ‘Et vous,
ne voulez-vous pas aussi partir?’ Mais Simon Pierre lui répondit:
‘Seigneur, vers qui irions-nous? Tu as les paroles de la vie éternelle.
Nous, nous avons mis toute notre confiance en toi et nous savons que tu es le
Saint, envoyé de Dieu.’
Ici, Pierre, parlant au nom des autres disciples, montre qu’il a saisi la
nature spirituelle vivifiante des paroles de Jésus. En dehors de lui, ce
n’est que désert, ténèbres spirituelles et mort éternelle. C’est
en tant que Messie, envoyé de Dieu, qu’il est le pain de vie dont il
convient de se nourrir. Aujourd’hui encore lorsque l’on voit les
reniements des uns et des autres, tous ceux qui se réclament du Christianisme
mais à un moment ou un autre s’éloignent irrévocablement du Christ car ils
s’offusquent de tel ou tel enseignement biblique, il convient de se remémorer
cette réponse de Pierre: en dehors du Christ, il n’y a pas de vie, pas de
salut. Quant on a fait le tour des idéologies contemporaines, des
religions en vogue, des courants de pensée de tous acabits, on en revient
toujours là: ‘Seigneur, vers qui irions-nous? Tu as les paroles de
la vie éternelle. Nous, nous avons mis toute notre confiance en toi et
nous savons que tu es le Saint, envoyé de Dieu.’
Mais Pierre ne parle pas au nom de tous les disciples, car au milieu d’eux
se dissimule un hypocrite, qui bien que lui aussi ait été choisi pour être un
disciple, reste avec les autres pour d’autres motifs, qui seront dévoilés
plus tard. Sans doute choqué lui aussi par les paroles du Maître, et
incrédule, il aurait mieux valu pour lui quitter le groupe des proches de Jésus
plutôt que de continuer à le suivre en nourrissant à son égard des
sentiments de dépit qui allait le conduire à le trahir. Jésus le connaît
et, sans l’identifier devant les autres, il montre ici qu’il sait à quoi
s’attendre de sa part.
Ainsi se termine le sixième chapitre de l’évangile selon Jean, amis
auditeurs. Nous poursuivrons la prochaine fois notre étude en entamant le
chapitre sept de cet évangile.