L’ÉVANGILE SELON JEAN (30)

Après avoir médité au cours de nos deux précédentes émissions sur le passage de l’évangile de Jean qui nous parle de la femme prise en flagrant d’adultère, au début du chapitre huit, nous poursuivons aujourd’hui notre lecture de ce chapitre, amis auditeurs.  Jésus reprend le dialogue tendu avec les Pharisiens et les docteurs de la Loi dans la même veine que ce que nous avons lu au chapitre sept.  Il insiste une fois de plus sur son origine, sur Celui qui l’a envoyé et vers lequel il retournera, sur l’abîme qui le sépare de ses interlocuteurs simplement parce qu’ils ne le connaissent pas (et surtout ne veulent pas le connaître) pour qui il est véritablement.  Lisons donc ensemble du verset douze au verset vingt:  Jésus leur parla de nouveau et dit : Moi, je suis la lumière du monde; celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie.  Là-dessus, les Pharisiens lui dirent: Tu rends témoignage de toi-même, ton témoignage n’est pas vrai.  Jésus leur répondit: Quoique je rende témoignage de moi-même, mon témoignage est vrai, car je sais d’où je suis venu et où je vais; mais vous vous ne savez pas d’où je viens, ni où je vais.  Vous, vous jugez selon la chair; moi je ne juge personne.  Et si moi, je juge, mon jugement est conforme à la vérité, car je ne suis pas seul, mais avec moi il y a le Père qui m’a envoyé.  Dans votre loi, il est écrit que le témoignage de deux hommes est vrai.  Moi, je rends témoignage de moi-même, et le Père qui m’a envoyé rend témoignage de moi.  Ils lui dirent donc: où est ton Père?  Jésus répondit: vous ne connaissez ni moi, ni mon Père.  Si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père.  Jésus dit ces paroles dans le lieu où était le trésor, alors qu’il enseignait dans le temple; et personne ne l’arrêta, parce que son heure n’était pas encore venue.

Reprenons, amis auditeurs, la déclaration fondamentale de Jésus sur lui-même au début de ce passage: Moi, je suis la lumière du monde; celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie.  Ici, nous sommes ramenés au tout début de l’évangile de Jean, au prologue où il déclarait, si vous vous en souvenez: En lui résidait la vie, et cette vie était la lumière des hommes.  La lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas reçue.  Et un peu plus loin, à propos de Jean Baptiste: Il n’était pas lui-même la lumière, mais sa mission était d’être le témoin de la lumière.  Celle-ci était la véritable lumière, celle qui, en venant dans le monde, éclaire tout être humain.  Le sens de ces paroles de Jésus comme lumière du monde, ne prend évidemment tout son relief que par rapport à l’obscurité qui a envahi le monde, à ces ténèbres dont chaque être humain doit être délivré.  Or, la plupart des humains considèrent qu’ils ne sont pas dans les ténèbres, mais qu’ils ont par eux-mêmes suffisamment de lumière pour connaître Dieu et être acceptés par lui.  Ils ne croient pas que la vraie vie ne leur sera donnée que lorsqu’ils auront cru en Jésus-Christ pour ce qu’il est réellement, la lumière du monde, qui vient non seulement éclairer notre condition misérable de pécheurs voués aux ténèbres, mais aussi nous en délivrer…  Quelle ironie que de voir ces docteurs de la Loi qui avaient accès à toutes les prophéties de l’Ancien Testament sur le Messie, rejeter la véritable lumière du monde, même après avoir été les témoins d’un miracle accompli un jour de sabbat, celui de la guérison du paralytique de la piscine de Bethesda.  En contraste, au chapitre quatre, les Samaritains qui ne disposaient pas de la révélation de Dieu dans l’Ecriture comme les Juifs, et devant qui Jésus n’avait pas accompli de miracle comme la guérison du paralytique ou la multiplication des pains, et bien ces Samaritains ont cru en lui comme en le Messie promis.  Rappelez-vous de leurs paroles à la femme avec laquelle Jésus avait parlé au bord du puits de Jacob: Ce n’est plus à cause de tes dires que nous croyons; car nous l’avons entendu nous-mêmes, et nous savons que c’est vraiment lui le Sauveur du monde.  “Sauveur du monde”, “lumière du monde”,  Jésus ne l’est pas pour quelques uns seulement, il l’est pour tous, pour le monde, car tous ont besoin de voir la lumière et d’être sauvés.  Ce qui ne veut pas dire que tous l’acceptent comme leur Sauveur, et que tous seront sauvés.  Mais, comme l’écrit Jean dans le prologue de son évangile, “à tous ceux qui ont cru en lui, il a donné le privilège de devenir enfants de Dieu.”  Jésus poursuit ici: Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie. A la déclaration que Jésus est la lumière du monde, suit l’appel, l’injonction à le suivre, appel accompagné d’une promesse.  Et quelle promesse!  Au milieu des ténèbres, de l’obscurité environnante, au milieu des embûches et des petites étincelles qui se prennent pour la lumière, Jésus assure ses disciples, ceux qui le suivront, qu’ils n’auront jamais à craindre de cheminer dans l’obscurité, quelles que soient les circonstances, et cela jusqu’au bout de leur cheminement terrestre.  Certes, parfois même les croyants se sentent envahis par les ténèbres menaçantes et angoissantes: ils ne savent plus où ils en sont, ils se débattent au milieu des flots, comme la petite barque où se trouvaient un jour les disciples, ballotés par les vagues agitées par un vent impétueux.  Et pourtant, c’est au milieu de ces circonstances-là que la présence du Fils de Dieu se fait sentir de manière ineffable.  C’est là que la lumière de la vie se manifeste: au bout du tunnel Jésus-Christ vous attend.  Qui plus est, il chemine avec vous, là, au milieu du tumulte et de la tempête, sans peut-être que vous vous en aperceviez, jusqu’à ce que vous songiez à le contempler, à invoquer son nom avec une vraie foi.  Alors il ne manquera pas de vous soutenir, de vous faire sentir sa présence aimante et rassurante.

Pourtant, une question se pose: peut-on voir et discerner la lumière avant d’avoir compris qu’on est dans l’obscurité?  Ne faut-il pas d’abord avoir une conscience très nette des ténèbres environnantes, avant de pouvoir en être délivré?  Or, pour en être conscient, il ne faut pas prendre les petites lueurs ou étincelles qui nous environnent pour la vraie lumière, celle qui illumine pour l’éternité.  Il ne faut pas penser que lorsqu’un éclair luit soudain dans la nuit, et nous éblouit, nous y voyons davantage: en fait cet éclair ne fait que nous aveugler davantage.  Donc, il nous faut saisir que nous sommes complètement aveugles.  Les chapitres neuf et dix de l’évangile selon Jean nous parleront justement de l’aveuglement des uns et des autres, à la lumière de la guérison par Jésus d’un aveugle-né.  Ce qui est dit ici est comme un prélude à ce récit que nous verrons par la suite.

La réaction des Pharisiens à ces paroles de Jésus est tout-à-fait similaire à celle que nous avons déjà eue auparavant: refus d’accepter le témoignage de Jésus sur lui-même comme véridique, car il ne provient que de lui-même. A cela Jésus répond que ce qu’ils soutiennent n’a pas de valeur car ils ne pourraient jamais savoir d’où il vient, lui; ils n’ont pas accès à cette connaissance, à cause de leur incrédulité.  De toutes façons, sa gloire ne sera pas diminuée à cause de cette incrédulité.  De même aujourd’hui, en entendant ce témoignage de Jésus sur lui-même, nous devons ignorer complètement toutes les voix contraires qui cherchent à l’étouffer, et il y a en a beaucoup.  Pour que l’Évangile dans toute sa puissance soit perçu clairement par nous, il faut toujours élever nos yeux et être attentifs à la gloire céleste du Fils de Dieu , il nous faut l’écouter parler de lui-même et le laisser nous dire qui il est.  On entend si souvent telle ou telle personne prétendre apporter toutes sortes d’explications sur Jésus-Christ, alors qu’elles commencent par contredire le témoignage de Jésus sur lui-même.  Se laisser prendre au piège des belles paroles des uns ou des autres à ce sujet, c’est immanquablement rater tout simplement le but et le sens de l’Evangile.  Or, Jésus, aussi humble qu’il ait pu apparaître devant ses interlocuteurs au cours de son existence terrestre, est celui qui a obtenu une gloire sans pareille après avoir accompli sa mission terrestre.  L’apôtre Paul l’exprime de cette manière dans un célèbre passage de sa lettre aux chrétiens de la ville de Philippe:

Lui, qui, dès l’origine, était de condition divine, n’a pas cherché à profiter de l’égalité avec Dieu, mais il s’est dépouillé lui-même, et il a pris la condition du serviteur.  Il s’est rendu semblable aux hommes en tous points et tout en lui montrait qu’il était bien un homme.  Il s’est abaissé lui-même en devenant obéissant, jusqu’à subir la mort, oui, la mort sur la croix.  C’est pourquoi Dieu l’a élevé à la place la plus haute et il lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, pour qu’au nom de Jésus tout être s’agenouille, dans les cieux, sur la terre et jusque sous la terre, et que chacun déclare: Jésus-Christ est Seigneur à la gloire de Dieu le Père.