CHRIST, L’ALPHA ET L’OMEGA (1)

Chers amis, si vous avez suivi la dernière série d’émissions de Foi et Vie Réformées sur les ondes, vous vous souviendrez que j’ai résumé pour vous dans leur contexte historique et religieux les enjeux et le déroulement des grands conciles écuméniques du quatrième siècle, à savoir celui de Nicée, tenu en l’an 325 de notre ère, sous l’empereur Constantin, et celui de Constantinople, qui s’est déroulé environ soixante quinze and plus tard, en l’an 381, sous l’empereur Théodose.  Ces conciles ont marqué de manière indélébile l’expression de la foi chrétienne orthodoxe, c’est-à-dire conforme à la vérité divine révélée dans l’Ecriture Sainte. Aujourd’hui encore ils représentent pour l’ensemble de la Chrétienté dans le monde, la pierre de touche de la foi  que professent les églises chrétiennes, par delà toutes leurs différences ou divergences.  Je suis du reste persuadé que toutes les différences notables qui malheureusement existent toujours entre elles, pourraient être éliminées ou du moins substantiellement réduites si le contenu de ces confessions de foi dites écuméniques était étudié et pris très au sérieux par tous les chrétiens, et non répété ou rabâché par pur formalisme ou traditionnalisme ici ou là. 

Quoi qu’il en soit, je voudrais vous montrer au cours de la présente émission et des suivantes, comment la confession de Nicée-Constantinople a inspiré, plus de mille ans après qu’elle ait été émise et acceptée par les églises,  un homme comme Jean Calvin, dans son exposition d’un passage particulier du Nouveau Testament, le premier chapitre de la lettre de l’apôtre Paul aux Colossiens.  Je commenterai moi-même le passage en question, en donnant très largement la parole à Jean Calvin qui a commenté en détail tous les livres du Nouveau Testament, à l’exception du dernier, l’apocalypse de Jean.  Lisons tout d’abord les versets 12 à 20 de cette lettre de Paul aux chrétiens de Colosses: Rendez grâces avec joie au Père qui vous a rendus capables d’avoir part à l’héritage des saints dans la lumière.  Il nous a délivrés du pouvoir des ténèbres et nous a transportés dans le royaume de son Fils bien-aimé, en qui nous avons la rédemption, le pardon des péchés.  Il est l’image du Dieu invisible, le premier-né de toute la création. Car en lui tout a été créé dans les cieux et sur la terre, ce qui est visible et ce qui est invisible, trônes, souverainetés, principautés, pouvoirs.  Tout a été créé par lui et pour lui.  Il est avant toutes choses, et tout subsiste en lui.  Il est la tête du corps, de l’Eglise.  Il est le commencement, le premier-né d’entre les morts, afin d’être en tout le premier.  Car il a plu à Dieu de faire habiter en lui toute plénitude et de tout réconcilier avec lui-même, aussi bien ce qui est sur la terre que ce qui est dans les cieux, en faisant la paix par lui, par le sang de sa croix.

Amis auditeurs, à travers toutes ses lettres Paul revient constamment sur une opposition, une antithèse dont il a fait directement l’expérience: l’opposition radicale entre la lumière et les ténèbres, l’obscurité.  Il en fit l’expérience sur le chemin de Damas et allait dès lors vivre pour toujours de la lumière qui l’avait d’abord aveuglé.  Car Paul devait d’abord être plongé dans l’obscurité par l’apparition de Jésus-Christ dans sa vie: l’astre brillant  renversant ses péchés devait d’abord l’entraîner dans l’obscurité, afin de lui manifester on ne peut plus clairement, si je puis dire, les ténèbres dans lesquelles il était plongé sans son Seigneur et Sauveur.  Et puis, quelque chose comme des écailles devait tomber des yeux de Paul, comme nous le lisons dans le récit de sa conversion, au chapitre deux du livre des Actes: un disciple du nom d’Ananias est envoyé vers lui pour lui imposer les mains afin qu’il recouvre la vue.  Arrivé dans la demeure où Paul se trouve, il lui dit, au nom du Seigneur: Saul, mon frère, le Seigneur Jésus, qui t’est apparu sur le chemin par lequel tu venais, m’a envoyé pour que tu recouvres la vue et que tu sois rempli d’Esprit Saint.  Au même instant, il tomba de ses yeux comme des écailles, et il recouvra la vue.  Il se leva et fut baptisé; et, après avoir pris de la nourriture, il retrouva ses forces.  Mais qu’étaient donc ces écailles, amis auditeurs, si ce n’est le voile recouvrant les yeux dont Paul lui-même parle dans le troisième chapitre de sa seconde lettre aux Corinthiens; il parle de ses compatriotes qui lisent les livres de Moïse, la Torah, mais n’y voient pas l’annonce du Christ, comme si leurs yeux étaient voilés: Mais ils se sont endurcis dans leurs pensées. Car jusqu’à ce jour, quand ils font la lecture de l’Ancien Testament, le même voile demeure; il n’est pas enlevé, parce qu’il ne disparaît qu’en Christ.  Jusqu’à ce jour, quand on lit Moïse, il y a un voile sur leur coeur; mais lorsqu’on se tourne vers le Seigneur, le voile est enlevé.  Or, le Seigneur, c’est l’Esprit; et là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté.  Oui, amis auditeurs, liberté vis-à-vis des ténèbres, que seul le Saint Esprit peut faire venir dans votre vie, comme dans celle de Paul.  Le Saint Esprit lui a clairement fait comprendre quelle était la nature de cette lumière intense qui l’avait aveuglé sur le chemin de Damas: le Fils de Dieu lui-même.  L’Esprit Saint, venant sur Paul au moment de la venue d’Ananias, l’a illuminé afin de le rendre capable de voir cette lumière!  Christ est en effet la lumière des nations, mais elles ne le saisiront jamais comme la lumière sans être d’abord illuminées par le Saint Esprit…

Lumière et ténèbres: nous avons aussi lu quelque chose à leur propos dans le passage de la lettre de Paul aux Colossiens: Rendez grâces avec joie au Père qui vous a rendus capables d’avoir part à l’héritage des saints dans la lumière.  Il nous a délivrés du pouvoir des ténèbres et nous a transportés dans le royaume de son Fils bien-aimé, en qui nous avons la rédemption, le pardon des péchés.  Y a-t-il un passage dans le Nouveau Testament qui illustre mieux le motif de la Réforme: Par Christ seulement ?  L’obscurité, les ténèbres se font sentir là où Jésus-Christ n’est pas tenu pour qui il est véritablement: le Fils éternel de Dieu.  Dans son commentaire sur le verset 12 de ce chapitre, Calvin écrit ce qui suit: Paul retourne encore à l’action de grâces, afin que par cette occasion il leur rappelle quels bienfaits ils ont reçu par Christ; et par là il entre dans la pleine description du Christ.  Car c’était le seul remède pour fortifier les Colossiens contre toutes les embûches par lesquelles les faux apôtres voulaient les surprendre, à savoir de bien comprendre ce qu’est le Christ.  Car d’où vient que nous sommes menés çà et là par tant d’enseignements divers, sinon de ce que nous ne connaissons pas quelle est la puissance du Christ?  Car seul le Christ fait que toutes les autres choses s’évanouissent soudain.  C’est pourquoi il n’y a rien à quoi Satan ne s’efforce davantage, que de mettre des brouillards au-devant pour obscurcir le Christ, parce qu’il sait bien qu’alors la porte est ouverte à tous les mensonges.  Voici donc le seul moyen, tant pour comprendre et retenir, que pour rétablir la pure doctrine: c’est de mettre devant les yeux le Christ tel qu’il est, avec tous ses biens, afin que sa puissance soit vraiment ressentie.  Il n’est pas question ici du nom seulement: en effet, beaucoup confessent bien avec nous un seul Christ, et cependant quelle grande différence y a-t-il entre eux et nous!  Car, quant à eux, après avoir confessé que le Christ est le Fils de Dieu, ils transfèrent sa puissance aux autres, et la dispersent çà et là; ce faisant, ils le laissent quasiment vide et inutile, ou pour le moins ils le dépouillent de la plus grande part de sa gloire, en sorte que bien qu’il soit, parmi eux, nommé le Fils de Dieu, toutefois il n’est plus tel que le Père a voulu qu’il soit pour nous.  Mais quiconque considèrera le point principal de ce premier chapitre, comprendra bien ceci sans aucune difficulté. Car Paul n’y parle rien d’autre, sinon que nous sachions que Christ est le commencement, le milieu et la fin; que c’est de lui qu’il nous faut recevoir toutes choses, et que hors de lui il n’y a rien, et qu’on n’y peut rien trouver.

Amis auditeurs, je continuerai avec vous la prochaine fois cette méditation sur le premier chapitre de la lettre de Paul aux Colossiens, à la lumière du commentaire qu’en a donné Jean Calvin.  Nous verrons encore comment Calvin reste fidèle à la confession de la pleine divinité de Jésus-Christ, dans l’esprit même des conciles de Nicée et de Constantinople dont nous avons parlé les fois précédentes.