LE MESSIE SUR LA CROIX (2)

Trois des sept paroles prononcées par Jésus lors de sa crucifixion, nous sont rapportées dans l’évangile selon Jean, au chapitre 23.  Toutes trois témoignent de ce que sur la Croix, Jésus-Christ poursuit et accomplit son ministère de Messie, en dépit des apparences, qui paraissent totalement défavorables.  Soumis de nouveau à une triple tentation de la part de Satan, par la bouche des chefs du peuple, des soldats et de l’un des malfaiteurs crucifiés à côté de lui, Jésus ne tombe pas dans le piège qui consisterait à échapper miraculeusement à son supplice pour prouver quoi que ce soit ou éviter la souffrance et stopper celle des deux autres condamnés.  Car son ministère messianique consiste justement à offrir son corps en sacrifice innocent et parfait pour le salut éternel de tous ceux qui croiront en lui.  Mais relisons d’abord l’ensemble de ce passage: 

Avec Jésus on emmena aussi deux autres hommes, des bandits qui devaient être exécutés en même temps que lui.  Lorsqu’ils furent arrivés au lieu appelé “Le Crâne”, on cloua Jésus sur la croix, ainsi que les deux bandits, l’un à sa droite, l’autre à sa gauche.  Jésus pria: Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font.  Les soldats se partagèrent ses vêtements en les tirant au sort.  La foule se tenait tout autour et regardait.  Quant aux chefs du peuple, ils ricanaient en disant: Lui qui a sauvé les autres, qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie, l’Elu de Dieu!  Les soldats aussi se moquaient de lui.  Ils s’approchaient et lui présentaient du vinaigre en lui disant : Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même!  Au-dessus de sa tête, il y avait un écriteau portant ces mots: “Celui-ci est le roi des Juifs”.  L’un des deux criminels attaché à une croix l’insultait en disant: “N’es-tu pas le Messie?  Alors sauve-toi toi-même, et nous avec!”  Mais l’autre lui fit des reproches en disant: “Tu n’as donc aucune crainte de Dieu, toi, et pourtant, tu subis la même peine? Pour nous ce n’est que justice: nous payons pour ce que nous avons fait; mais celui-là n’a rien fait de mal.”  Puis il ajouta: “Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras régner.”  Et Jésus lui répondit: “En vérité je te l’assure: aujourd’hui même, tu seras avec moi dans le paradis.”  Il était environ midi, quand le pays tout entier fut plongé dans l’obscurité, et cela dura jusqu’à trois heures de l’après-midi.  Le soleil resta entièrement caché.  Le grand rideau du Temple se déchira par le milieu.  Alors Jésus poussa un grand cri: “Père, je remets mon esprit entre tes mains”.  Après avoir dit ces mots, il mourut.  En voyant ce qui s’était passé, l’officier romain rendit gloire à Dieu en disant: “Aucun doute, cet homme était juste.”  Après avoir vu ce qui était arrivé, tout le peuple, venu en foule pour assister à ces exécutions, s’en retourna en se frappant la poitrine.  Tous les amis de Jésus, ainsi que les femmes qui l’avaient suivi depuis la Galilée, se tenaient à distance pour voir ce qui se passait.  Il y avait un homme, appelé Joseph, un membre du Grand-Conseil des Juifs.  C’était un homme bon et droit, qui n’avait pas approuvé la décision ni les actes des autres membres du Grand Conseil.  Il venait d’Arimathée, en Judée, et attendait le royaume de Dieu.  Il alla demander à Pilate le corps de Jésus. Après l’avoir descendu de la croix, il l’enroula dans un drap de lin et le déposa dans un tombeau taillé en plein rocher, où personne n’avait encore été enseveli.

Reprenons la première parole de Jésus sur la Croix: Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font.   Par cette parole, Jésus prouve être le véritable Messie de Dieu, celui qui était promis dans l’Ancien Testament, dans les écrits sacrés du peuple juif, particulièrement au chapitre 53 du livre du prophète Esaïe, rédigé plusieurs siècles auparavant.  Le dernier verset de ce chapitre décrit en effet ainsi le Messie de Dieu: Il partagera le butin avec les puissants, parce qu’il s’est livré lui-même à la mort et qu’il a été compté parmi les coupables, parce qu’il a porté le péché de beaucoup et qu’il a intercédé pour les coupables.  Mais ici se pose une question très importante: la prière de Jésus en faveur des coupables, ceux qui l’ont crucifié et se moquent de lui, peut-elle être exaucée par celui qu’il appelle toujours son “Père”, au sein même de son intense souffrance?  Car il faut tout de même deux parties pour que le pardon puisse avoir lieu: la partie qui demande pardon, et celle qui pardonne.  C’est d’ailleurs ce que Jésus lui-même a enseigné à ses disciples dans la parabole des deux serviteurs qui chacun avait une dette, parabole qu’on trouve au chapitre 18 de l’évangile selon Matthieu: l’un avait une dette énorme envers un roi, l’autre une dette minimale envers le premier serviteur.  Que dit le premier serviteur au roi:  Le serviteur se jeta aux pieds du roi et, se prosternant devant lui, supplia: Sois patient envers moi, accorde-moi un délai et je te rembourserai tout.   Ce serviteur a donc reconnu la dette qu’il avait envers le roi.  Pris de pitié pour lui, son maître le renvoya libre, après lui avoir remis toute sa dette.   Est-ce que les chefs du peuple, les soldats - sans parler du malfaiteur - vont maintenant ou plus tard reconnaître ce qu’ils ont fait, se repentir et être pardonnés sur cette base?  Ou bien est-ce suffisant que Jésus demande à son Père de les pardonner pour qu’ils le soient effectivement, qu’ils se soient repentis ou non?  Pour obtenir une réponse à cette question importante, il nous faut revenir au tout début du ministère de Jésus tel que nous le lisons au chapitre 4 de l’évangile selon Matthieu: dès lors Jésus commença à prêcher et à dire: Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche.  Il faut une conversion qui implique une repentance  sincère, un changement total d’attitude.  C’est aussi ce sur quoi Jean Baptiste insistait dans sa prédication: une vraie conversion n’est pas un vague changement d’attitude, ou encore un nouvel enthousiasme pour la vie.  C’est un virage complet qui vous fait prendre conscience de la grandeur de Dieu, sa sainteté, sa puissance, et en même temps de votre propre misère, de votre profonde condition de pécheur.  Une vraie conversion est cependant un tel miracle dans la vie de quelqu’un que seul le Saint Esprit de Dieu peut accomplir quelque chose de semblable dans le coeur des hommes.

Alors comment Dieu, le Père de Jésus-Christ, va-t-il répondre à la prière de son Fils en faveur de ses ennemis, au moment où lui-même se trouve au plus profond d’un état d’abandon et de souffrance?  Et bien tout comme nous avons vu, la dernière fois, que les chefs du peuple en premier lieu, puis les soldats, enfin un des deux malfaiteurs se moquaient de Jésus en tant que Messie ou roi incapable de se sauver lui-même, nous voyons à partir du verset 40 de Luc chapitre 23 que l’un des malfaiteurs, puis l’officier romain qui surveillait l’exécution, et plus tard un des chefs du peuple qui ne s’est pas joint à la meute des autres pour condamner Jésus,  chacun à sa manière va reconnaître le caractère divin de la mission de Jésus.

Cette reconnaissance commence donc avec l’autre malfaiteur.  Il est remarquable de constater qu’il est le seul à appeler Jésus pas son nom: Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras régner.  Il emploie le nom donné par l’ange Gabriel à Marie lorsqu’il est venu lui annoncer la naissance d’un fils, comme on le lit au premier chapitre de l’évangile selon Luc: Voici, bientôt tu seras enceinte et tu mettras au monde un fils; tu le nommeras Jésus.  Il sera grand.  Il sera appelé  “Fils du Très-Haut”, et le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son ancêtre.  Il régnera éternellement sur le peuple issu de Jacob, et son règne n’aura pas de fin.  Donc Jésus sera le Messie, le successeur de David pour l’éternité.  Au premier chapitre de l’évangile selon Matthieu, l’ange dit à Joseph: Elle donnera naissance à un fils et tu l’appelleras Jésus.  C’est lui, en effet, qui sauvera son peuple de ses péchés.  Le nom de Jésus signifie en fait: “L’Eternel donne le salut”.  Et c’est bien de cette manière que ce malfaiteur comprend et emploie ce nom.  Mais il confesse aussi la réalité du Royaume de Jésus, qui n’est pas une affaire de sauvetage rapide pour les trois crucifiés, afin que tous les trois puissent échapper au dernier moment au sort misérable qui est le leur. Il confesse que le Royaume de Jésus est lié à une dispensation, une ère totalement nouvelle qui va venir, mais qui est déjà visible dans le fait que ce Jésus est bien innocent.  Au contraire de son compagnon d’infortune, il confesse que Jésus - le Sauveur - doit d’abord mourir avant que son Royaume ne soit établi complètement sur terre, lorsqu’il reviendra.  Il confesse aussi ses péchés et montre qu’il se repent de ce qu’il a fait, en reconnaissant que le jugement de Dieu sur lui et sur l’autre est juste: “Tu n’as donc aucune crainte de Dieu, toi, et pourtant, tu subis la même peine? Pour nous ce n’est que justice: nous payons pour ce que nous avons fait; mais celui-là n’a rien fait de mal.”  En reprenant l’autre criminel comme il le fait maintenant, il reconnaît qu’il existe un châtiment encore bien pire que d’être crucifié par des hommes!  La punition éternelle de Dieu est en vue!  C’est en fait un écho des paroles mêmes de Jésus à ses disciples dans Luc chapitre 12: Mes chers amis, je vous le dis: ne craignez pas ceux qui peuvent tuer le corps, mais qui n’ont pas le pouvoir de faire davantage.  Savez-vous qui vous devez craindre?  Je vais vous le dire: c’est celui qui, après la mort, a le pouvoir de vous jeter en enfer.  Oui, je vous l’assure, c’est lui que vous devez craindre. 

Nous voyons donc ici que la dynamique du ministère messianique de Jésus est pleinement au travail sur la Croix: Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche.  Par le ministère de Jésus sur la Croix, le Saint Esprit accomplit un miracle dans la vie de cet homme.  D’ailleurs, le Royaume des cieux aurait-il pu s’approcher davantage de cet homme alors que Jésus, le Sauveur, est attaché sur la Croix à côté de lui et lui parle ainsi?  Nous verrons la prochaine fois quelle portée attribuer à la seconde parole de Jésus sur la Croix, adressée justement à cet homme qui se repent et croit en son Sauveur.