AVOIR LA VOCATION

 

Avoir la vocation...  Voilà une belle expression, qui indique que la personne à qui elle s’applique a trouvé un sens à sa vie.  Cette personne sait ce qu’elle  veut faire de son existence, elle a appris ou apprend à utiliser les dons qu’elle a reçus en vue d’un but qui sous-tend toute son énergie.  La Bible enseigne que chaque être humain a reçu une vocation, un appel particulier qui a autant de valeur que la vocation adressée à une autre personne.  Dieu accorde des dons et des talents à tous sans exception, et aucun don ou talent n’a une moindre valeur qu’un autre.  La parabole des talents racontée par Jésus à ses auditeurs insiste sur le fait que les talents accordés par Dieu doivent fructifier grâce au travail et à l’énergie appliqués par ceux qui les ont reçus.  En fait à l’époque un talent constituait une grosse somme d’argent. Dans la sphère du Royaume de Dieu, celle où son autorité est reconnue, il n’y a pas de place pour la paresse, la nonchalance ou la négligence.  Un jour Dieu demandera à chacun des comptes de ce qu’il ou elle aura fait des talents qu’Il lui aura accordés.  Un talent est avant tout quelque chose qui doit être mis au service de Dieu et de son prochain.  Et le faire c’est exprimer l’amour qui est dû à Dieu et à son prochain.  Ce qui signifie bien sûr que toute activité humaine n’entre pas dans le cadre du Royaume de Dieu: un trafiquant de drogue peut-être très malin, très habile à faire passer des quantités de cocaïne d’un pays à l’autre, en utilisant (parfois à leur insu) des voyageurs naïfs, cela ne comptera jamais comme une activité au service de Dieu et de son prochain. A dire vrai, si l’on regarde autour de soi, on n’en finira pas d’énumérer le nombre de talents dévoyés qui auraient pu être utilisés dans le cadre du Royaume de Dieu, en accord avec ses principes et pour le bien de la communauté dans son ensemble.  Les amateurs de sarcasmes en tout genre (on n’en manque guère) se moqueront facilement de ce que je dis, en évoquant les talents de telle ou telle prostituée, de telle ou telle personne spécialisée en détournements de fonds et que sais-je encore.  Mais leur talent pour le sarcasme mal placé se retournera un jour contre eux.  Ils devraient plutôt lire le livre des Proverbes, dans la Bible, où l’on trouve l’avertissement suivant: Jusqu’à quand, stupides, vous complairez-vous à des sottises?  Et vous, moqueurs, jusqu’à quand prendrez-vous plaisir à vous moquer?  Et vous, insensés, jusqu’à quand détesterez-vous la connaissance? 

Or la vraie connaissance consiste à savoir et accepter que la vocation reçue de Dieu, c’est avant tout un appel à croire en sa parole, en ses promesses, en son Evangile de salut.  Comprendre la vocation particulière que Dieu adresse à chacun de nous, avec la mise en oeuvre, le déploiement, des talents qu’il accorde à chacun, cela passe d’abord par l’acceptation de cette vocation primordiale, de cet appel à suivre Jésus-Christ, à vivre greffé spirituellement en lui, par l’action de l’Esprit Saint. Au premier siècle de notre ère, l’apôtre Paul écrivait justement aux chrétiens de la ville de Thessalonique à propos de l’appel, de la vocation que Dieu leur avait adressée.  Ses paroles retentissent avec la même intensité 20 siècles plus tard, pour tous ceux qui se savent appelés par Dieu.  Ecoutons-les donc:  C’est pourquoi nous prions continuellement notre Dieu pour vous: qu’il vous trouve digne de l’appel qu’il vous a adressé et que, par sa puissance, il fasse aboutir tous vos désirs de faire le bien et rendre parfaite l’oeuvre que votre foi vous fait entreprendre.  Ainsi, le Seigneur Jésus-Christ sera honoré en vous et vous serez honorés en lui; ce sera là un effet de la grâce de notre Dieu et Seigneur Jésus-Christ.

Dans la vie nous sommes souvent placés à la croisée de plusieurs chemins, devant des choix qui engagent notre futur de manière très sérieuse: quelle carrière professionnelle choisir,  vers quel pays émigrer, peut être sans espoir de retour, avec quel époux ou quelle épouse s’engager pour la vie?  Nous pouvons être confronté à une croisée des chemins lorsque nous devons enterrer un être cher, sachant bien que notre vie ne sera plus jamais la même.  De tels moments interviennent dans la vie de tout un chacun et nous forcent à opérer des choix décisifs lors de notre pélerinage terrestre.  Mais, dans la vie, la croisée des chemins n’est pas seulement quelque chose de très épisodique.  Car en y regardant de plus près, nous sommes chaque jour confrontés à des choix qui peuvent avoir des conséquences dramatiques sur notre existence. Rester fidèle à son conjoint, agir avec intégrité dans une situation où on nous a confié des responsabilités financières très sensibles, garder le contrôle de soi en dépit de pressions presque intolérables qui pourraient nous amener à commettre un geste irréparable… Un auteur chrétien du dix-septième siècle, John Bunyan, a parlé de la croisée des chemins de manière frappante dans un livre écrit en prison, et qui est devenu un classique de la littérature chrétienne mondiale: je veux parler du “Voyage du Pélerin”, qui est une allégorie sur le pélerinage que constitue la vie chrétienne.  Le personnage central, Chrétien, quitte la Cité de la Destruction chargé d’un fardeau extrêmement lourd à porter: en dépit des moqueries de son entourage proche, il s’en va seul, son lourd fardeau attaché aux  épaules, se dirigeant vers la Cité Céleste dont il a pris connaissance en lisant un livre particulier.  Sur son chemin, il rencontrera bien des obstacles, bien des personnages qui lui recommanderont de se diriger sur telle ou telle route, bien des croisements de chemins où il lui faudra faire un choix décisif.  Lors d’un moment crucial  durant ce périple, il parviendra à la colline de la Croix, et c’est là que le lourd fardeau dont il est chargé, tombera enfin de ses épaules.  Alors, de quelle carte nous munir pour effectuer notre propre pélerinage terrestre?  L’auteur du psaume 119 répond sans ambage à cette question.  S’adressant à Dieu, il écrit: Que ta parole est douce à mon palais!  Elle est meilleure que le miel, et j’acquiers du discernement grâce à tes ordonnances; c’est pourquoi je déteste tout sentier mensonger.  Ta parole est comme une lampe qui guide tous mes pas, elle est une lumière éclairant mon chemin.

 

Bien souvent, on entend des non-croyants dire que les croyants ne sont au fond que des gens faibles qui ont besoin de béquilles; le Dieu qu’ils imaginent ce sont ces béquilles qui les soutiennent dans l’existence, et leur donnent un espoir fictif.  Mais comme ils ne peuvent s’en passer, ils font un sacrifice intellectuel en acceptant de croire en toutes sortes de choses qu’ils ne peuvent ni prouver ni démontrer.  Alors, n’éludons pas la question: la foi chrétienne n’est-elle qu’une béquille au service de gens faibles et peureux?   Je commencerai par répondre en prenant l’exemple des jeux paralympiques: on peut être grandement handicapé, devoir se servir de prothèses, d’aides extérieures à son corps, et pourtant vaincre des obstacles que des gens sans handicaps n’imagineraient jamais vaincre eux-mêmes.  Les performances accomplies par les athlètes paralympiques nous stupéfient littéralement, elles sortent de l’ordinaire et nous remplissent d’admiration.  Et bien ce qu’une vraie foi fait accomplir à ceux qui la possèdent est du même ordre.  Le croyant sincère se sait handicapé par une nature déformée, qui n’est plus ce qu’elle devrait être, ce qu’elle aurait toujours dû être.  Oui, il a besoin d’une aide extérieure, et ne le niera jamais.  Il n’est pas auto-suffisant et n’a pas honte de l’admettre.  Ce sont les fous et les orgueilleux qui refusent de l’admettre. Lui cherche sa vie en dehors de lui-même, par la foi en Jésus-Christ, Dieu incarné.  Et c’est là qu’il trouve cette vie.  Il la trouve si bien que cette foi le transforme et peut lui faire renverser des montagnes, vaincre des obstacles réputés infranchissables.  Ce sont parfois des obstacles intérieurs, dont peu de gens autour de lui ont conscience, peu importe.  Mais que dire, par exemple,  de tant de jeunes filles chrétiennes dans certains pays qui, aujourd’hui même, paient  de leur vie leur foi en Jésus-Christ, alors que les medias n’en soufflent mot, par indifférence ou par lâcheté?  Dirons-nous que ces jeunes filles sont des personnes faibles et peureuses?   C’est justement tout le contraire!  Elles puisent en Jésus-Christ une force  qui sort de l’ordinaire, qui en soi est un miracle.

Et puis, ceux qui se moquent des soi-disant béquilles des chrétiens devraient honnêtement se poser la question de savoir quelles béquilles ils utilisent eux-mêmes pour les porter à travers l’existence.  Ces béquilles tiennent-elles vraiment le coup? Qui niera que notre société en rupture de Christianisme soit marquée par un égoïsme et un matérialisme sans précédent?  Il paraît que la liberté et la justice allaient se lever tels le soleil  matinal, sur une société enfin débarrassée de ses mythes chrétiens séculaires.  Or, en lieu et place de justice et de liberté on observe toutes sortes d’esclavages modernes destructeurs, qu’il serait trop long d’énumérer ici.  Vous pouvez vous-mêmes en faire l’inventaire, si vous êtes un tant soi peu lucides.  Je préfère, quant à moi, vous citer un passage de la seconde lettre de l’apôtre Paul aux chrétiens de Corinthe, au chapitre 12, dans lequel il parle de la vraie force qui se manifeste au travers de la faiblesse: alors que Paul se sent terriblement opprimé dans son corps - on ne sait pas exactement de quel mal il s’est agi - alors qu’il a supplié Dieu d’éloigner de lui cette grande épreuve, il reçoit du Seigneur la réponse suivante: Ma grâce te suffit, c’est dans la faiblesse que ma puissance se manifeste pleinement.  C’est pourquoi, ajoute Paul, je me vanterai plutôt de mes faiblesses, afin que la puissance du Christ repose sur moi.