AIMER DIEU PLUS QUE LE PLAISIR

Une approche chrétienne du plaisir dans une culture du loisir

Par Jacques Roets

En 2 Timothée 3, l'apôtre Paul nous donne une description du temps dans lequel nous vivons, les derniers jours, c'est-à-dire les jours entre la première et la deuxième venue de Jésus-Christ. Il termine sa liste descriptive en parlant de ceux qui aiment leur plaisir plus que Dieu (verset 4). Quelle description juste du 21e siècle! Quand vous en­trez chez Costco, la première chose que vous voyez, ce sont les écrans géants de télévision. Quand vous quittez un magasin comme Wal-Mart, vous trouvez les CD et les DVD les plus récents juste à côté des tablettes de chocolat. Dans ce contexte, il est crucial que nous ré­fléchissions, en tant que chrétiens, à la place qu'occupe le plaisir dans nos vies. Nous devons nous deman­der: Quels sont les plaisirs purs qui plaisent à Dieu, que nous pouvons et devons rechercher? Quels sont les plaisirs coupables ou teintés de péché que nous devons rejeter?

Nous allons exami­ner ensemble ce qui constitue un plaisir pur et nous verrons comment il nous arrive parfois d'en dégrader la nature. Notre but est d'analyser la place du plaisir dans notre vie chrétienne et de fournir des lignes directrices pour la vie de gens qui "aiment Dieu plus que leur plaisir".

Le plaisir et le chrétien

La recherche du plaisir est une des plus grandes priorités de notre culture. Nous passons une grande partie de notre temps à essayer de nous divertir avec nos écrans géants, nos équipements de cinéma maison, les parcs d'attrac­tion, les méga-complexes de ciné­ma, les motoneiges, etc. De nom­breuses personnes ne vivent que pour la fin de semaine. Plusieurs travaillent avec pour seul but de faire suffisamment d'argent pour pouvoir se distraire. En tant que chrétiens, cette recherche exces­sive du divertissement ne manque pas de nous influencer.

Dans le climat social dans lequel nous vivons, il est essentiel que nous développions une pensée critique sur la place qu'occupe le plaisir dans nos vies. De nombreux chrétiens réagissent à notre culture en niant la légitimité du divertisse­ment. Ils disent que les chrétiens devraient se concentrer unique­ment sur les questions d'ordre spiri­tuel et faire simplement leur devoir. Nous devrions nous retirer de notre culture avant qu'elle nous conta­mine. Cette approche de notre cul­ture est problématique pour au moins deux raisons.

Premièrement, elle nie la réa­lité radicale du péché. Cette pers­pective enseigne de manière sim­pliste que le péché se trouve dans la culture du divertissement et que, par conséquent, si nous évitons cette culture, nous évitons le péché. C'est nier la nature radicale du pé­ché qui est toujours localisé dans le cœur humain. Le péché n'est pas à l'extérieur de  nous,  mais à  l'intérieur. Se retirer du monde n'est pas la même chose que faire face au péché et le combattre. Lorsque l'a­pôtre Jean nous exhorte à com­battre le monde, il vise le monde dans nos cœurs. N'aimez pas le monde, ni ce qui est dans le monde. Si quelqu'un aime le monde, l'amour du Père n'est pas en lui; car tout ce qui est dans le monde, la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l'orgueil de la vie, ne vient pas du Père, mais vient du monde. Et le monde passe et sa convoitise aussi; mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement. (1 Jean 2:15-17; voir Jacques 4:4). Nous devons veiller à combattre l'amour du monde dans nos propres cœurs. Ce n'est pas en fuyant le monde que nous pouvons accomplir cela, mais en crucifiant notre nature péche­resse et en revêtant le nouvel homme en Jésus-Christ, y compris dans le domaine du divertissement.

Le second problème lié à cette approche est encore plus dan­gereux. Promouvoir le retrait de notre culture, c'est nier la bonne création de Dieu. Lorsque nous nous retirons, nous attaquons le Créateur lui-même. Le psalmiste nous rappelle au Psaume 24:1: À l'Éternel ta terre et ce qui la remplit. Tout ce qui existe dans ce monde vient de Dieu; tout don bon et par­fait nous vient de Dieu. Les loisirs sont un don de Dieu. C'est un don des plus merveilleux qui nous pro­cure beaucoup de plaisir et de joie. C'est aussi une grande source de repos pour les très nombreuses per­sonnes qui sont dépassées par les fardeaux de la vie, leur permettant de reprendre leur souffle dans ce monde agité. Nous ne devons pas nous refuser à nous-mêmes ou refuser aux autres les plaisirs légi­times que Dieu nous accorde dans la vie du fait que certains abusent de ces dons excellents de Dieu. C'est le problème humain perpé­tuel: nous sommes des créatures d'extrêmes. Nous réagissons d'un extrême à l'autre.

Puisque l'approche qui con­siste à se retirer de notre culture est problématique, quelle devrait donc être notre approche dans le do­maine du divertissement? Au lieu de nous laisser séduire par la mau­vaise approche prônée par notre culture, nous devons examiner ce qu'est le véritable plaisir et nous engager dans notre culture avec les plaisirs plus grands et meilleurs que Dieu nous offre. Nous devons être des personnes vraiment capables d'avoir du plaisir, sans être consu­mées par la recherche du plaisir. Nous devons être le sel et la lumière de notre culture même dans ce domaine.

Qu'est-ce que le plaisir pur?

Réfléchissez à votre propre vie quelques instants. Quels sont les plaisirs purs et véritables qui vous procurent beaucoup de joie? Faites-en une courte liste, si vous voulez. Les questions suivantes peuvent vous aider à identifier les plaisirs purs de votre vie: Qu'est-ce qui me procure un plaisir tout simple? Qu'est-ce qui me renouvelle vérita­blement? De quelle manière est-ce que j'arrive à me décharger de mes soucis? Quels sont les plaisirs dans ma vie qui ne me laissent aucun sentiment de culpabilité? Les plai­sirs purs ne laissent pas de taches ou de sentiments de culpabilité; ils nous laissent totalement ravis.

Quelles sortes de plaisirs sont véritablement purs? Voici quelques-uns de ceux que j'ai trouvés: con­templer un lever ou un coucher de soleil, prendre un bon petit déjeu­ner, lutter avec mes fils, visiter un ami, boire une bonne tasse de café fort et brûlant, lire un bon livre, passer du temps avec mon épouse, regarder un bon film. Les plaisirs purs sont souvent propres à chacun de nous. Ce qui procure du plaisir à une personne n'en procure pas nécessairement à une autre.

Les plaisirs purs sont souvent des choses ordinaires de la vie qui nous apportent beaucoup de joie et nous   ravissent   pendant   un   moment. Il y a en fait de nombreuses occasions dans nos vies de nous réjouir de tels moments de plaisirs purs et non entachés. Cependant, un des grands problèmes de notre culture dans sa recherche excessive et jamais satisfaite de divertisse­ments, c'est qu'elle nous empêche de pleinement goûter la joie que Dieu nous donne dans ces mo­ments de plaisirs purs, tout simples, qui ne nous semblent pas être à la hauteur des normes d'excitation et de sensations fortes que nous nous sommes donnés. Aujourd'hui, nous subissons beaucoup de pression nous incitant à rechercher les sen­sations fortes, ce qui draine notre vie de ses petits moments de plaisir pur qui surviennent à tout instant.

Un autre ennemi des plaisirs purs de nos vies est notre propre tendance à utiliser ces plaisirs purs de façons qui ne sont pas si pures. Nous les transformons souvent en échappatoires.   Nous  les  considé­rons comme des moyens d'échap­per aux pressions de  la vie.  Les pressions typiques auxquelles nous voulons échapper sont l'ennui, la solitude, le   stress, la   frustration ainsi que la peine et la douleur que nous causent les autres lorsqu'ils nous   traitent   injustement.   Que faisons-nous alors? Nous devenons des obsédés de la télévision et du cinéma; nous commençons à gri­gnoter tout le temps; nous recher­chons le réconfort émotionnel dans la nourriture ou dans la compagnie d'un animal. La liste ne fait que s'al­longer. Pensez-y: Quelles sont les situations dans votre vie qui vous poussent à rechercher un moyen de fuite? De quelle manière cherchez-vous à échapper à ces situations? Dans     quels "plaisirs purs" recherchez-vous du réconfort?

Quel problème y a-t-il à con­sidérer   ces   choses   comme   des moyens d'échapper aux différents stress de la vie? Le problème, c'est que nous recherchons alors dans le plaisir ce que Dieu seul peut nous apporter. Nous échangeons ainsi le Créateur pour la créature. C'est de l'idolâtrie; c'est échanger la vérité de Dieu pour le mensonge et c'est adorer et servir la créature plutôt que le Créateur  (Romains 1:25). Lorsque nous recherchons la guérison émotionnelle dans la nourriture après avoir été blessé ou après avoir subi une frustration,   nous échangeons la créature pour ce que seul Dieu peut  nous apporter. Quand nous faisons des idoles des plaisirs purs, nous détruisons ces plaisirs parce que nous recherchons en eux bien davantage que ce qu'ils peuvent nous apporter. Il n'est pas surprenant qu'ils nous   semblent alors si vides.

L'antidote à cette tendance que nous avons à accorder trop d'importance à ces "plaisirs purs", c'est de venir à Dieu, la source du plaisir le plus pur. Le psalmiste nous en montre le chemin lorsqu'il dit: Il y a abondance de joies devant ta face, des délices éternelles à ta droite. (Psaume 16:11). C'est là ce que nous devons apprendre à dire. Nous devons apprendre à dire avec Asaph: Qui d'autre ai-je au ciel? En dehors de toi, je n'ai aucun plaisir sur la terre. Ma chair et mon cœur peuvent défaillir: Dieu sera toujours le rocher de mon cœur et ma part. (Psaume 73:25-26). Dieu est le plai­sir le plus pur et le plus grand en lequel nous pouvons nous réjouir et nous reposer. Nous devons nous re­poser et nous réjouir en lui lorsque Dieu est notre plus grand plaisir; alors tous les petits plaisirs trouvent également leur place. Quand nos délices sont en Dieu, nous pouvons alors jouir véritablement des plaisirs purs de la vie, parce que nous ne recherchons pas en eux ce qui se trouve, en fin de compte, unique­ment en Celui qui nous donne tous ces plaisirs. Quand Dieu est sur le trône du plaisir, alors tous les autres plaisirs de la vie se mettent en place et nous sommes alors en mesure d'en jouir abondamment.

 

Traduit de l’anglais et réimprimé avec permission, Jaques Roets, “ Lovers of God Rather Than Lovers of Pleasure (1)”, The Outlook, Vol. 59, No. 6, Juin 2009, p. 21-22. L’auteur est pasteur de l’Eglise réformée unie (URC) à Dyer en Indiana, aux États-unis.