COMMENT
RÉSOUDRE LES CONFLITS DANS L’EGLISE? (2)
Comment résoudre les conflits dans l’Eglise ?
Voilà le thème de cette seconde émission consacrée à
l’enseignement de Jésus-Christ sur ce point si sensible, qui cause tant de tort au développement
et à l’enracinement du christianisme. La
dernière fois j’ai passé en revue avec vous un certain nombre de passages du
Nouveau Testament (que ce soient les évangiles, le livre des Actes des Apôtres
ou certaines lettres), qui montrent que des conflits entre chrétiens ont hélas
surgi dès le début de l’Eglise. En
fait ceci démontre que les hommes et les femmes sauvés par la foi en Jésus-Christ
ne sont pas des gens parfaits, sans l’ombre d’un défaut ou d’une action répréhensible.
Le
Nouveau Testament, avons-nous vu ensemble, ne gomme pas les différences, les désaccords,
parfois les disputes ou même les sérieuses altercations que des chrétiens de
la première génération ont pu avoir entre eux.
C’est même une des preuves externes de l’authenticité du Nouveau
Testament, qui ne cherche pas à brosser un tableau idéal de l’Eglise
primitive, laquelle était composée d’hommes et de femmes pécheurs, parfois
inconstants ou butés.
Nous n’allons pas répéter aujourd’hui la lecture de
tous ces textes, mais plutôt bien réfléchir sur l’enseignement du Christ
que l’on trouve au chapitre 18 de l’évangile selon Matthieu, sur sa mise en
pratique et ses implications. Je
vous lis ce texte fondamental: Si ton
frère s’est rendu coupable à ton égard, va le trouver, et convaincs-le de
sa faute : mais que cela se passe en tête-à-tête.
S’il t’écoute, tu auras gagné ton frère.
S’il ne t’écoute pas, reviens le voir en prenant avec toi une ou
deux autres personnes, pour que tout ce qui sera dit soit appuyé sur les déclarations
de deux ou trois témoins. S’il
refuse de les écouter, dis-le à l’Eglise.
S’il refuse aussi d’écouter l’Eglise, mets-le sur le même plan
que les païens et les collecteurs d’impôts. Vraiment, je vous l’assure :
tous ceux que vous exclurez sur la terre auront été exclus aux yeux de Dieu et
tous ceux que vous accueillerez sur la terre auront été accueillis aux yeux de
Dieu.
Jésus montre de façon très claire la voie qui doit être
suivie pour qu’une réconciliation puisse avoir lieu.
La première étape est une rencontre personnelle, sur la demande de la
personne qui s’estime offensée. L’esprit
évangélique ce n’est pas de chercher à tout déballer sur la place
publique, ou de se répandre en
plaintes et ragots pour se faire passer pour une victime, mais d’avoir
l’honnêteté et le courage d’aller voir la personne qui nous a causé du
tort. Parfois nous pouvons penser
qu’elle nous a offensé alors que nous ne sommes pas au courant de facteurs
qui pourraient modifier notre jugement ou démontrer d’autres responsabilités
pour l’action ou les paroles qui sont en cause.
Il faut d’abord parler en tête à tête avec la personne qui nous
semble responsable de l’offense. Il
est bien possible qu’un problème soit alors résolu de cette manière et
qu’une bonne compréhension naisse d’une telle rencontre.
Il est souhaitable qu’ensemble, les deux personnes cherchent des
solutions acceptables pour éviter le retour d’une situation née de
malentendus ou d’incompréhension mutuelle. Car
il est aussi possible que l’offense commise soit une forme de réponse négative
à ce que la personne qui s’estime offensée a elle-même dit ou fait,
qu’elle en soit consciente ou non. De
toutes manières, il faut arriver à cerner la nature et l’enjeu réels du
conflit. Comme pour un abcès qui
tend à s’étendre dans tous les membres et les infecter, il faut bien
circonscrire la nature du mal pour pouvoir le percer puis le guérir, même si
cela fait mal.
La personne qui a commis l’offense peut aussi l’avoir
fait par négligence ou oubli, par simple légèreté, mais aussi peut-être par
volonté délibérée de nuire au bien ou à la réputation de l’autre.
Dans tous les cas, un vrai croyant doit pouvoir examiner sa conduite et
s’en repentir devant celui ou celle qu’il a offensé. Pour
y contribuer positivement, la
personne offensée se doit de faire un très gros effort de maîtrise de soi
afin de ne pas se laisser aller à des contre-accusations, des diatribes amères
qui ne feront qu’enfoncer son cas devant l’autre et envenimer la situation.
Cette maîtrise de soi est du reste requise par le Seigneur
Jésus-Christ lui-même, elle est un des fruits de l’Esprit Saint nommé
par l’apôtre Paul au chapitre 5 de sa lettre aux chrétiens galates : Mais
le fruit de l’Esprit, écrit-il, c’est
l’amour, la joie, la paix, la patience, l’amabilité, la bonté, la fidélité,
la douceur, la maîtrise de soi. Car
au fond, plus encore que notre propre réputation, notre bien-être, c’est de
l’honneur du Seigneur Jésus-Christ et de la bonne marche de son Église
qu’il est question : en effet l’Eglise c’est son corps, tous les fidèles
en sont les membres, et si un membre
inflige une blessure à un autre, c’est tout le corps qui en souffre, et Jésus-Christ
lui-même, alors que son corps a été martyrisé et percé sur la croix pour
faire l’expiation des péchés de son Eglise.
Le passage suivant de la lettre de Paul aux chrétiens d’Ephèse, tiré
du chapitre 4, indique quel doit être l’attitude des croyants les uns vis-à-vis
des autres : Ne laissez aucune parole
blessante franchir vos lèvres, mais seulement des paroles empreintes de bonté.
Qu’elles répondent à un besoin et aident les autres à grandir dans
la foi. Ainsi elles feront du bien
à ceux qui vous entendent. N’attristez
pas le Saint-Esprit de Dieu car, par cet Esprit, Dieu vous a marqués de son
sceau comme sa propriété pour le jour de la délivrance finale.
Donc, l’objet de cette entrevue personnelle doit être
d’amener une réconciliation durable, fondée sur une reconnaissance du péché
commis à l’égard de l’autre lorsque tel est bien le cas, et une demande de
pardon sincère, qui réconcilie le pécheur non seulement avec son frère ou sa
sœur, mais avec Dieu lui-même, à travers l’oeuvre rédemptrice de Jésus-Christ
et sous l’action purificatrice du Saint Esprit. La personne qui a subi
l’offense se doit de démontrer une attitude sincère de recherche de réconciliation,
avec toute la maîtrise de soi nécessaire, même si elle expérimente une
souffrance morale réelle. Elle doit
toujours avoir à l’esprit la demande du Notre Père, la prière enseignée
par Jésus à ses disciples : Pardonne-nous
nos offenses, comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés.
Si quelqu’un me demande pardon pour m’avoir offensé, je me dois
de lui pardonner sous peine de ne pas être pardonné par Dieu pour mes propres
offenses à son égard.
Lorsqu’une telle rencontre personnelle n’aboutit pas
au résultat escompté, et que l’offenseur ne reconnaît pas ses torts et
poursuit son comportement nocif, le Seigneur Jésus enjoint de prendre avec soi
une ou deux personnes qui cette fois serviront de témoins pour que les paroles
échangées ne soient pas déformées par l’une des deux parties.
C’est la partie qui s’estime offensée qui se fera accompagner de
deux témoins, lesquels doivent être sincèrement motivés par un désir de
voir la réconciliation s’opérer, et non prendre aveuglément le parti de
celui qui leur a demandé de l’accompagner pour le soutenir : S’il
ne t’écoute pas, reviens le voir en prenant avec toi une ou deux autres
personnes, pour que tout ce qui sera dit soit appuyé sur les déclarations de
deux ou trois témoins. Le
conflit est maintenant mis en présence de quelques autres membres de
l’Eglise, mais il n’est toujours pas mis sur la place publique, en tous cas
pas devant toute l’Eglise. Le rôle
des deux témoins est de favoriser la demande de pardon et la réconciliation
des deux parties qui n’a malheureusement pas eu lieu lors de la rencontre
personnelle. Mais les témoins sont
aussi là pour être à même de rapporter avec exactitude les paroles prononcées
par les deux parties lors de cette rencontre.
Le cas échéant ils seront les garants de la véracité des propos tenus
de part et d’autre. Ils doivent
faire preuve de la même maîtrise de soi que celle dont j’ai parlé tout à
l’heure, ne pas s’emporter, ne pas être partiaux.
Ils doivent avant tout rechercher l’honneur de Jésus-Christ et le bien
de son Eglise. Il est évident
qu’il faut que ces personnes soient des croyants mûrs et très sérieux.
La Bible est pleine de récits où figurent de faux témoins qui
obtiennent la condamnation d’innocents, suivie parfois de leur exécution.
C’est d’ailleurs exactement ce qui est arrivé à Jésus durant son
procès inique. Souvenez-vous aussi
de la septième béatitude qu’il a prononcée lors du Sermon sur la Montagne :
Heureux les artisans de la paix, car ils
seront appelés fils de Dieu. Une
autre traduction de ces paroles dit : Heureux ceux qui répandent autour d’eux la paix, car Dieu les reconnaîtra
pour ses fils. Il est possible
qu’une seule rencontre ne permette pas de résoudre le problème, tout en
manifestant un véritable progrès. Dans
ce cas, et tant que la situation n’est pas complètement bloquée entre les
deux parties, les rencontres avec ces deux témoins devraient se poursuivre
jusqu’à la résolution du problème.
Mais si cette résolution n’intervient pas, si le pardon
qui doit être obtenu ne l’est pas, alors l’affaire doit être portée
devant l’église : S’il refuse de
les écouter, dis-le à l’Eglise. Là,
il s’agit non pas de la communauté tout entière (enfants y compris), mais de
ceux qui sont en charge de gouverner l’Eglise selon les préceptes de son
chef, Jésus-Christ: les pasteurs et les anciens si vous voulez.
Ils doivent alors former un tribunal ecclésiastique pour délibérer de
l’affaire en question. Si, malgré les exhortations, les admonitions et les
visites arrangées par les dirigeants de l’Église, rien n’a progressé,
alors le membre qui est en tort doit être averti qu’il sera exclus de la
table du Seigneur lors de la célébration de la Sainte Cène.
Il est momentanément écarté des bénéfices que procure l’accès à
ce repas sacré institué par Jésus-Christ pour tous ceux qui se repentent de
leurs péchés et recherchent leur vie en lui et non en eux-mêmes.
En dernier recours, le membre déjà suspendu de la communion de
l’Eglise avec son Seigneur, en
sera exclus, jusqu’à ce qu’il se repente, fasse preuve de contrition et
demande lui-même à être réintégré, ayant apporté des preuves solides de
la sincérité de ses intentions : S’il
refuse aussi d’écouter l’Eglise, mets-le sur le même plan que les païens
et les collecteurs d’impôts. Vraiment, je vous l’assure : tous ceux
que vous exclurez sur la terre auront été exclus aux yeux de Dieu et tous ceux
que vous accueillerez sur la terre auront été accueillis aux yeux de Dieu.
Voilà donc la voie prescrite par Jésus-Christ en
Matthieu chapitre 18. La prochaine
fois je vous parlerai de la manière dont le Catéchisme de Heidelberg explique
cette dernière parole du Christ et ce qu’on appelle le pouvoir des clés du
Royaume qu’Il a confié à son Église. Je
vous invite donc vivement à ne pas manquer notre prochaine émission.