COMMENT
RÉSOUDRE LES CONFLITS DANS L’ÉGLISE ? (3)
Pour cette troisième émission consacrée à l’enseignement du Christ sur
la résolution des conflits au sein de l’Eglise et la recherche du pardon en
raison des offenses que l’on a provoquées, il n’est pas inutile de citer à
nouveau le passage que l’on trouve au chapitre 18 de l’évangile selon
Matthieu. Je vous lis ce texte
fondamental où le Seigneur Jésus indique les étapes à suivre pour obtenir la
réconciliation entre croyants et, lorsqu’elle ne peut avoir lieu en raison de
l’endurcissement du cœur d’un pécheur, comment l’Eglise doit faire face
à cette situation de péché non résolue: Si
ton frère s’est rendu coupable à ton égard, va le trouver, et convaincs-le
de sa faute : mais que cela se passe en tête-à-tête.
S’il t’écoute, tu auras gagné ton frère.
S’il ne t’écoute pas, reviens le voir en prenant avec toi une ou
deux autres personnes, pour que tout ce qui sera dit soit appuyé sur les déclarations
de deux ou trois témoins. S’il
refuse de les écouter, dis-le à l’Eglise.
S’il refuse aussi d’écouter l’Eglise, mets-le sur le même plan
que les païens et les collecteurs d’impôts. Vraiment, je vous l’assure :
tous ceux que vous exclurez sur la terre auront été exclus aux yeux de Dieu et
tous ceux que vous accueillerez sur la terre auront été accueillis aux yeux de
Dieu.
La dernière fois nous avons vu que les dernières paroles de Jésus dans ce
passage indiquent que le pouvoir des clés du Royaume a été confié à
l’Eglise fidèle du Christ, c’est-à-dire seulement celle qui obéit à ses
paroles. Ecoutez à nouveau: Vraiment, je vous l’assure : tous ceux que vous exclurez sur la
terre auront été exclus aux yeux de Dieu et tous ceux que vous accueillerez
sur la terre auront été accueillis aux yeux de Dieu.
Cette déclaration est à mettre en parallèle avec la parole de Jésus
à son disciple Pierre après que celui-ci l’ait confessé comme le Christ, le
Fils du Dieu vivant : Je te donnerai
les clés du royaume des cieux : tous ceux que tu excluras sur la terre
auront été exclus aux yeux de Dieu, et tous ceux que tu accueilleras sur la
terre auront été accueillis aux yeux de Dieu.
Notez bien que ce n’est que sur la base de la confession correcte de
Pierre sur la personne de Jésus que cette promesse est donnée, et pas sur sa
personne en tant que telle. Jésus a en effet commencé par lui dire : Tu es heureux, Simon, fils de Jonas, car ce n’est pas de toi-même que
tu as trouvé cela. C’est mon Père
céleste qui te l’a révélé. En
effet lorsque juste un peu après Pierre tente de dissuader Jésus d’aller à
Jérusalem pour y accomplir sa mission -
qui passera par sa souffrance et sa crucifixion - Jésus assimile ses paroles à
celles de Satan : Arrière de moi
Satan ! Eloigne-toi de moi !
Tu es un obstacle à ma mission, car tes pensées ne sont pas celles de
Dieu ; ce sont des pensées toutes humaines.
On pourrait en dire de même de l’attitude de Pierre que Paul a dénoncées
en public comme étant hypocrite, lorsqu’il a eu honte d’apparaître en
public avec des chrétiens d’origine non-juive, par peur d’une certaine catégorie
de croyants d’origine juive. Lors
de la première émission consacrée à notre thème nous avons lu ensemble le
rapport de cet incident tel que Paul le rapporte au chapitre 2 de sa lettre aux
chrétiens galates. Là,
Pierre ne pouvait aucunement prétendre à être cette pierre sur laquelle Jésus
bâtirait son Église, car il était justement en train de nier l’essence même
de ce qu’est l’Eglise universelle du Christ!
Mais chaque fois que l’Eglise confesse Jésus-Christ comme le Christ,
le Fils du Dieu vivant, et qu’elle cherche à obéir fidèlement à
l’enseignement de celui qui est sa tête, alors oui, elle exerce le pouvoir
des clés. Ce n’est pas tant
qu’elle détient ce pouvoir, qui n’appartient qu’à Jésus-Christ lui-même,
mais elle l’exerce avec autorité car Il le lui a confié.
Lorsqu’elle s’éloigne de l’enseignement véritable du Christ, elle
n’exerce plus le pouvoir des clés, mais son propre pouvoir tyrannique.
C’est comme si Jésus lui criait alors au visage : Arrière
de moi Satan ! Eloigne-toi de
moi ! Tu es un obstacle à ma
mission, car tes pensées ne sont pas celles de Dieu; ce sont des pensées
toutes humaines.
Que nous enseigne le catéchisme de Heidelberg sur le pouvoir des clés et
comment il doit être exercé en particulier lorsque des conflits ou des
offenses surgissent au sein de l’Eglise ?
Le 31e dimanche du catéchisme pose la question suivante : Comment
s’exerce le pouvoir des clés ? Et
répond de la manière suivante : Par
la prédication de l’Evangile et la discipline ecclésiastique. Ainsi le
Royaume des cieux est ouvert aux croyants et fermé aux incrédules.
Notons bien que selon le catéchisme il n’existe pas de pouvoir des
clés que n’importe qui peut s’attribuer à lui-même sans que l’Evangile
soit prêché avec fidélité et sans que l’Église soit constituée selon
l’ordre du Christ. Toute fausse
attribution de ce genre (avec les abus qu’elle ne manquera pas d’engendrer)
n’est en fait qu’une infâme caricature de ce qu’est l’Eglise du Christ.
Le plus souvent c’est d’ailleurs pour assouvir un désir malsain de
domination spirituelle, ou encore pour assouvir les besoins de son estomac à
travers les dons de fidèles qu’on recherche.
Mais le Catéchisme de Heidelberg poursuit dans sa lancée et pose
ensuite deux questions (84 et 85) en reprenant les deux aspects mentionnés à
la question-réponse 83 : Comment le Royaume des cieux est-il ouvert ou fermé par la prédication
de l’Evangile ? Réponse :
Selon l’ordre du Christ, celle-ci
annonce et atteste publiquement à tous les fidèles en général, et à chacun
en particulier, que lorsqu’ils saisissent avec une vraie foi sa promesse, tous
leurs péchés leur sont véritablement pardonnés par Dieu à cause des mérites
du Christ ; et au contraire, elle déclare aux incrédules et aux
hypocrites que la colère de Dieu et la damnation éternelle demeurent sur eux
aussi longtemps qu’ils ne se convertissent pas.
C’est selon ce témoignage de l’Evangile que Dieu jugera les uns et
les autres dans cette vie et dans celle qui est à venir.
La question 85, elle, est formulée de la manière suivante : Comment
le Royaume des cieux est-il ouvert et fermé par la discipline ecclésiale ?
Réponse : Selon l’ordre
du Christ, ceux qui, se prétendant chrétiens, enseignent une doctrine ou mènent
une vie non-chrétienne, reçoivent plusieurs avertissements fraternels.
S’ils ne renoncent pas à leurs erreurs et à leurs vices, ils sont cités
devant l’Eglise, ou devant ceux qui ont été établis pour cela par
l’Eglise. Et s’ils méprisent
aussi ces exhortations, ils sont exclus, par l’interdiction des sacrements, de
la communauté chrétienne et, par Dieu lui-même, du Royaume du Christ.
Mais ils sont reçus à nouveau comme membres du Christ et de l’Eglise
s’ils promettent et manifestent un réel amendement.
Comme vous l’avez constaté, cette section du catéchisme de Heidelberg a
très directement rapport avec le thème de nos émissions.
Il s’agit de corriger les péchés qui sont soit de l’ordre d’une
vie d’inconduite, soit de l’ordre de doctrines contraires à l’Évangile,
propagées comme si elles étaient la vérité.
Quelque soixante ans après la rédaction du Catéchisme par une équipe
de théologiens réunis dans la ville de Heidelberg, en Allemagne, un grand
synode d’églises néerlandaises se déroulait entre 1618 et 1619 dans la
ville de Dordrecht, aux Pays-Bas. Entre
autres textes très importants, il allait sortir de ce Synode un ordre ecclésiastique
inspiré des écrits du réformateur français Jean Calvin, et prenant pour base
confessionnelle le catéchisme de Heidelberg, ainsi que certains autres textes
issus de la Réforme. Cet ordre ecclésiastique
sera ensuite adopté par un grand nombre d’églises réformées de par le
monde ; il est d’ailleurs toujours aujourd’hui en vigueur au sein de
bien d’entre elles. Comprenant
dans sa version actuelle quelque 86 articles, il consacre une section très
importante à la question de l’ordre à suivre par rapport à ce qu’énonce
le catéchisme de Heidelberg au dimanche 31 (que nous avons lu), le tout fondé
sur la voie prescrite par Jésus-Christ en Matthieu chapitre 18.
Je voudrais vous lire, pour terminer cette émission, le début de cette
section, à partir de l’article 71 : La
discipline ecclésiastique est spirituelle; donc - en dehors des peines prononcées
par l’autorité civile - la censure spirituelle est nécessaire pour préserver
l’honneur de Dieu, pour réconcilier le pécheur avec l’église et avec son
prochain et pour ôter toute offense de l’église du Christ.
Article 72 : Si donc quelqu’un
pèche par rapport à la pureté de la doctrine ou à la piété de son
comportement personnel, pour autant que cela reste caché et ne donne lieu à
aucune offense en public, il faut s’en tenir à la règle clairement prescrite
par le Christ en Matthieu 18.
Article 73 : Les péchés secrets
dont le pécheur s’est repenti après avoir été repris par une personne en
privé, ou bien en présence de deux ou trois témoins, ne doivent pas être
rapportés au conseil de l’église.
Article 74 : Si quelqu’un, après
qu’il ait été repris par deux ou trois personnes avec amour à propos d’un
péché secret, ne veut rien entendre ou s’il commet un péché connu
publiquement, l’affaire doit être soumise à l’attention du conseil de l’église.