COMMENT
RÉSOUDRE LES CONFLITS DANS L’ÉGLISE ?
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La Bible utilise des mots différents pour parler du péché, de ce qui nous
sépare d’avec Dieu et notre prochain. Dans
le Nouveau Testament on trouve par exemple le mot hamartia,
qui signifie « manquer le but, perdre ce qui est bien ».
Le mot anomia, lui, signifie
agir contre la loi de Dieu. Un autre
mot, adikia, a plutôt la connotation
de tout ce qui s’apparente à l’injustice.
La Bible soutient que tout le monde commet des péchés, ce n’est pas
l’apanage de certains seulement. Ainsi,
dans l’Ancien Testament, on trouve le passage suivant au livre de l’Ecclésiaste,
chapitre 7, verset 20 : Il n’y a
sur terre aucun homme juste qui fasse toujours le bien sans jamais pécher.
Le psaume 14, toujours dans l’Ancien Testament, est sans équivoque
à ce sujet : Du ciel, l’Eternel observe tout le genre humain : « Reste-t-il
un homme sage qui s’attend à Dieu ?
Ils se sont tous égarés, tous sont corrompus, plus aucun ne fait le
bien, même pas un seul. Dans sa
lettre aux chrétiens de Rome, Paul reprend ce psaume, au chapitre 3. Au verset
23, il en fait le résumé : Tous ont péché, en effet, et sont privés de la gloire de Dieu. Nous
lisons au verset 2 du troisième chapitre de la lettre de Jacques, dans le
Nouveau Testament : Car chacun de
nous commet des fautes de bien des manières.
Celui qui ne commet jamais de fautes dans ses paroles est un homme
parvenu à l’état d’adulte, capable de maîtriser aussi son corps tout
entier. Un peu avant, au
chapitre 2, Jacques écrit à ses lecteurs : En
effet, celui qui désobéit à un seul commandement de la Loi, même s’il obéit
à tous les autres, se rend coupable à l’égard de toute la Loi. Dans 1
Jean chapitre 1, verset 8, nous lisons : Si
nous prétendons n’être coupable d’aucun péché, nous vivons dans
l’illusion, et la vérité n’habite pas en nous.
Tout ceci rend clair que dans l’Eglise, ce ne sont pas quelques uns
seulement qui possèdent la prérogative de reprendre les autres sur leurs péchés.
En fait, si tous les péchés commis par chacun devaient tomber sous la
censure de l’Église, la communauté tout entière devrait être mise sous
discipline. Comme l’enseigne le réformateur
Jean Calvin, il faut donc distinguer entre
les péchés que les croyants commettent par faiblesse (non pas qu’ils soient
innocents et qu’on ne doive pas chercher à être pardonné par Dieu, mais ils
ont des conséquences limitées), et certains péchés qui eux entraînent des
conséquences sérieuses non seulement pour le pécheur lui-même, mais aussi
pour d’autres personnes et, avant tout, attaquent l’honneur de Dieu devant
l’Eglise et le monde. Il s’agit donc de péchés qui créent un scandale
devant l’ensemble de l’Eglise. Ce
qui mène à l’application de la discipline ecclésiale, c’est le refus entêté
de se soumettre aux admonitions répétées de l’Eglise et l’absence de
repentance sincère.
D’après Matthieu 5, verset 16, le croyant guidé par le Saint Esprit peut
accomplir des œuvres qui glorifient le Père céleste.
Jésus dit en effet : C’est
ainsi que votre lumière doit briller devant tous les hommes, pour qu’ils
voient le bien que vous faites et qu’ils en attribuent la gloire à votre Père
céleste. En contraste, une vie
qui ne manifeste pas l’amour entre en conflit avec Dieu, avec la communauté
des croyants, et finalement le pécheur entre aussi en conflit avec lui-même,
ce qui a des effets destructeurs à tous les niveaux.
C’est là que le service de la réconciliation par l’Eglise doit
intervenir. Cela commence par une
admonition personnelle, en privé, face à face.
Il s’agit d’abord de fautes qui ne sont connues que de quelques
personnes, et qui ne sont pas nécessairement scandaleuses pour l‘ensemble de
la communauté, mais méritent tout de même d’être relevées.
Le seul motif qui doit mener quelqu’un à aller parler à son frère,
c’est l’amour qu’il lui porte, le souci qu’il a de voir ce frère ne pas
se séparer de la communion avec Jésus-Christ.
Le péché peut avoir été commis contre lui, ou pas nécessairement.
Dans Matthieu 18:15 Jésus dit : Si
ton frère s’est rendu coupable à ton égard, va le trouver, et convaincs-le
de sa faute : mais que cela se passe en tête-à-tête.
Dans Luc 17:3, on lit: Si ton
frère s’est rendu coupable d’une faute, reprends-le, et s’il change
d’attitude, pardonne-lui. Quoi
qu’il en soit, Jésus reprend ici (comme si souvent d’ailleurs)
l’enseignement de l’Ancien Testament. Au
chapitre 19 du livre du Lévitique, qui fait partie du Pentateuque, c’est-à-dire
des cinq premiers livres de la Bible, on lit: Tu
ne haïras pas ton frère dans ton cœur, mais tu ne manqueras pas de reprendre
ton prochain pour ne pas te charger d’un péché à son égard.
Tu ne te vengeras pas et tu ne garderas pas de rancune envers les membres
de ton peuple, mais tu aimeras ton prochain comme toi-même.
Je suis l’Eternel.
A partir de ces données bibliques, qu’il faut considérer dans leur
ensemble, on peut progresser dans la compréhension des devoirs mutuels entre
chrétiens, consistant à s’avertir, s’encourager, aider l’autre à se
remettre sur le chemin de l’obéissance lorsqu’il s’en écarte à son
propre péril et au risque de causer du tort à la communauté vivante dont il
fait partie. Qu’est-ce qui empêchera
que cela devienne une forme d’inquisition malsaine ?
Deux facteurs, qui doivent à tout moment être gardés à l’esprit :
comme on vient de le voir, personne ne peut se croire exempt de péché, se
considérer comme intrinsèquement supérieur à son frère ou sa sœur dans la
foi. A cet égard l’apôtre Paul
avertit les Corinthiens dans sa première lettre, au dixième chapitre :
C’est pourquoi, leur écrit-il, si
quelqu’un se croit debout, qu’il prenne garde de ne pas tomber.
Ensuite, toute
admonition, tout reproche ou toute exhortation et encouragement ne doit avoir
qu’un seul but, sous peine de trahir le Christ crucifié et ressuscité: la réconciliation
avec Dieu et avec son prochain. Toute
forme de discipline ecclésiale, qu’elle soit faite de manière privée selon
la voie indiquée par Jésus en Matthieu chapitre 18, ou devant les dirigeants
de l’Eglise, si le péché persiste ou est devenu connu publiquement, doit être
exercée dans l’esprit des paroles de Paul, au chapitre 5 de sa seconde lettre
à ces mêmes chrétiens de Corinthe : Nous
faisons donc fonction d’ambassadeurs au nom du Christ, comme si Dieu adressait
par nous cette invitation aux hommes : « C’est au nom du Christ que
nous vous en supplions : soyez réconciliés avec Dieu.
Celui qui était innocent de tout péché, Dieu l’a condamné comme un
pécheur à notre place pour que, dans l’union avec le Christ, nous soyons
justes aux yeux de Dieu. Ces
deux motifs, s’ils sont vécus par les croyants sincères et respectés comme
des normes données par Dieu dans sa Parole, empêcheront que l’hypocrisie ne
s’installe et qu’une forme d’inquisition sournoise et oppressive ne
remplace l’exercice sain et juste de la discipline ecclésiale.
Car celle-ci n’a pour but que de maintenir le corps des croyants,
l’Eglise, sain et robuste, de le protéger contre toute contamination ou gangrène.
Si je vois que mon frère marche sur une voie dangereuse, qu’il se
dirige tout droit vers un fossé où il ne manquera pas de tomber, ou encore
dans des sables mouvants où il ne manquera pas de s’enliser, et que je néglige
de le prévenir sérieusement en lui montrant la voie à suivre, est-ce que je
fais preuve d’amour à son égard ? Bien
sûr que non ! Une Église locale qui ne veut ou ne sait pas exercer la
discipline ecclésiale selon les normes que le Saint Esprit à données dans
l’Ecriture Sainte, n’honore pas Dieu et ne fait pas preuve d’amour véritable
à l’égard de ses membres, en dépit de ses autres œuvres bonnes ou de ses
bonnes intentions.
Arrivés à ce point de notre réflexion, je voudrais vous citer une partie
de l’article 29 de la confession de foi réformée Belgica, rédigée en 1561
par le français Guido de Brès, qui paya d’ailleurs du prix de sa vie sa fidélité
à l’Evangile quelques années plus tard. Cette confession de foi a donc été
écrite il y a environ 550 ans, et vous verrez qu’elle n’a rien perdu de son
actualité. Dans cet article, il s’agit de distinguer la vraie église de la
fausse. Guido de Brès écrit ce qui
suit : Nous croyons qu’il faut
diligemment discerner et avec prudence par la Parole de Dieu, quelle est la
vraie Eglise à cause de toutes les sectes qui sont aujourd’hui présentes et
qui se réclament de ce nom d’Eglise. Nous
ne parlons pas de la compagnie des hypocrites, qui se mêlent aux bons dans
l’Eglise, et cependant n’en sont point, ils y sont présents quant au corps;
mais nous distinguons le corps et la communion de la vraie Eglise d’avec
toutes les autres sectes, qui se disent Église.
Les marques pour identifier la vraie Eglise sont les suivantes :
l’Eglise use de la pure prédication de l’Evangile, elle use de la pure
administration des sacrements comme Christ les a ordonnés ; la discipline
ecclésiastique est en usage pour corriger les vices; bref, on a pour règle la
pure Parole de Dieu, rejetant toutes choses contraires à celle-ci, tenant Jésus-Christ
pour seul Chef. Par cela on peut être
assuré de connaître la vraie Eglise, et ce n’est le devoir de personne
d’en être séparé. Quant à ceux
qui sont de l’Eglise, on peut les connaître par les marques des chrétiens,
à savoir, par la foi; lorsqu’ils ont reçu un seul Sauveur Jésus-Christ, ils
fuient le péché, ils suivent la justice, aimant le vrai Dieu et leurs
prochains, ils ne se détournent ni à droite ni à gauche, ils crucifient leur
chair avec ses actes. Non pas
qu’ils n’aient aucune infirmité en eux, toutefois ils combattent par
l’Esprit, chaque jour, ayant continuellement recours au sang, à la mort, à
la passion et à l’obéissance du Seigneur Jésus, par la foi, en qui ils
obtiennent la rémission de leurs péchés.
A l’article 30, la confession Belgica ajoute ce qui suit sur le
gouvernement de l’Eglise : Nous
croyons que cette vraie Eglise doit être gouvernée selon la discipline
spirituelle que notre Seigneur nous a enseignée par sa Parole : il y a des
ministres ou pasteurs pour prêcher la Parole de Dieu et pour administrer les
sacrements ; il y a aussi des surveillants et des diacres.
Ceux-ci, avec les pasteurs, sont comme le sénat de l’Eglise et par ce
moyen ils préservent la vraie religion et gardent la vraie doctrine, corrigeant
spirituellement et tenant en bride les hommes vicieux afin aussi que les pauvres
et les affligés soient secourus et consolés si besoin est.
Le bon ordre règnera ainsi dans l’Eglise, lorsque des hommes fidèles
seront élus, selon la règle qu’en donne saint Paul à Timothée.
Pour conclure, je voudrais simplement vous rappeler comment l’article 73
de l’ordre ecclésiastique hérité du Synode de Dordrecht suit l’ordre
prescrit par le Nouveau Testament :
Les
péchés cachés dont le pécheur s’est repenti après avoir été repris par
une personne en privé, ou bien en présence de deux ou trois témoins, ne
doivent pas être rapportés au conseil de l’église.
La prochaine fois je reprendrai le fil de notre réflexion sur les conflits
dans l’Eglise et la manière de remédier aux péchés qui y sont commis.