NOTRE VRAIE PATRIE (1)

“Foi et Vie Réformées” vous propose, aujourd’hui et les deux prochaines fois, trois méditations basées sur les chapitres 11 et 12 de la lettre aux Hébreux, dans le Nouveau Testament. Le titre de ces trois messages est le suivant: “Notre vraie patrie”. Nous allons d’abord lire ensemble les versets 1 à 3, 8 à 21 puis 39 et 40 du chapitre 11 de la lettre aux Hébreux, suivis des deux premiers versets du chapitre 12. Écoutez bien: “Or la foi, c’est l’assurance des choses qu’on espère, la démonstration de celles qu’on ne voit pas. C’est à cause d’elle que les anciens ont reçu un bon témoignage. C’est par la foi que nous comprenons que le monde a été formé par la parole de Dieu, de sorte que ce qu’on voit ne provient pas de ce qui est visible.” Reprenons au verset 8: “C’est par la foi qu’Abraham obéit à l’appel de Dieu en partant vers un pays qu’il devait recevoir en héritage; et il partit sans savoir où il allait. C’est par la foi qu’il vint s’établir dans la terre promise comme en un pays étranger, habitant sous des tentes, ainsi qu’ Isaac et Jacob, héritiers avec lui de la même promesse. Car il attendait la cité qui a de solides fondations, celle dont Dieu est l’architecte et le constructeur. C’est par la foi aussi que Sara elle-même, malgré son âge avancé, fut rendue capable de donner le jour à une descendance, parce qu’elle tint pour fidèle celui qui a fait la promesse. C’est pourquoi d’un seul homme –et d’un homme déjà atteint par la mort- sont issus des descendants aussi nombreux que les étoiles du ciel et que le sable qui est au bord de la mer et qu’on ne peut compter. C’est dans la foi qu’ils sont tous morts, sans avoir obtenu les choses promises, mais ils les ont vues et saluées de loin, en confessant qu’ils étaient étrangers et résidents temporaires sur la terre. Ceux qui parlent ainsi montrent clairement qu’ils cherchent une patrie. Et s’ils avaient eu la nostalgie de celle qu’ils avaient quittée, ils auraient eu l’occasion d’ y retourner. Mais en réalité ils aspirent à une patrie meilleure, c’est-à-dire céleste. C’est pourquoi Dieu n’a pas honte d’être appelé leur Dieu: car il leur a préparé une cité. C’est par la foi qu’Abraham, mis à l’épreuve, a offert son fils Isaac. C’est son fils unique qu’il offrait, lui qui avait reçu les promesses et à qui il avait été dit: “C’est par Isaac que tu auras une descendance qui porte ton nom.” Il comptait que Dieu est puissant, même pour faire ressusciter d’entre les morts. C’est pourquoi son fils lui fut rendu. Il y a là un symbole. C’est par la foi qu’ Isaac bénit Jacob et Ésaü en vue de l’avenir. C’est par la foi que Jacob, au moment de mourir, bénit chacun des fils de Joseph, et qu’il se prosterna en s’appuyant sur l’extrêmité de son bâton.” Reprenons notre lecture à partir du verset 39 de ce chapitre 11, jusqu’au verset 2 du chapitre suivant: “Et tous ceux-là, qui avaient reçu par leur foi un bon témoignage, n’ont pas obtenu ce qui leur avait été promis. Car Dieu avait en vue quelque chose de meilleur pour nous, afin qu’ils ne parviennent pas sans nous à la perfection. Nous aussi donc, puisque nous sommes environnés d’une si grande nuée de témoins, rejetons tout fardeau et le péché qui nous enveloppe si facilement, et courons avec persévérance l’épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus, qui est l’auteur de la foi et qui la mène à la perfection. Au lieu de la joie qui lui était proposée, il a supporté la croix, méprisé la honte, et s’est assis à la droite du trône de Dieu.”

Amis auditeurs, la naissance d’un enfant peut nous remplir d’une grande joie, et d’autres sentiments positifs, particulièrement si nous en sommes les parents. Et pourtant un tel événement peut aussi susciter dans le coeur humain un sentiment d’angoisse: car la naissance d’un enfant n’est-elle pas le signe que le cycle imperturbable de la vie et de la mort est en marche? Cette naissance n’est-elle pas le signe que les parents entrent lentement mais sûrement dans la phase suivante de ce cycle, c’est-à-dire qu’ils se rapprochent de leur propre mort? Comment ne pas se souvenir des paroles de l’Ecclésiaste: “Une génération s’en va, une génération vient, et la terre subsiste toujours.” Et à quoi ressemble ce monde dans lequel arrive la nouvelle génération? Pour beaucoup, le monde ressemble à une prison dans laquelle de plus en plus d’hommes et de femmes sont maintenus prisonniers: environ six milliards de prisonniers de nos jours… On dirait en fait qu’ils sont trop nombreux pour l’espace et les ressources limitées de la terre. La naissance d’un enfant ne fait donc qu’amener un prisonnier de plus dans la prison, dira-t-on. Et que peut offrir une telle prison à un tel enfant? Il ou elle n’a pas demandé à naître, et à mesure que l’enfant grandit, il ou elle est confronté à toutes les limitations et les frustrations de la prison de la vie: surpopulation, conditions économiques et sociales défavorables, héritage politique de la génération précédente difficile à gérer, violence, pauvreté, chomage etc. Quel moyen a-t-il de s’échapper de la prison? Pour beaucoup de jeunes gens l’échappatoire c’est la consommation de drogue, de la pilule “Ecstasy”. Dans le monde occidental en particulier, on organisera des surprise-parties agitées, on conduira des voitures de plus en plus rapides, on recherchera des aventures inédites voire dangereuses, des voyages mouvementés: tout est bon, pourvu qu’on puisse nourrir l’impression qu’on s’échappe de la prison. Certains penseront s’échapper en quittant leurs parents, en se séparant de la génération précédente, car la génération précédente leur rappelle bien trop un attachement au passé: ce cycle imperturbable des générations qui se suivent leur apparaît lui aussi comme une prison insupportable.

L’auteur de la lettre aux Hébreux, amis auditeurs, nous parle aussi, au chapitre 11, de générations qui se succèdent: Abel, Hénoch, Noé, Abraham et Sara, Isaac, Jacob et encore beaucoup d’autres. Mais, comme vous l’avez remarqué, tous ceux qui sont nommés dans ce chapitre, sont décrits par une caractéristique commune: “Par la foi”. C’est ainsi par exemple qu’Abraham a quitté son pays. Cherchait-il à s’échapper? A-t-il quitté la terre d’Haran dans le nord de la Mésopotamie, où il vivait avec son père et ses frères il y a près de quatre mille ans, parce que cette terre était devenue pour lui comme une prison? Est-ce que la surpopulation, une forme d’oppression politique ou la pauvreté ont provoqué cette émigration? Lui qui avait déjà quitté Ur en Chaldée, ne parvenait-il pas à se fixer quelque part, était-il un vagabond permanent quittant un lieu pour un autre afin de nourrir un sentiment de liberté? Non. Abraham est parti parce que, comme le verset 8 nous le dit, “par la foi il a obéi à l’appel de Dieu en partant vers un pays qu’il devait recevoir en héritage.” Dieu l’a appelé, amis auditeurs: voilà la raison de son départ, et non pas une recherche personnelle éperdue de liberté. Et pourtant, il est étonnant de lire au verset suivant: “C’est par la foi qu’il vint s’établir dans la terre promise comme en un pays étranger, habitant sous des tentes, ainsi qu’Isaac et Jacob, héritiers avec lui de la même promesse.” Cela veut dire que dans le pays promis par Dieu comme son héritage, et où il était bien arrivé, il a pourtant dû vivre toute sa vie comme un étranger: “Sous des tentes”. Régulièrement il a dû aller planter ses tentes ailleurs. Dieu l’a-t-il donc trompé en lui promettant cet héritage? L’a-t-il déplacé d’un endroit à l’autre comme un joueur d’échecs déplace un pion sur une case différente de l’échiquier, lequel ressemble pourtant toujours à la même prison? Non, pas du tout. Car, chers amis, la vraie patrie d’Abraham, c’est-à-dire l’espace où il se sentait vraiment chez lui, n’était pas sa tente où les différents endroits au pays de Canaan où il plantait ses tentes. Sa véritable patrie était bien davantage une relation particulière qu’il avait avec Dieu, relation marquée par la confiance: confiance, par la foi, dans les promesses que Dieu lui avait faites, ce Dieu qui l’avait appelé. En un mot: L’Alliance. L’Alliance était la vraie patrie d’Abraham, et aussi celle d’Isaac et de Jacob, et de toutes les générations de croyants après eux. Et il doit en être de même pour nous aujourd’hui: l’Alliance avec notre Dieu est notre vraie patrie. Et si l’Alliance avec Dieu n’est pas encore devenue notre vraie patrie, si nous n’y sommes pas encore installés, et si notre loyauté ne va pas en tout premier lieu à l’Alliance avec notre Dieu, alors, amis auditeurs, il nous faut aller méditer sur notre citoyenneté dans le monde: car si tel est le cas, alors nous ne sommes que de misérables émigrants et vagabonds dans la vie, des gens qui cherchent en vain la libération et la liberté. Nous serons perpétuellement en mouvement, déménageant ou couchant à droite et à gauche, cherchant en vain un ancrage libérateur, mais incapables de le trouver: qu’il s’agisse de notre égoïsme, de la consommation de drogues, de nos affaires financières, de notre carrière ou de notre pouvoir personnel ou politique: nous tâcherons de transformer toutes ces choses en une patrie, et deviendrons toujours davantage prisonniers de nos propres désirs insensés.

Mais nous devons pourtant nous poser les questions suivantes: quelle sorte de patrie est donc l’Alliance? A quoi ressemble cet espace dans lequel Abraham s’est senti chez lui, quand on le compare à ce que les gens considèrent généralement comme leur patrie? C’est ce que nous verrons lors de l’émission suivante de “Foi et Vie Réformées, que je vous invite à suivre la fois prochaine.